dimanche 29 mai 2022

Par les villages: Nous revivrons

 Je vous recommande d'aller voir ce spectacle inspiré de Platonov de Tchekhov que j'avais pu voir dans sa tournée d'automne. Le travail de Nathalie Béasse qui vient du monde des arts plastiques est un travail singulier et inventif qui pour ma part me bouleverse.


librement inspiré de L’Homme des bois d’Anton Tchekhov
mise en scène Nathalie Béasse

avec la collaboration de Sabrina Delarue, Étienne Fague et Clément Goupille
musique Julien Parsy
régie générale Loïs Bonte

avec Mehmet Bozkurt, Julie Grelet, Théo Salemkour

Inspirée par L’Homme des bois d’Anton Tchekhov, la metteuse en scène Nathalie Béasse choisit d’adapter avec trois acteurs la plus optimiste des pièces du dramaturge russe.
Dans une maison, deux hommes et une femme jouent. Ils dansent, ils rient, ils pleurent, ils nous racontent une histoire qui s’entremêle à une autre. Celle de Khrouchtchev, surnommé le Sauvage, qui replante les arbres au fur et à mesure que les hommes les arrachent.

L’Homme des bois, de Tchekhov, fait référence à la Russie légendaire. Nous revivrons est une partition libre autour de ce texte, où l’important se joue entre les lignes, dans la poésie des corps et des silences. Nathalie Béasse, metteuse en scène, chorégraphe et plasticienne, invente une forme itinérante où chaque élément – objet, lumière, son, espace, musique – devient partenaire de jeu pour les acteurs.

la presse en parle

« La metteuse en scène procède par fragments, textuels et visuels, qui parlent tous davantage aux tripes qu’à l’esprit, ouvrent des portes invisibles vers des galaxies infinies et augmentent le substrat tchekhovien d’une magnifique fougue évocatrice. » Sceneweb

« La poésie émanant de la pièce est entière, omniprésente, elle se love dans un regard, dans un murmure, dans des fragments d’instants suspendus. » DNA/L’Alsace

réservations auprès des communes

JE 16.06. À 20H — MUNSTER  — Espace culturel Saint-Grégoire — 03 89 77 50 32

SA 18.06 À 20H — ART’RHENA — 03 89 71 94 31

ME 22.06 À 20H30 — TURCKHEIM — Espace Rive Droite — 03 89 27 61 62

SA 25.06 À 19H — AUBURE — Salle du Préau — 03 89 78 14 58

la liste des principales Ecoles de théâtre en France

 

Écoles publiques : des concours très sélectifs
Les douze écoles supérieures d’art dramatique publiques – gratuites et de haut niveau,
et donc très sélectives – délivrent le DNSPC, diplôme national supérieur professionnel de comédien, reconnu au niveau licence. Pour les intégrer, il faut justifier d’une pratique théâtrale antérieure, dans un cours privé ou un conservatoire. 

Conservatoire national supérieur d’art dramatique, Paris 9e. cnsad.fr
Ensatt, Lyon. ensatt.fr
École du TNB (Théâtre national de Bretagne), Rennes. t-n-b.fr
École de la Comédie de Saint-Étienne, Saint-Étienne. lacomedie.fr
Esad de Paris, Paris 1er. esadparis.fr
École supérieure de comédiens par l’alternance, Asnières-sur-Seine. studio-asnieres.com
ÉSTBA (École du Théâtre de Bordeaux Aquitaine), Bordeaux. tnba.org
L’Académie de l’Union, Saint-Priest-Taurion. academietheatrelimoges.com/fr
École du Nord, Lille. theatredunord.fr/lecole
École du TNS (Théâtre national de Strasbourg), Strasbourg. tns.fr
Eracm, Cannes et Marseille. eracm.fr
Ensad de Montpellier, Montpellier. ensad-montpellier.fr
 
Quelques écoles privées
Cours Florent,
Paris 19e, Bordeaux, Montpellier, Bruxelles. 4 900 €/an. coursflorent.fr
L’École du jeu, Paris 18e, 50 places. 5 900 €/an. ecoledujeu.com
Cours Acquaviva, Paris 18e. 390 €/mois. coursacquaviva.fr
La Cité Théâtre, Caen, 12 places. Gratuit (financement régional). lacitetheatre.org
École Auvray-Nauroy, Paris 20e. 4 700 €/an. lecoleauvraynauroy.fr
Cours Simon, Paris 11e. 390 €/mois. cours-simon.com

samedi 28 mai 2022

Portes ouvertes aux jardins enchantants de Herlissheim le week-end prochain

 Depuis plusieurs années je soutiens Gabriel et Léa qui sont artistes et maraîchers, elle costumière, lui musicien.

