lundi 29 décembre 2014

Abécédaire du projet Lampedusa ( à améliorer et illustrer)



Baleinite : Nom féminin singulier ; Plus souvent appelé par les scientifiques "consonnotisme". La baleinite est souvent traitée comme une maladie (plus ou moins grave). Mais, grâce au projet Lampedusa écrit par Lina Prosa, nous avons appris que la baleinite est en réalité une petit porte entre les dents qui laisse entrer et sortir l'air. D'après les paroles de Mahama l'afffricaine, les personnes victimes de baleinite doivent se concentrer sur les mots avec plus de voyelles.

Bateau : n.m. objet permettant aux migrants de traverser la mer pour rejoindre l’Europe, il n'est pas en bon état et  souvent très sale et trop petit, pourtant des homme payent très cher pour faire la traversée dirigée par des passeurs cupides et sans scrupules. Le bateau est souvent « le dernier bout de bois » comme le dit Mahama mais ne rejoint pas souvent sa destination sans encombre. Il n'emmène pas assez d'eau potable et de nourriture avec lui pour la traversée, « bateau » est souvent associé au bâtiment où les poulets sont en batterie car les migrants y sont entassés. Pour les migrants, il est souvent un cercueil flottant.

Beach : traduction du mot « plage «  en anglais. Il est présent dans le titre de la pièce « Lampedusa Beach » écrite par Lina Prosa et qui est le premier opus du Triptyque du Naufrage. La beach est la place où la terre rencontre l’eau. Elle est comme l’horizon, la frontière de la terre et du ciel. Quelque fois la beach est pour les migrants vraiment comme l’horizon attendu et rêvé. La plage, cette terre nouvelle et ses paradis symboliques. ( Pourquoi selon vous Lina Prosa a-t-elle laissé le mot en anglais dans le titre ?)

Chanson : n.f . Une collection de sons musicaux et spécifiques qui expriment des émotions. Bella Ciao est une chanson révolutionnaire italienne mentionnée dans la pièce Lampedusa way. ( A étoffer : utilisation de la chanson  et de la musique dans notre spectacle, autre chanson mentionnée dans la pièce)

Distanciation : n.f. Terme qui renvoie à la conception épique du théâtre élaborée par Bertold Brecht. La distanciation est un effet qui coupe l’illusion de réalité créé parfois dans le théâtre traditionnel.  L'acteur et le spectateur ne peuvent pas s'identifier à Shauba, Mohamed, Mahama ou Saïf dans notre travail. Les personnages s'adressent tous au public, ils veulent faire passer un message, émanciper les spectateurs, ici à propos de l'immigration. La mise en scène est distanciée. La scène est par exemple découpée en trois parties pour représenter les trois histoires parallèlement, celle de Shauba dans Lampedusa Beach qui parle depuis le fond de la mer est éclairée en bleu à jardin, celle de Mahama et Saif dans Lampedusa Way est placée au centre sur des copeaux de sciures qui suggèrent la plage de Lampedusa, six comédiens incarnent les deux personnages de façon chorale afin de montrer que beaucoup de personnes sont à la recherche de nouvelles de parents disparus en Méditerranée, celle de Mohamed est représentée à cour dans un éclairage blanc qui intensifie l’effet de froidure matérialisé aussi par de la fausse neige disposée sur le plateau. La distanciation existe déjà dans le texte qui ne raconte pas une histoire chronologique et linéaire : Shauba est en train de se noyer mais elle parle, la comédienne joue avec l'eau qu’elle agite dans un seau pour reproduire le bruit des vagues pendant tout le spectacle.  Il n'y a pas de 4ème mur, le spectateur est incité à écouter et regarder une théâtralité exhibée : les comédiens sont toujours présents sur le plateau habillés simplement de noir. 

