jeudi 6 novembre 2014

Adaptation du roman de Flaubert Madame Bovary au théâtre

Pour mieux comprendre la pièce, Bovary , pièce de province , voici un résumé du roman de Flaubert , chapitre par chapitre: un résumé

Lire Madame Bovary en ligne

Faites un lien entre des moments du spectacle dont vous vous souvenez et le texte de Flaubert.

Extraits significatifs du roman

Adaptation du roman en BD

A sa parution, le roman a fait scandale et donné lieu à un procès

Flaubert évoque la rédaction de son roman dans sa correspondance

une série de conférences sur le roman

Article dans les DNA pendant les répétitions:

il fallait oser. Inscrire dans la mythologie de la singulière Dinoponera Howl/Factory, le drame de Gustave Flaubert, Madame Bovary. Son chef de troupe, le Strasbourgeois Mathias Moritz évoque le nouvel âge de la Dinoponera. Après un cycle germanique – Fassbinder, Liberté à Brême , Werner Schwab, Antiklima (X) – « la troupe, dit le metteur en scène, place aujourd’hui son identité dans un monument scénique ». Mais l’attaque par une nouvelle face.
Paru en 1857, le roman flaubertien porte en sous-titre, mœurs de province. Précédant le travail de plateau, Mathias Moritz s’est mis en quête de ses origines scripturaires. Lisant la correspondance de Flaubert, cherchant les brouillons. Il s’est aussi appuyé sur les interprétations de Zola, des cinéastes Jean Renoir, du russe Alexandre Sokourov.
D’entre ces écrans de mémoires, ces paroles gravées et inoubliables, Mathias Moritz fait le pari d’un récit linéaire, porté en deux actes par un souffle épique. Au prisme du personnage de Charles Bovary, le metteur en scène active un nouveau rapport à la représentation du drame. En son titre même, Bovary, pièce de province cadre une peinture des mœurs, une époque où s’affirme la montée d’un capitalisme consumériste, militariste et nationaliste préfigurant après la défaite de Sedan, la boucherie de la Grande Guerre. L’angoisse de l’avenir, le vide sidéral qu’engendre une idéologie néolibérale vue comme un système d’oppression à travers l’endettement et la rhétorique sécuritaire. Et le sexe outil malgré lui, de la société capitaliste, avec la mort omniprésente.
Décrit par Emma, comme un « homme qui était plat comme un trottoir de rue », Charles refiguré par le metteur en scène n’a pas abandonné ses rêves de théâtre. Le spectacle s’ouvre sur l’enfance de M. Bovary. « Charles est l’épilogue, la conclusion de tout le drame », postule Mathias Moritz. « Dans une construction pyramidale, Emma chute très vite, c’est une passagère du récit ».
Infléchir donc l’existence de Charles. Et comme la vie, c’est du théâtre, Charles joue au docteur, au mari, à l’imbécile. Un pré-texte pour la Dinoponera de continuer à interroger la fabrique du théâtre. Emma, elle, ne veut pas jouer mais jouir. Se sentir vivante. La pièce n’élucide pas plus le mystère qui entoure la couleur de ses yeux. Brun, ils bleuissent à l’approche de l’issue fatale.
Par-delà l’écriture de plateau, la Dinoponera de Mathias Moritz revendique une éthique partagée de longue date. Aussi Claire Rappin, issue du groupe 38 de l’école du TNS, comme Antoine Descanvelle qui incarnent Emma et Charles, ou encore Vincent Portal qui a joué le frère de Mariedl dans Antiklima (X) et trouve son prolongement à la française dans le rôle de l’odieux pharmacien Homais, mettent radicalement leur corps en exécution sur scène. Où 48 personnages – dont les amants, Léon Dupuis et Rodolphe Boulanger, les habitants de Yonville – sont incarnés par 11 comédiens. Et pour la première fois, Mathias Moritz joue avec des costumes d’époque, des postiches et des moustaches.
Dans le terreau de la langue de Flaubert, Mathias Moritz élève des murs, déconstruit et subvertit. Portée par un élan primesautier, la pièce hérite des traits d’humour flaubertiens, réactive une charge ravageuse. Qui valut à son auteur d’être jugé pour « outrage à la morale publique et religieuse et outrage aux bonnes mœurs ».
Quatre fresques – le mariage, le bal, la foire-exposition, l’opéra à Rouen – posent la tension d’un réalisme nu, d’une poétique puissante. Confiées inauguralement à Matthieu Ferry, les lumières travaillent la scène latéralement quand le son spatialisé et la musique jouée live au saxophone par Octave Moritz, déjouent nos attentes. Alternant les hits de Queen, de Modern Talking d’un musical à la Broadway, à la comptine Un jour mon prince viendra. Composite, organique, Bovary, pièce de province déroute plus encore après l’entracte, notre logique boiteuse. Dans le désir, la force et l’impudence.