Le week-end prochain, ils ouvrent leurs jardins à tous.

Demandez le programme: ici

Vous y retrouverez le photographe Didier Pallagès qui est le papa de Léa.

 

Les femmes chez Molière, ni précieuses, ni ridicules LUMNI

 Une série de video qui peut nourrir la réflexion pour le GO: LEs femmes chez Molière ni précieuses ni ridicules

vendredi 27 mai 2022

Hamlet à l'impératif d'Olivier Py

 Entre essai et pièces de théâtre, en dix épisodes mêlant comédiens professionnels et amateurs, Olivier Py a proposé au festival d'Avignon 2021 son Hamlet à l'impératif  nous faisant réfléchir aux mystère de la pièce Hamlet et à ses commentaires par de nombreux philosophes.

Vous pouvez voir les épisodes en captation ici sur Thèâtre Contemporain

Vous en verrez une version avec un peu moins d'acteurs en salle.

mardi 24 mai 2022

dimanche 15 mai 2022

Présentations de travaux: le mois de mai théâtre

 

- 18 mai: Théâtre-Forum par les secondes de l'option facultative du lycée Camille See, un peu plus tôt que prévu, le mercredi 18 mai à 19h à la Comédie de Colmar, jauge limitée dans la petite salle. Réservation toujours au 0389243178
Venez découvrir cette forme particulière de théâtre qui donne à réfléchir et permet au public d'agir! Le projet a été mené avec la comédienne Nancy Guyon qui travaille avec nous depuis plusieurs années.
 
- Vendredi 20 mai: Rouge d'Emmanuel Darley sous la conduite de Bruno Journée et Fred Demma à 19h à la Comédie de Colmar.

- Lundi 23 mai: Molière Baroque  des Terminales, projet mené avec Sandrien Pires toujours à 19h à la Comédie de Colmar.

Venez tous soutenir les acteurs et actrices du lycée Camille See.

Les Indes Galantes de Philippe Rameau Mise enscène Baptiste Cogitore: musique baroque et danses urbaines

 Arte propose un film des Indes Galantes à regarder pour votre culture générale et si vous faites une question de GO sur les rapports entre théâtre et danse.

"Les Indes galantes" de Jean-Philippe RameauMoments choisis

Mis en scène par Clément Cogitore, l’opéra-ballet de Jean-Philippe Rameau conjugue danses urbaines et grandes voix lyriques. Un spectacle événement. 

La déesse Hébé invite la jeunesse à aller jouir de l’amour au-delà des mers. Mais Bellone, divinité de la guerre, les détourne des plaisirs du vaste monde en leur promettant de glorieux combats. Faite prisonnière par des pirates, la belle Émilie est devenue l’esclave du pacha Osman, dont elle repousse les avances, son cœur restant fidèle à Valère, son bien-aimé. Quand une tempête rejette providentiellement Valère aux pieds d’Émilie sur le rivage, les deux amants s’étreignent. Osman surprend leurs retrouvailles… 

Essence et esprit 
Pour son très festif opéra-ballet, Rameau imagine une œuvre de plus de trois heures, dans laquelle chaque pièce (un prologue et quatre entrées) vise à produire de l’enchantement, et où les parties dansées tiennent un rôle essentiel. S’emparant de cette œuvre phare du siècle des Lumières, Clément Cogitore (Braguino) conjugue les danses urbaines et le baroque en réunissant de vibrantes chorégraphies de krump, hip-hop, voguing, popping…, réglées par Bintou Dembélé, et un plateau de grandes voix lyriques, notamment celles de Sabine Devieilhe, Julie Fuchs, Jodie Devos et Florian Sempey. Cette version télévisuelle ne se veut pas un best of des meilleurs airs ou danses du spectacle présenté à l’Opéra Bastille en 2019, mais un film resserré afin d’en transmettre l’essence. Un parti pris que Rameau n’aurait sans doute pas désavoué, Les Indes galantes n’ayant été, depuis sa création, en 1735, que très rarement présenté sur scène dans son intégralité