Documentaire : n.m. Film  souvent visible à la télévision mais qui peut aussi de plus en plus se voir  au cinéma. Il explique avec des chiffres et des images les conditions des migrants avant leur départ, pendant le voyage et à leur arrivée en Europe, il défend en général les migrants et explique ce qui peut pousser un homme a quitté sa maison, sa famille, ses racines, ses amis pour aller dans un pays  souvent hostile où il ne parle pas la langue locale.
Il permet aux autres de voir vraiment la détresse des gens sans passer par les médias des JT de vingt heures souvent partiaux et formatés. Les journalistes et réalisateurs restent plus longtemps  sur le terrain pour préparer le film et ils reviennent avec une vision différente de ces gens qu'on dénigre trop souvent.( A étoffer en parlant du théâtre documentaire)

El Dorado :  n.m. de l'espagnol "le doré". Pays imaginaire, symbole de richesse et de bonheur. Pour les Africains, la quête de l'El Dorado passe par une escale à Lampedusa. Celle-ci est souvent déterminante de leur arrivée en Europe et donc de leur atteinte de ce qu'ils associent à un El Dorado. ( A étoffer en évoquant un chapitre de Candide de Voltaire et le roman éponyme de Laurent Gaudé)
 Facteur : n. m. Le facteur est un personnage qui n'apparait qu’indirectement dans la pièce. Il est évoqué par Saïf quand celui-ci l'aperçoit lors de la grève. Il affirme que pendant leur premier entretien le facteur regardait constamment ses pieds. Peut-être que Saïf n'a pas de chaussures et donc le facteur a trouvé cela étrange et  a deviné que Saïf était un immigré. Est-ce un habitant de Lampedusa? Comment Saïf a t-il rencontré le facteur et où l'a t-il aperçu  exactement la première fois? A la fin de la pièce, Saïf et Mahama écrivent une lettre qu'ils veulent remettre au facteur pour qu’il l’envoie à l’Ambassadeur  mais comment? Ce personnage reste très énigmatique.

 Grève : n. f.  Rassemblement de personnes qui sont peut-être contre les migrants ou qui protestent contre quelque chose qui modifie leur condition de vie, et à qui on devrait expliquer que si les migrants quittent leurs maisons, leur pays, c'est pour de bonnes raisons. La grève est  peut-être organisée par des personne qui ne sont pas au courant de ce qui se passe en Afrique et dans les centres de rétention, qui ressemblent plus à un centre de détention ; ces gens pensent  peut- être que l’Etat donne trop facilement l'asile politique. Ils disent que les migrants font une mauvaise publicité  pour leur île  comme dans le film Terra Ferma, mais c'est uniquement à cause de l'image que les gens ont d’eux, une image fausse et puérile. N'est ce pas un français qui a dit « tous les hommes naissent libres et égaux en droit ».
Le mot « grève » en langage soutenu désigne aussi la plage.


 Kadir : nom propre. Kadir est le jeune comédien jouant le rôle de Saïf, personnage principal de Lampedusa Snow, dans le triptyque du naufrage. Il est en première spécialité théâtre et rêve de faire du théâtre son métier.

