mardi 31 janvier 2017

Eugène labiche, auteur des deux pièces contenues dans Animals



Eugène Labiche, l’auteur 

Auteur dramatique français, né en 1815 et décédé en 1888. « Labiche n’est pas seulement un merveilleux amuseur, mais un observateur profond, un railleur qui sait toujours où va son rire. » Alphonse Daudet
Après de nombreux vaudevilles en un acte dans lesquels il se fait la main avant de se frotter à la grande comédie de moeurs et de caractère, Labiche passe pour l’inventeur d’une situation comique nouvelle, l’absurde et d’un personnage historiquement daté : le bourgeois crédule et poltron du second Empire.
Fils d’un industriel qui exploite à Rueil une fabrique de sirop et de glucose de fécule, Eugène Labiche réalise, après le baccalauréat, un long voyage en Italie, dont le Journal donne le ton de la relation ambiguë, essentiellement parodique, entretenue par le jeune homme avec l’héritage romantique.

Un producteur infatigable
Maniaque de l’ordre et de la symétrie, conformément au milieu dont il est issu, Labiche produira pas moins de deux cents pièces, presque quarante ans d’une production boulimique d’oeuvres inégales en dimensions comme en qualité, presque toujours écrites en collaboration. Elles sont créées sur des scènes parisiennes, le Palais-Royal, le Gymnase, les Variétés ou les Bouffes Parisiens, et défendues par des acteurs souvent doués d’une forte personnalité, bien connus des auteurs comme des spectateurs et aguerris à ce genre de répertoire. 

L’exaltation comique du bourgeois
Jusqu’en 1860, Eugène Labiche tâtonne, cherche son style en accumulant les comédies en un acte, s’apparentant au genre à la mode, le vaudeville. En 1851, sa première comédie en cinq actes Un chapeau de paille d’Italie est saluée par beaucoup comme une « trouvaille de génie », avec ce célèbre motif de la course-poursuite, chasse tumultueuse à la chose ou l’être perdu, souvent repris au début du XXe siècle par les grands burlesques du cinéma muet. Le vaudeville en un acte évoluera dès lors assez sensiblement vers la « grande » comédie de moeurs et de caractère. 

Une nouvelle lecture
Toutefois, malgré cette consécration par les institutions les plus conservatrices du second Empire et de la IIIe République, le regard d’Eugène Labiche sur les travers de la bourgeoisie triomphante demeurera suffisamment lucide et corrosif pour que les metteurs en scène contemporains les plus critiques, voire les plus engagés, depuis les années soixante, se passionnent à redécouvrir et à réhabiliter les vertus dramatiques de son oeuvre :
Après Chéreau (L’Affaire de la rue Lourcine, 1966), viennent Jacques Lassalle (Célimare le bien- aimé, 1970, La Clé, 1986) ou Jean-Pierre Vincent (La Cagnotte, 1971)... Ce sont la noirceur de son humour et la férocité de ses portraits qui, en cet auteur, attirent aujourd’hui ces infatigables relecteurs de classiques, mais il ne faudrait pas cependant négliger, aux côtés du matériau très ambigu légué par Labiche, certains partis pris audacieux qui le rangent en son siècle parmi les hommes de progrès, en faveur de la photographie par exemple (il fut l’ami intime de Nadar) ou des chemins de fer.
Y. Mancel, in Dictionnaire encyclopédique du Théâtre, sous la direction de Michel Corvin (Bordas, 1995)

vendredi 3 février Animal's d'Eugène Labiche

Animal's est l'assemblage de deux pièces en un acte d'Eugène Labiche: La dame au petit chien et Un mouton à l'entresol.
Représentation le vendredi 3 février à 20h30 à la CDE Durée 2H05
Textes des deux pièces:
- Texte intégral de La Dame au petit chien :
http://sd-5b.archivehost.com/membres/up/f3efefbd535b01d03dc6dee2c6446916e21b62 8f/La_Dame_au_petit_chien.pdf