vendredi 13 mai 2022

Conduite du début pour Molière Baroque du lundi 23 mai

 - lumières de service sur le plateau, je fais mon discours d'introduction. la troupe s'installe , répète les textes et danses, s'échauffe, occupe le plateau, discussion sur l'année écoulée, dernière répétition avant l'entrée public ( retravailler le contenu de la discussion: covid, changement de date d'examen, pas assez de temps pour travailler tout le programme.)

Emma : on n'est pas prêt, pas prêt...

Julia: Basile est en retard, mais qu'est-ce qu'il fait? Je ne vais pas pouvoir jouer mes scènes.

Salomé: Il faut commencer, faisons ce qui était prévu: Le désordre est le délice de l'imagination. introduire l'hommage à Molière mais gardez la surprise, ne pas trop en dire.

Noir: Ligne en fond de scène avec les bougies Led s'avancer en chantant Joyeux Anniversaire tout doucement dans les différentes langues définies, vraiment intime puis plus timbré au fur et à mesure: arrivés à la face encore deux fois la chanson, puis on pose les bougies leds et le Joyeux anniversaire de Romane bien tonique.Basile déboule en nage, croit que la petite cérémonie est pour lui: "formidable d'avoir pensé à moi: discussion sur la confusion anniversaire Molière/ anniversaire Basile 400ans, mort/vivant.

la dispute s'apaise avec la chanson d'Elise : Quittons quittons...

Mise en place de la première scène de L'Amour médecin et on enchaîne Ecole des Femmes puis tartuffe.

entre les scènes  chorégraphies et pendant les chorégraphies,  tranquillement faire les mises nécessaires pour la suite.

Nous reprendrons la trame lundi 16 mai en espérant que chacun ait noté ce qu'il a à faire.

Dernier spectacle salle Europe: Gens du pays mardi 17 mai 20h ( N'hésitez pas si vous êtes libres.)

Dernier spectacle de la saison à la Salle de spectacles Europe mardi 17 mai à 20h, "Gens du pays" , par la Cie Les Méridiens.avec Blanche du Conservatoire.
Résumé :
Nous sommes aujourd’hui, en France.
Un jeune garçon, Martin Martin, a été arrêté par la police pour s’être aventuré aux frontières de la ville. Il n’a pas de papiers sur lui, aucun moyen de prouver son identité. Alors on le retient au poste pour la nuit.
La policière qui l’interroge, met en doute ses propos: comment peut-il s’appeler Martin Martin alors que son apparence semble trahir une autre identité?
À son collège, son professeur de français propose un nouveau projet pour la classe. «Un grand projet» qui veut mettre à l’honneur la diversité. Il questionne les élèves sur leurs racines, leurs pays d’origine, celui de leurs familles.
Martin Martin, pris entre deux feux, entre deux injonctions à se nommer se trouve harcelé par des questions qui n’appellent qu’une seule et simple réponse que les adultes semblent incapables d’entendre:
«Je m’appelle Martin Martin, je viens d’ici, je vis ici, je suis ici. Je suis français.»
Création de la Cie Les Méridiens.
Durée : 1h15
Tout public dès 14 ans.

 

lundi 9 mai 2022

Comparaisons de différentes versions de la scène du "ruban" (L'Ecole des Femmes) cours du jeudi 24 mars

Dans la fameuse scène « du ruban », Arnolphe retrouve Agnès totalement transformée : que s’est-il réellement passé pendant son absence ? Le suspens insupportable pour le vieux barbon offre une palette de jeux à la comédienne qui oriente fortement le sens de la relation entre les deux personnages. Dans ces cinq mises en scène très différentes tant par leurs types de jeu que par leurs choix scénographiques, on peut se questionner sur l’interprétation du rôle d’Agnès : est-elle naïve et innocente ? Ou bien cruelle et manipulatrice ? Compatissante et raisonneuse ? Comment la comédienne opère-t-elle un renversement du rapport de force ?