 Lampedusa : 1.Île italienne de la Méditerranée, entre Malte et la Tunisie.
2. Lieu de résidence du Capitaliste. Exhibe à la vue des Africains la richesse des Européens à travers les parasols et le yacht que l'on peut y voir.
3. Plage terrestre servant d'arrivée à de nombreux migrants venus en Europe par voie maritime. Ceux-ci s'en servent de repère afin de reconnaître l'Europe. Les migrants qui s'y trouvent ont souvent le sentiment d'avoir atteint leur objectif car ils ont échappé aux dangers de la mer. En Afrique, Lampedusa a gagné sa renommée grâce à de nombreuses cartes postales la représentant.
4. Plage sous-marine caractérisée par la constitution au fil des ans d'un cimetière marin. Parmi les débris d'embarcation, on trouve les restes de centaines de migrants autour desquels nagent tranquillement des thons repus. (Renvoyer plus précisément au texte en le citant ou en mentionnant les pages)
Migrant, n.m. 1.Personne désirant vivre ses rêves en atteignant un lieu leur correspondant.
2. Personne dont la vie dépend de la solidité d'un bateau ou de son équilibre.
3. Survivant ayant su faire face aux dangers de la mer, mais qui dépend de l'aide internationale.
4. Ancien statut de la majorité des squelettes gisants à Lampedusa
 Monologue : n.m. L'histoire de Shauba et de Mohamed est à reconstituer par le public à partir des monologues qu’ils prononcent. Ils s'adressent aux spectateurs. Chaque monologue est regroupé dans un livre, un monologue correspond à une histoire. Shauba raconte sa noyade, ses paroles avant de mourir et Mohamed raconte son arrivée dans les Alpes et comment il y a vécu avant de mourir. Le monologue est important, il permet aux personnages de rapporter librement leur pensées et de faire  comprendre aux spectateurs la vraie situation des immigrés.
(Evoquer l’importance du monologue dans la littérature théâtrale contemporaine)
Passeur : n.m. Un passeur est quelqu’un qui est chargé d’amener des personnes d’un lieu à un autre moyennant un pris de « transport ». On parle notamment de passeurs dans les voyages clandestins où des hommes sans scrupules s’enrichissent en prenant l’argent de personnes désespérées leur promettant de les conduire au « paradis »Parfois, voire souvent, ils ne tiennent pas leur promesse, reviennent en arrière, abandonnent leurs passagers dont on ne saura jamais rien en plein milieu de la mer sans que les migrants puissent s’assurer d’être arrivés à la destination voulue. Bien souvent le voyage leur est fatal. Dans Lampedusa beach, les passeurs sont évoqués comme des gens sans scrupules à qui on ne peut pas faire confiance.

Poisson : Les poissons sont les animaux qui se trouvent sous l'eau, comme Shauba. Les poissons vivent sous l'eau, Shauba y meurt. En se noyant, elle est entourée de ces poissons qui se jettent sur elle pour dévorer son cadavre. Le capitaliste mange les poissons. Les poissons mangent Shauba. Elle les évoque en parlant de la baleinite. Elle est persuadée qu'ils en souffrent éternellement restant toujours plongés dans l'eau.
Prosa : nom de famille de l’écrivain italienne Lina Prosa auteur du triptyque du naufrage composé de Lampedusa Beach, Lampedusa Snow et Lampedusa Way. Cette trilogie raconte la destinée des migrants qui meurent en Méditerranée notamment à proximité de l’île de Lampedusa alors qu’ils cherchent une vie meilleure en Europe. (A préciser)

Quête, n.f. Recherche obstinée et souvent périlleuse d'un objet, d'un lieu. Mot autrefois associé au Saint Graal et aux chevaliers de la Table Ronde. Les Africains désirant atteindre l'Europe lui donnent un sens plus moderne en montrant, à l'image des chevaliers d'antan, leur volonté de braver tous les dangers afin d'atteindre leur objectif: l'Europe.

Shauba : nom propre, personne qui a vu, senti, entendu Lampedusa et qui a découvert la froideur de l’eau, des passeurs , des poissons , et se rattachant à ses lunettes de soleil alors que ce n'est pas , objectivement , une bouée. Elle voulait tellement découvrir le monde qu'elle finit par en mourir. Elle devait aller dans une famille capitaliste, elle finit dans la mer, triste. Elle était joyeuse et belle mais aujourd’hui on la ramasse à la pelle au fond de la Méditerranée. Shauba n'était pas, elle est ! Car elle restera toujours comme une âme au fond de l’eau, un symbole pour tous les migrants mais aussi pour toutes les comédiennes qui l’interprètent et les spectateurs qui ont entendu sa voix. On dit souvent que les Africains font le voyage inverse des cigognes, mais les cigognes elles rentrent toujours à la maison.