Notes d'intention du metteur en scène: interview du metteur en scène



L’origine du projet
Dans une interview, Benno Besson, figure du théâtre européen du XXème siècle, parlait du théâtre français et du vaudeville comme étant la seule tradition vivante encore en France. À l’époque, cela m’avait choqué. Aujourd’hui, cela m’intrigue et me donne envie de le prendre au mot.
Choisir de monter ces deux pièces, c’est d’abord mettre les pas dans ceux du grand moraliste du XIXème siècle. Surveillé par la censure du Second Empire qui s’enivre de ses divertissements agréables, Labiche y déploie habilement satire et métaphysique.
C’est aussi pour interroger à travers la mise en jeu de ces textes de vaudeville, un art particulier de l’acteur : « L’acteur comique à la française », à un moment de mon travail, où je veux me concentrer sur l’art de l’acteur et en particulier son corps et sa voix.
De quoi s’agira-t-il ici ? Avant tout, de mettre en oeuvre un art du corps, différentes natures de présence du corps. Corps marionnettique, siège de pulsions, agité, agissant et agi, joué par des forces obscures internes (l’inconscient) et externes (l’Histoire). Corps déchainé, bondissant, muet empêché, malade ; corps impuissant ; corps étouffé, névrosé, contraint, encombrant, mécanisé ; corps maladroit, qui casse, qui se casse ; corps désirant, exubérant, corps siège de la contradiction entre le désir et la volonté : le corps symptôme...
Le vaudeville implique aussi des acteurs qui sachent chanter. La voix est le premier lien entre le corps et l’expression. Labiche va du parlé au chanté, en passant par toute une palette de locutions qui fait de la voix l’expression de l’indicible : cris, sons, respirations, mots qui buttent, qui redoublent, lapsus... tout un ensemble de « matériaux » qui composent la partition vocale de ces pièces courtes. Nous avons proposé à un compositeur d’en réécrire les chansons. J’ai pensé à Jonathan Pontier, un compositeur d’aujourd’hui, qui travaille indifféremment musique populaire et musiques savantes.
Pour ce travail vocal et physique, je souhaitais mener une réflexion sur la voix et des physicalités particulières. Une série des laboratoires de recherche (danse, marionnette, masque, voix…), ont été mis en place avec différents intervenants (sous réserve, Karine Pontiès, chorégraphe ; Renaud Herbin, marionnettiste ; Marianne Pousseur, chanteuse…). Avec Laurence Villerot, scénographe, nous avons essayé d’arracher Labiche au salon bourgeois du XIXème siècle. Nous avons construit un décor unique, non figuratif, pour les 3 pièces, qui sera une « machine à jouer » pour les acteurs, autour de la figure des portes, un espace contraignant, avec en son centre une machine sonore.
Jean Boillot, metteur en scène de la pièce.

héâtres en Utopie: architectures

Une exposition sur les lieux théâtraux les plus inventifs imaginés par des architectes. elle est malheureusement terminée mais vous pouvez trouver des documents en ligne sur ce projet.

dossier d'accompagnement

Une émission de radio

Luc Tartar, écrivain associé au projet Utopies

Lien vers son site

Texte que nous avons travaillé hier:




TROUVER GRÂCE  — extrait
Un tour du monde
Tu irais où toi ? Et par quel moyen de transport ? A pied à vélo en avion en auto ? Est-ce que tu partirais tout nu comme le jeu qu’on voit à la télé avec la débrouillardise en bandoulière sans savoir où tu vas à l’aventure récupérant des vêtements et composant ton itinéraire au fil des rencontres ? Ou est-ce que tu planifierais tout passant des nuits en cachette des parents à étudier les pays les civilisations les us et coutumes des peuplades les plus lointaines et la route la plus sûre la plus belle la plus époustouflante pour les rejoindre ? Tu partirais pourquoi d’abord ? Pour voyager voir du pays des îles paradisiaques et les beautés qui vont avec hommes et femmes animaux tous plus beaux les uns que les autres pour changer d’air de vie d’environnement et d’entourage…
Respire.
…ou tu partirais pour frimer faire des selfies avec des gens devant des paysages des monuments et poster tes photos sur Facebook ?
Ouf.
Je prends le globe terrestre et je dis ICI. Là où est posé mon doigt j’irai. Voilà comment moi je choisirais.
Et si tu tombes dans la mer ?
Je suis libre de faire tourner le monde comme je l’entends aussi longtemps que je le veux et je pose mon doigt sur les terres sur les mers
Tu triches !
Dans la mer faut bien regarder des fois y a des îles.
La Patagonie.
C’est pas une île !
C’est au bout du monde. Il y a la mer.
Oui mais c’est pas une île !
Il y a des îles. J’irai là.
C’est froid.
Quitte à choisir moi je choisis Tahiti. Ou les Maldives. C’est bien aussi les Maldives.
C’est chaud.
Il paraît que sur les plages il y a des vendeurs qui vendent des cages à oiseaux tu achètes une cage tu ouvres la cage et les oiseaux trois couleurs s’envolent en file indienne virevoltant dans le ciel comme le fil coloré d’un cerf-volant c’est drôlement beau.
A quoi ça sert ?
A faire quelque chose de beau ! A voir quelque chose de beau.
Ça ne sert à rien.
A relâcher des oiseaux.
Pour quoi faire ?
Et la cage qu’est-ce que t’en fais ?
Quel rabat-joie ! Dans la vie on fait des tas de choses comme ça qui ne servent à rien.
Comme ce jeu débile le globe le doigt et plouf dans l’eau !
Moi j’aime pas les jeux débiles.
Comme quand le prof nous fait ouvrir le dictionnaire au hasard des pages.
J’aime bien moi : on tombe sur des mots inconnus.
A quoi ça sert ? Qu’ils restent dans leurs pages !
Mais s’ils restent dans leurs pages c’est idiot on ne les connaîtra jamais.
Il paraît qu’en Afghanistan ils font des concours de cerfs-volants.
A Berck aussi ils font des concours de cerfs-volants.
Où ?
Oui mais là c’est du sérieux. De vrais combats. Ils enduisent les fils de colle de poisson et de verre pilé et quand deux cerfs-volants s’affrontent il y a des morts.
Il y a toujours des morts en Afghanistan.
Y a pas qu’en Afghanistan qu’il y a des morts.
C’est vrai. Y en a partout. La liste est longue des pays où ça meurt en vrac.
Ça meurt aussi en bas de chez toi si tu vas par là.
Voilà pourquoi moi je partirais : pour les morts en vrac. Leur porter secours.
S’ils sont morts c’est trop tard !
Comment tu peux vivre sans bouger quand tu vois tout ça à la télé et tous ceux qui fuient leur ville en se crashant dans leur vie ?
Tu parles en vrille.
C’est trash.
On dit Tu pars en vrille. Pas tu parles.
Moi j’aime pas connaître des mots nouveaux.
Des morts nouveaux tu veux dire.
Venant de pays du bout du monde et d’îles paradisiaques aux longues plages de sable blanc tachées de sang.
Moi je veux surfer tranquille chez moi dans ma chambre devant mon écran à jouer et tchater et à faire le tour du Net c’est un autre tour du monde.
Le monde entier à portée de clic 
Y a plus besoin de partir !
Tu parles. Et tous ceux qui ne peuvent pas faire autrement ? Ceux qui fuient la misère la guerre la dictature… avec rien dans les mains que leur tête parce qu’ils n’ont pas eu le temps de prendre quelque chose… 
Tu crois que c’est pour ça qu’elle est partie ?
Y a pas la guerre ici.  
Non je veux dire : parce qu’elle aussi elle a le désespoir en bandoulière ?  
Qui a dit ça ?
Les bruits circulent depuis qu’elle a disparu. 
Elle n’a pas disparu. Elle est sortie du cours. 
Mais depuis on ne l’a pas revue. 
Hakim a refusé de sortir quand le prof lui a demandé. C’est elle qui est sortie. C’est tout. 
Tu trouves ça normal ? Le prof demande à un élève de sortir. L’élève refuse. Il y a un face à face terrible et tout à coup c’est une autre élève qui sort et qui claque la porte. Et celle-là on ne la revoit jamais. 
Parle pas de malheur.  
En tout cas c’est pas normal. Moi je dis il y a aiguille sous roche.   
Anguille.
Et comment faire pour la retrouver ?  
Alerte enlèvement. 
C’est pour les enfants. 
Autant chercher une anguille dans une botte de foin. Non c’est bon je déconne. 
Tu déconnes ? Grâce a claqué la porte elle a couru dans le couloir descendu l’escalier elle est partie en trombe dans la ville on perd sa trace dans le méli-mélo des voies rapides et des échangeurs elle passe sous des ponts voit tomber la nuit dort dans l’inconnu se réveille en larmes ne peut pas se laver peut-être qu’elle est en danger entravée et toi tu déconnes ? Tu irais où toi si tu étais elle ? Et par quel moyen de transport ? Est-ce que tu partirais sans savoir où tu vas ? Ou est-ce que tu planifierais quelque chose ? Imagine. Tu es elle. Où tu vas ? Qu’est-ce que tu fais ?
Je suis Hakim. 
C’est vrai que vous vous êtes disputés ?