 Puisque la scène se déroule dans le jardin, il sera également intéressant de comparer le traitement scénographique de cet espace : comment souligne-t-il l’enfermement dans lequel Arnolphe maintient Agnès ? S’agit-il d’un enfermement moral ou physique ? La représentation du lieu peut être analysée selon une visée réaliste ou métaphorique.

La mise en scène de Raymond Rouleau, réalisée spécifiquement pour la télévision, se déploie dans un décor figuratif où la stylisation est visible. Bernard Blier ( Arnolphe) fait ses apartés directement à la caméra, ce qui confère au téléspectateur la place du confident.( Julia avait signalé un jeu très cinématographie.)

 Créée en public, la mise en scène d’Éric Vigner est une recréation de la mise en scène, filmée sans spectateur. On remarquera le montage très serré qui alterne les plans d’Arnolphe et d’Agnès, produisant tout à la fois suspens et effet comique.

 Les trois autres mises en scène (Bezace, Lassalle et Braunschweig) sont filmées en public. Celle de Didier Bezace a été filmée pendant une représentation dans la cour d’honneur du palais des Papes, à Avignon : d’abord invisible, la présence des spectateurs se fait ensuite entendre dans les rires, à la fin de la scène. Il en est de même dans la captation réalisée pour la mise en scène de Jacques Lassalle où les manifestations du public accompagnent la révélation d’Agnès et soulignent son innocence ou sa malice. La mise en scène de Stéphane Braunschweig est également filmée dans les conditions théâtrales en présence du public que l’on ne voit pas mais qu’on entend réagir, notamment par les rires.

La scénographie

Observez et décrivez l’espace dans chaque scénographie. 

Dans quel type d’espace chaque mise en scène inscrit-elle l’échange entre les deux personnages ? La scène qui commence par cette remarque d’Arnolphe : « La promenade est belle » indique donc un lieu devant la maison. 

Quels éléments permettent d’établir qu’il s’agit d’un espace extérieur ?

L’interprétation scénographique de l’extérieur varie fortement d’une mise en scène à l’autre.
– Dans le film de Raymond Rouleau, cet espace est très soigneusement reconstitué, dans les moindres détails d’une cour de ferme : les personnages se déplacent à l’intérieur d’une enceinte où l’abondance de fleurs qui bordent les murs fait office de nature. Cet espace, entre deux bâtiments grisâtres et rustiques, est bordé d’un mur massif et presque carcéral.
– Dans la mise en scène de Didier Bezace, l’espace  est au contraire très minimal : un simple praticable fait de planches, sur lequel se trouve une valise. L’extérieur est signifié par la représentation elle-même, en plein air, un soir d’été. L’absence d’éléments de décor souligne tout à la fois le dénuement dans lequel vit Agnès et le caractère austère d’Arnolphe. Le carré, qui se détache de l’obscurité, induit par ailleurs une forme d’enfermement.
– Dans la mise en scène d’Éric Vigner, la scénographie se déploie de manière complexe, dans un assemblage de cadres grillagés montés en espaliers. L’ensemble se déplace par élément, comme un jeu de construction, laissant deviner en fond de scène l’intérieur d’une maison. Ce dispositif évoque le jeu (les « cages à poules »), mais aussi la possibilité d’un piège ou d’un enfermement.
– La mise en scène de Jacques Lassalle expose un jardin potager stylisé où les découpes de bois renvoient très explicitement au décor de théâtre. Agnès joue derrière les salades,choux, comme si elle jardinait, et se relève, avec un jeu de mains qui laisse imaginer qu’elle tient une coccinelle qui ne va pas tarder à s’envoler.
– La mise en scène de Stéphane Braunschweig place l’action dans une salle de sport, Agnès et Arnolphe font du « spinning » ou vélo fixe, derrière eux des parois vitrées renvoient leur reflet multiplié et on aperçoit un lit en arrière-plan. La scène du jardin est donc déplacée dans un intérieur où le déplacement est mimé et est censé produire un certain effort. On constate cependant que seule Agnès pédale, et de manière plutôt décontractée (elle ne fait pas cette activité pour des raisons sportives). Quant à Arnolphe, totalement accaparé par le récit d’Agnès (cela lui demande bien plus d’efforts que l’activité sportive), il délaisse complètement son propre vélo.