Thon : poisson carnivore qui prend la mer méditerranée pour un plat de pâtes trop salées, ils mangent les migrants qui meurent dans l'eau et nous les mangeons par la suite en achetant du thon. Ce n'est pas la faute du thon mais des Hommes ! Les thons sont innocents mais les hommes non. Le poisson se nourrit de ce qu'il trouve et nous rejetons la faute sur lui ? Comment faire pour éviter de manger des hommes ? Un indice ? Ce n'est pas de  ne plus manger de thon de la mer méditerranée. Tu ne sais pas ? Et bien c'est d'éviter que des Africains meurent dans la mer en les aidant à traverser ou à rester chez eux dans la dignité ! 

 Utopie : nom commun féminin. Une utopie est un idéal irréel, comme par exemple, celui pour les migrants africains d'arriver en Europe, y être acceptés et  y trouver un travail. Dans le projet Lampedusa on comprend bien que ce n'est effectivement qu'une utopie à travers le récit de Saïf, qui nous raconte en quelque sorte la désillusion devant la réalité de ce qui était considéré comme une utopie par les Africains.


Yacht : n.m. Un yacht est un bateau de luxe très grand. Dans les pièces de Lina Prosa, le « capitaliste » possède un yacht. On peut y voir une allusion à la différence de statut social qui oppose la plupart des migrants obligés de voyager sur des bateaux rudimentaires aux  riches occidentaux, qui sur leur yacht, profitent de la mer méditerranée pendant leurs loisirs

Bonheur de lecture des vacances de Noel: Stanislas Nordey, locataire de la parole


Pour mieux connaître le nouveau directeur du TNS avec lequel nous allons travailler les prochaines années, j'ai lu le livre publié en 2013 aux Solitaires Intempestifs au moment où Stanislas Nordey était artiste associé au festival d'Avignon écrit par Frédéric Vossier, l'un des auteurs que Nordey a fait découvrir.
 L'ouvrage est absolument passionnant et je vous le recommande.Il se compose d'une première partie consacrée à des entretiens couvrant plusieurs périodes décisives de sa vie, d'une deuxième partie consacrée aux témoignages de proches et d'une troisième partie qui porte sur l'analyse de son travail de comédien et de metteur en scène.
Résumé du livre


Conférence à la BNF


lundi 22 décembre 2014

Cadeau de Noel: Bovary, pièce de province en ligne sur Szenic

Pour tous ceux qui n'ont pu voir le spectacle et ceux qui veulent le revoir pour mieux le comprendre, il est en ligne sur szenic

une interview sur rue 89 strasbourg

Catharsis, purgation des passions ( petit rappel pour les terminales)

L'art comme exutoire des passions


Le mot [κάθαρσις] est d'abord lié aux rituels de avant de devenir un terme hippocratique relevant de la théorie des Il a été investi par la Poétique d' qui a infléchi son sens en soutenant, contre que la et le peuvent soigner l'âme en lui donnant du Sous la traduction consacrée de «   », il relève du discours classique sur la tragédie (Corneille, 1660), avant de réapparaître sous sa forme grecque dans les textes de critiquant critique d' (le grec, déjà présent dans l'anglais, revient alors dans le français à propos de Lessing, 1874, ). En psychanalyse et en psychothérapie, la «   », que dégage progressivement de son lien à l' est liée à l' à la décharge émotionnelle qui, par l'entremise du langage, permet d'évacuer l' lié à un événement traumatique. Entre purification et purgation, l'oscillation du sens, sous la constante d'un mot qui a traversé les langues, n'a cessé de donner matière à polémiques et à réinterprétations.

Article détaillé

vendredi 19 décembre 2014

Films à voir d'urgence pendant les vacances

Timbuktu de de Abderrahmane Sissako : Bande annonce sur Arte
Le film passe encore au Colisée de Colmar jusqu'à mercredi.