Les accessoires

Repérez les accessoires qui servent d’appuis de jeu à l’actrice. Qu’est-ce que cela dit du personnage d’Agnès ? Comment l’actrice en joue-t-elle ? Comment Arnolphe réagit-il ?

L’actrice Agnès Sourdillon (Didier Bezace) est occupée à coudre, son attention est donc captée par son ouvrage. Le vieil homme regarde en coin l’ingénuité de la jeune fille, sans qu’il y ait réciprocité. 

Dans la mise en scène de Raymond Rouleau, la jeunesse d’Agnès est soulignée par le fait qu’elle tient une poupée de chiffon, qu’elle remet d’ailleurs entre les mains d’Arnolphe pour faire son récit des avancées d’Horace.
Le vélo est un accessoire de jeu important dans la mise en scène de Stéphane Braunschweig, il est notamment un support de jeu pour Suzanne Aubert, qui traduit par le mouvement corporel le plaisir physique qu’Agnès a pu ressentir.

Façon de dire:

Observer la diction des acteurs et les choix d’interprétation dans la manière dont le dialogue met en jeu l’adresse et l’écoute des deux interlocuteurs.


– Dans la version télévisée (Raymond Rouleau), le jeu naturaliste et psychologique tend à effacer l’écriture en alexandrins pour lui donner la fluidité du langage parlé ; la théâtralité est gommée au profit du naturel.
– Dans la cour d’honneur du palais des Papes, au contraire (Didier Bezace), les acteurs projettent leur voix et leur articulation est très marquée. Cette diction accentue la théâtralité des intentions : Agnès (Agnès Sourdillon) apparaît d’autant plus cruelle qu’elle exprime sa joie avec une totale insouciance. Le visage de Pierre Arditi, très expressif, laisse voir une douleur qu’il ne cherche pas à cacher, prenant très ouvertement le public à témoin.
– La version d’Éric Vigner met en avant la diction du vers et la douceur des relations entre les deux personnages. Cette interprétation est la seule des quatre versions où le couple s’adresse l’un à l’autre dans l’écoute, le respect et la tendresse : Agnès (Johanna Korthals Altes) est bienveillante vis-à-vis de son tuteur, qu’elle ne cherche pas du tout à faire souffrir, tandis qu’Arnolphe (Bruno Raffaelli) intériorise une douleur qui relève autant de la surprise que de la compréhension.
– La version de Jacques Lassalle, au contraire, souligne l’incommunicabilité entre les deux personnages : Agnès (Caroline Piette) ne regarde jamais Arnolphe quand elle lui fait part de ses sentiments, tandis qu’Arnolphe (François Perrier) semble suspendu à ses moindres paroles. Cette asymétrie souligne et accentue la solitude des personnages et l’abîme qui les sépare.
– L’asymétrie de la relation est renforcée par le fait qu’Arnolphe tourne autour d’Agnès, tandis que celle-ci est fixée par le vélo. Elle apparaît donc comme un objet d’observation. Et le spectateur accompagne le point de vue d’Arnolphe qui est soumis à une sorte de torture morale. La naïveté d’Agnès est renforcée par le fait qu’elle se prête avec obéissance à l’exercice physique que son tuteur semble lui commander. Il apparaît alors telle une figure d’entraîneur dont les arrières-pensées contrastent avec la bonne volonté de la jeune fille.

L’espace et la scénographie

Dégagez les oppositions entre les différents espaces proposés.
Comment l’idée d’enfermement peut-elle transparaître à travers ces choix ?

Réfléchir à l’enjeu dramaturgique de l’espace, et notamment à la manière dont la scénographie matérialise l’enfermement de la jeune fille. 

Certaines mises en scène prennent le parti du jardin : une reconstitution qui joue du détail et de l’« effet de réel » dans la mise en scène de Raymond Rouleau, ou un jardin stylisé dans celui de Jacques Lassalle. Ce choix met en avant la clôture ; le jardin est petit et enclôt. 

D’autres mises en scène opèrent un déplacement du site. C’est le cas de celle de Stéphane Braunschweig qui choisit une salle de sport. Le vitrage induit la double idée de transparence et de cage en verre. Agnès est enfermée mais elle est également épiée ; cela la renvoie au statut d’animal de laboratoire. L’exercice physique peut également aller dans ce sens. 

Pour Didier Bezace et Éric Vigner, l’espace est métaphorique, c’est-à-dire qu’il relève davantage d’un univers mental (il est la représentation d’une pensée, d’une idée). On opposera dans ce parti pris la simplicité et la rusticité des matériaux utilisés pour le praticable (Bezace) à la construction complexe des espaliers (Vigner) qui évoquent aussi bien les jeux enfantins (les « cages à poules ») que les barreaux d’une cage, voire d’un labyrinthe.

On constatera que ces deux traitements scénographiques opposés se rejoignent dans l’idée d’enfermement : l’un est illustratif, tandis que l’autre choisit la suggestion

Comment le physique des personnages détermine-t-il leur relation ?

Les cinq distributions jouent de manière différente de l’écart d’âge nécessaire dramaturgiquement.

– Isabelle Adjani a l’âge du rôle et sa fraîcheur sert la scène face à un Bernard Blier que la perruque grise et l’embonpoint vieillissent. L’autorité de ce dernier, presque paternelle, rend compréhensible l’écart qui les sépare, et Agnès ne peut envisager qu’Arnolphe désire l’épouser.


– Agnès Sourdillon paraît plus âgée, mais elle joue sur un aspect rustique qui souligne son caractère buté. Face à elle, Pierre Arditi, avec ses cheveux blancs ébouriffés, semble instable ; ses tics de visage le font basculer du côté de la folie.


– François Perrier et Caroline Piette pourraient être père et fille ; Agnès a une douceur et une obéissance qui renvoie Arnolphe à une figure d’autorité paternelle, attentif et en retrait.


– Suzanne Aubert a tout à fait le physique d’une jeune première, jeune fille pure et innocente, tandis que Claude Duparfait incarne un Arnolphe encore jeune et séduisant mais visiblement d’une autre génération. Aussi peut-on comprendre les deux points de vue des personnages concomitamment.


– Éric Vigner, en revanche, n’a visiblement pas travaillé sur l’écart : physiquement, Johanna Korthals Altes et Bruno Raffaelli ne sont pas vraiment transformés et leur couple n’est pas aussi incongru qu’il paraît dans la pièce de Molière. La familiarité dans leurs gestes l’un vers l’autre vient d’ailleurs corroborer l’éventualité d’une union.

Ces cinq visions du personnage d’Arnolphe en pygmalion débordé par le premier écart (involontaire) de sa créature témoignent d’un parti pris d’interprétation du personnage dans l’œuvre.

  Texte d’Éric Vigner qui montre un point de vue original et particulier sur la pièce notamment dans le parti pris sur Arnolphe: ( Emma avait senti "juste")
« Le théâtre de Molière allie l’intelligence, le génie de la construction et le sentiment humain. C’est l’histoire même d’Arnolphe, et c’est pourquoi il se retire à la fin de la pièce. Arnolphe est un humaniste du XVIIIe siècle, il place l’homme au centre du monde. Il finira même par donner Agnès, sa propre création, au jeune Horace. Après avoir fait d’Agnès une femme, il fera d’Horace un homme. Il va au bout de son projet, et se retire. […] Et Horace ne connaît pas le sentiment. Peut-être sait-il mieux raconter les histoires, mais il n’a pas de cœur. Horace est déjà un Don Juan. Agnès sera bientôt Célimène. L’École des femmes est une matrice, elle contient toute l’œuvre de Molière. »

Source : www.ericvigner.com/archives/spectacles/922/ecole-femmes.html

Arnolphe accueille le récit d’Agnès avec une certaine compréhension. Sa douceur et la manière dont il l’accompagne en fait davantage un compagnon qu’une figure autoritaire. Il lui a visiblement appris à s’exprimer clairement (la diction très précise de l’actrice va dans ce sens) et, en humaniste, il accepte cette parole. IL semble aussi comme gagné par la sensualité caressante de la jeune femme.