Timbuktu de Abderrahmane Sissako a connu une genèse particulière. Conçu au départ comme un essai documentaire sur la poussée du fondamentalisme islamique dans la région de Tombouctou au Mali, inspiré par l’histoire vraie d’un couple non marié lapidé par les extrémistes qui avait choqué le réalisateur, le projet est devenu durant son écriture et son processus de création un film de fiction, sur les mêmes thèmes. Avec la volonté de prendre ses distances avec le témoignage filmé accablant, Sissako signe avant tout un grand film de cinéma, en prise directe avec la situation politique, mais capable de toutes les libertés et d’une licence poétique qui n’est pas non plus celle des contes immémoriaux auxquels nous a habitué le cinéma africain.
Le film raconte l’histoire de Tombouctou pris en otage par une troupe de jihadistes qui impose sa loi par la violence et l’intimidation à une population musulmane déjà respectueuse des préceptes du Coran et qui refuse de s’incliner, adoptant une résistance plus ou moins passive.
Sissako montre les extrémistes religieux comme un assortiment hétéroclite de bras cassés, de fanatiques, de types plus ou moins bornés, sincères ou pétris de contradiction, issus d’horizons divers – souvent incapables de se comprendre entre eux car ils ne parlent même pas la même langue et parfois fort mal l’arabe.
Cette absence de manichéisme permet de doter les jihadistes d’un visage, d’en faire des personnages de cinéma et pas seulement une masse anonyme, silencieuse et masquée. Leurs commandements peuvent provoquer le rire ou être tournés en dérision par la population, réticente à l’idée de ne plus pouvoir fumer, faire de la musique ou jouer au foot, tandis que les femmes crient leur colère quand on les oblige à porter des gants et des chaussettes dans la rue.
L’une des scènes les plus belles et étonnantes du film montre des jeunes jouant au foot sans ballon, pour déjouer la surveillance et les brimades des rondes de Jihadistes. Mais la bêtise et l’absurdité n’ont pas que des conséquences comiques, et Sissako n’occulte rien des châtiments et condamnations à mort – terrible scène de lapidation, point de départ du projet et revient comme un cauchemar à l’intérieur du film – jusqu’à l’issue tragique et bouleversante.
Sissako confirme sa position phare de plus grand cinéaste africain, mais surtout de grand cinéaste tout court, avec cette façon très émouvante de capter la beauté là où elle se trouve, dans les visages d’hommes, de femmes et d’enfants, les moments de bonheur et la nature dans toute sa sérénité, insensible à la folie humaine.

jeudi 18 décembre 2014

Urgent 1ère de spécialité: première séance avec Sandrine

Sandrine Pires sera avec nous le lundi 5 janvier. Elle vous demande d'avoir relu La Dispute et donc d'avoir le texte, de préparer une improvisation solo originale pour résumer votre vision de la pièce- cela lui permettra de vous découvrir au plateau- et d'imaginer une scénographie possible de la Dispute, donc à vos crayons et couleurs et pourquoi pas une maquette. Je compte sur vous pour être à la hauteur des éloges que je lui ai faits à propos du groupe des 1ères de spécialité!

mercredi 17 décembre 2014

Quatre émissions sur Ariane Mnouchkine ( France Culture)

Pour fêter les 50 ans du théâtre du Soleil, France Culture invite Ariane Mnouchkine dans quatre émissions passionnantes.
Emission du lundi 15 décembre

Première d'une série de quatre émissions en compagnie d'Ariane Mnouchkine, metteur en scène, fondatrice et directrice du Théâtre du Soleil. Une première émission autour de ses débuts et de l'idée de transmission

C'est dans son "lieu de travail, de vie", la Cartoucherie, qu'elle reçoit. Plus précisement dans la bibliothèque, surnommée "le temple", qui sert aussi de refuge... "Même dans une bibliothèque pas très grande, il y a virtuellement tous les trésors du monde". A titre personnel, Robinson, le Capitaine Fracasse, Victor Hugo... furent ses premières lectures marquantes.
Elle raconte son enfance, pendant la Seconde Guerre Mondiale. "Les traumatismes se sont abattus sur la partie adulte de la famille, pas sur moi. J'ai eu de la chance..."
Son père, le producteur Alexandre Mnouchkine, était inquiet à l'idée de la voir faire du théâtre. "Les artistes ont peur de ce monde pour leurs enfants (...) Malgré tout il m'a énormement aidée..."
Il la pousse à partir pour Oxford : "un des plus beaux cadeaux qu'il m'ait  fait". C'est là, en faisant du théâtre universitaire avec Ken Loach, qu'elle comprend qu'elle veut en vivre. "Je l'ai su un jour, comme ça, pendant une répétition de Coriolan. Le coup de foudre..."
Un autre moment marquant :  "Arlequin, serviteur de deux maitres" de Giorgio Strehler. "C'était comme la statue du théâtre lui-même...".
Elle nous parle du concept de maitre. "Un maitre c'est celui qui veut, au fond, que son éléve le quitte (...) Un chef de troupe ne veut pas qu'on le quitte (...) Si je pouvais garder tout le monde, je garderais tout le monde..."
"Ce moment de répétition où tout est possible, où on peut être autre, créer un monde..."
Le théâtre du Soleil a eu la chance de bénéficier de l'esprit de la Libération. "On croyait en nous, on nous attendait..." Elle aimerait qu'il en soit de même pour la jeunesse actuelle : "on ne lui parle pas de sa responsabilité, de toute la part qui lui revient, de tout ce qu'elle a à faire, on ne lui raconte que ce qu'elle a à subir (...) Le venin du désenchantement et donc de l'égoïsme individualiste (...) est un mensonge..."
"Nous devons recommencer à éduquer nos enfants au courage et à la confiance. On se trompe beaucoup plus souvent quand on ne pas fait confiance que quand on fait confiance..."

"L'essence même du théâtre c'est la poésie faite chair (...) C'est aussi le mystère (...) Le théâtre peut, doit souvent raconter des choses abominables..."
Quand elle reçoit des jeunes, elle attend de l'émotion. "Qu'ils sachent que cela leur appartient. Qu'ils ont en eux cette beauté, même si cela va s'exprimer différemment dans leur vie..."
Ariane Mnouchkine aimerait toucher tout le monde, dans la tradition de Jean Vilar. "Quand j'ouvre la porte le soir, j'ai la même émotion de les voir arriver..."
L'éducation, l'idée d' "égalité d'expression", la lecture, closent ce premier entretien...

mardi 16 décembre 2014

L'acteur Marlon Brando

Pour vous expliquer la puissance de désir que peut créer un acteur, Patrice vous a donné l'exemple de Marlon Brando.Voici un excellent documentaire sur cet acteur incroyable Marlon Brando un acteur nommé désir à regarder pendant une semaine.Marlon Brando a été formé selon la méthode de Stanislavski mais il est entré dans l'école presque par hasard.

Le thème de la nourriture dans le spectacle vivant ( 2nde enseignement d'exploration)

Un petit écho au projet Délice du début d'année, le chorégraphe Boris Charmatz a intitulé sa nouvelle pièce présentée au festival d'Automne à Paris Manger. Les danseurs se sont interrogés sur notre façon de manger, sur l'importance de la nourriture, sur le rapport que nous avons avec elle et cela a donné lieu à une performance assez déroutante pour le public dont vous pouvez voir un extrait

"nous mangeons couché nous dormons debout nous digérons les informations nous dansons la bouche pleine nous chantons en mâchant nous mâchons en marchant nous dansons en pensant en chantant en avalant nous attaquons le mouvement à partir de la bouche des lèvres des doigts que nous suçons des pieds qui touchent la nourriture au sol la danse est du palais la danse est des dents la danse est de la langue nous enlevons table et chaises et nappe nous enlevons le rituel du repas nous imaginons une sorte de repas en mouvement nous mangeons tout nous mangeons de tout tout le temps longue chaîne de nourriture passées de bras en bras la nourriture disparaît dans les corps le décor devient invisible la chorégraphie des gens devient aussi la chorégraphie des aliments qui traversent l'espace puis le corps par l'intérieur l'essentiel est enfoui dans la gorge nous ne voulons pas mourir étouffé nous faisons la grève de la faim notre corps devient un objet de grève nous avalons le message nous avalons le réel nous digérons les conflits un enfant mange en dansant"
notes (extrait), Boris Charmatz

Une analyse critique de cette chorégraphie

Une autre proposition canadienne: Cuisine et confessions

Projet Lampedusa article dans L'Alsace

Un petit article dans le journal local avec une photo

samedi 13 décembre 2014

Interview d'Ariane Mnouchkine sur France Inter

Emission L'Humeur Vagabonde consacrée à Ariane Mnouchkine




Le Rire de Bergson ( pour réfléchir au théâtre de Feydeau)

Petit clin d'oeil à Hélène et aux terminales de spécialité.
L'ouvrage du philosophe peut se lire en ligne
Un blog philo qui résume le livre

Extrait du chapitre 2


"Un homme, qui courait dans la rue, trébuche et tombe : les passants rient.
On ne rirait pas de lui, je pense, si l’on pouvait supposer que la fantaisie lui est
venue tout à coup de s’asseoir par terre. On rit de ce qu’il s’est assis involon-
tairement. Ce n’est donc pas son changement brusque d’attitude qui fait rire,
c’est ce qu’il y a d’involontaire dans le changement, c’est la maladresse. Une
pierre était peut-être sur le chemin. Il aurait fallu changer d’allure ou tourner
l’obstacle. Mais par manque de souplesse, par distraction ou obstination du
corps, par un effet de raideur ou de vitesse acquise, les muscles ont continué
d’accomplir le même mouvement quand les circonstances demandaient autre
chose. C’est pourquoi l’homme est tombé, et c’est de quoi les passants rient.
Voici maintenant une personne qui vaque à ses petites occupations avec
une régularité mathématique. Seulement, les objets qui l’entourent ont été
truqués par un mauvais plaisant. Elle trempe sa plume dans l’encrier et en
retire de la boue, croit s’asseoir sur une chaise solide et s’étend sur le parquet,
enfin agit à contresens ou fonctionne à vide, toujours par un effet de vitesse
acquise. L’habitude avait imprimé un élan. Il aurait fallu arrêter le mouvement
ou l’infléchir. Mais point du tout, on a continué machinalement en ligne
droite. La victime d’une farce d’atelier est donc dans une situation analogue à
celle du coureur qui tombe. Elle est comique pour la même raison. Ce qu’il y
a de risible dans un cas comme dans l’autre, c’est une certaine raideur de
mécanique là où l’on voudrait trouver la souplesse attentive et la vivante
flexibilité d’une personne. Il y a entre les deux cas cette seule différence que
le premier s’est produit de lui-même, tandis que le second a été obtenu artifi-
ciellement. Le passant, tout à l’heure, ne faisait qu’observer ; ici le mauvais
plaisant expérimente.
Toutefois, dans les deux cas, c’est une circonstance extérieure qui a
déterminé l’effet. Le comique est donc accidentel ; il reste, pour ainsi dire, à la
surface de la personne. Comment pénétrera-t-il à l’intérieur ? Il faudra que la
raideur mécanique n’ait plus besoin, pour se révéler, d’un obstacle placé
devant elle par le hasard des circonstances ou par la malice de l’homme. Il
faudra qu’elle tire de son propre fonds, par une opération naturelle, l’occasion
sans cesse renouvelée de se manifester extérieurement. Imaginons donc un
esprit qui soit toujours à ce qu’il vient de faire, jamais à ce qu’il fait, comme
une mélodie qui retarderait sur son accompagnement. Imaginons une certaine
inélasticité native des sens et de l’intelligence, qui fasse que l’on continue de
voir ce qui n’est plus, d’entendre ce qui ne résonne plus, de dire ce qui ne
convient plus, enfin de s’adapter à une situation passée et imaginaire quand on
devrait se modeler sur la réalité présente. Le comique s’installera cette fois
dans la personne même : c’est la personne qui lui fournira tout, matière et
forme, cause et occasion. Est-il étonnant que le distrait (car tel est le person-
nage que nous venons de décrire) ait tenté généralement la verve des auteurs
comiques ? Quand La Bruyère rencontra ce caractère sur son chemin, il
comprit, en l’analysant, qu’il tenait une recette pour la fabrication en gros des
effets amusants. Il en abusa. Il fit de Ménalque la plus longue et la plus minu-
tieuse des descriptions, revenant, insistant, s’appesantissant outre mesure. La
facilité du sujet le retenait. Avec la distraction, en effet, on n’est peut-être pas
à la source même du comique, mais on est sûrement dans un certain courant
de faits et d’idées qui vient tout droit de la source. On est sur une des grandes
pentes naturelles du rire.
Mais l’effet de la distraction peut se renforcer à son tour. Il y a une loi
générale dont nous venons de trouver une première application et que nous
formulerons ainsi : quand un certain effet comique dérive d’une certaine
cause, l’effet nous paraît d’autant plus comique que nous jugeons plus natu-
relle la cause. Nous rions déjà de la distraction qu’on nous présente comme un
simple fait. Plus risible sera la distraction que nous aurons vue naître et
grandir sous nos yeux, dont nous connaîtrons l’origine et dont nous pourrons
reconstituer l’histoire. Supposons donc, pour prendre un exemple précis,
qu’un personnage ait fait des romans d’amour ou de chevalerie sa lecture
habituelle. Attiré, fasciné par ses héros, il détache vers eux, petit à petit, sa
pensée et sa volonté. Le voici qui circule parmi nous à la manière d’un
somnambule. Ses actions sont des distractions. Seulement, toutes ces distrac-
tions se rattachent à une cause connue et positive. Ce ne sont plus, purement et
simplement, des absences ; elles s’expliquent par la présence du personnage
dans un milieu bien défini, quoique imaginaire. Sans doute une chute est
toujours une chute, mais autre chose est de se laisser choir dans un puits parce
qu’on regardait n’importe où ailleurs, autre chose y tomber parce qu’on visait
une étoile. C’est bien une étoile que Don Quichotte contemplait. Quelle
profondeur de comique que celle du romanesque et de l’esprit de chimère ! Et
pourtant, si l’on rétablit l’idée de distraction qui doit servir d’intermédiaire, on
voit ce comique très profond se relier au comique le plus superficiel. Oui, ces
esprits chimériques, ces exaltés, ces fous si étrangement raisonnables nous
font rire en touchant les mêmes cordes en nous, en actionnant le même méca-
nisme intérieur, que la victime d’une farce d’atelier ou le passant qui glisse
dans la rue. Ce sont bien, eux aussi, des coureurs qui tombent et des naïfs
qu’on mystifie, coureurs d’idéal qui trébuchent sur les réalités, rêveurs
candides que guette malicieusement la vie. Mais ce sont surtout de grands
distraits, avec cette supériorité sur les autres que leur distraction est systéma-
tique, organisée autour d’une idée centrale, — que leurs mésaventures aussi
sont bien liées, liées par l’inexorable logique que la réalité applique à corriger
le rêve, — et qu’ils provoquent ainsi autour d’eux, par des effets capables de
s’additionner toujours les uns aux autres, un rire indéfiniment grandissant."