 L’interprétation de Bernard Blier ( dans le téléfilm) est clairement une figure paternelle, sûre de sa raison, qui infantilise Agnès et entend bien qu’elle reste sotte.

 Celle de Claude Duparfait dans la mise en scène de Braunschweig, renvoie à la tradition comique ; il prend à partie le public en s’avançant de manière ridicule : nous sommes témoin de sa souffrance tandis que la jeune fille continue son exercice physique sur le vélo, dont elle semble tirer un certain plaisir.

 L’interprétation de Pierre Arditi dans la mise en scène de Bezace est plus inquiétante, car il ne semble plus avoir de prise sur sa créature et s’enferme en lui-même. La douleur sourde qu’il manifeste enclenche une forme de délabrement mental du personnage. 

De même, la résignation sourde et douloureuse d’Olivier Perrier chez Lassalle permet de comprendre le retrait d’Arnolphe à la fin de la pièce. Ces deux interprétations permettent de rapprocher Arnolphe de la figure tragique du misanthrope se réfugiant dans son désert.

 

 Photos de différentes scénographies à étudier

 

L'Ecole des femmes , mise en scène de Didier Bezace ( Analyse)

 A lire pour le cours de jeudi 3 mars 2022

Interview du metteur en scène Didier Bezace


Didier Bezace au travail: extrait du making off 

 

L'Ecole des femmes , une pièce sous surveillance 


Le surveillant surveillé : la mise en scène de Didier Bezace, Avignon 2001

La lecture que propose Didier Bezace dans sa mise en scène de L’École des femmes, d’apparence plutôt classique, est en réalité novatrice. Toute la pièce est repensée à partir de l’hypothèse qu’Horace, Agnès et Chrysalde agissent de conserve pour faire échouer le projet de mariage d’Arnolphe et rendre à la raison ce personnage égaré dans sa folie. Un second niveau de surveillance surplombe donc celui d’Arnolphe : les scènes se jouent sous le regard des personnages qui épient l’évolution de la situation au cours des confrontations successives de chacun avec Arnolphe. Cela se traduit scéniquement par la présence des personnages qui observent, depuis de hautes fenêtres de la façade de la Cour d’honneur, les scènes où leurs complices tentent d’infléchir la ligne de conduite d’Arnolphe. Cette relecture de la pièce en modifie la portée. Agnès, en effet, n’est plus perçue, comme elle a pu l’être dans de nombreuses mises en scène, comme une jeune fille naïve qui se libère peu à peu. Comme le dit Horace :


« Il le faut avouer, l’amour est un grand maître :
Ce qu’on ne fut jamais, il nous enseigne à l’être ;
Et souvent de nos mœurs l’absolu changement
Devient par ses leçons l’ouvrage d’un moment. »
(v. 900 et sq.)

Au début de la pièce, elle est donc déjà assez mûre pour tenir tête à son tuteur. Dans la mise en scène, ses regards, ses sourires ou ses hésitations la révèlent consciente de la cruauté des aveux qu’elle lui fait. Elle n’est pas dupe des menaces d’Arnolphe et se rit de ses propos sur l’enfer. Cette lucidité accrue du personnage suppose également une part plus importante de courage et de risque : elle parle en toute connaissance de cause. Dans les situations les plus délicates, quand son tuteur marque le point, par exemple à la fin de la scène des maximes sur le mariage, elle lance un regard furtif vers la fenêtre d’où Horace a suivi l’entretien. Elle hausse les épaules en signe d’impuissance avant de disparaître par la trappe. Elle est prise au piège, mais on sait comme elle qu’Horace veille, qu’il n’abandonnera pas le combat.

Là où cette interprétation de la pièce agit le plus, c’est dans les scènes entre Horace et Arnolphe, puisque le quiproquo s’inverse : Horace n’est plus la dupe d’Arnolphe, il devient celui qui le manipule, Arnolphe ne se doutant pas que le jeune homme sait à qui il se confie. « Horace se sert du quiproquo pour énoncer le vrai devant celui qui ne veut pas entendre », explique Didier Bezace. Les nombreux détails de ses succès amoureux distillés par Horace à l’oreille de son rival sont comme des piques qu’il lui enfonce dans le cœur, non sans cruauté, un traitement de choc pour le tirer de son aveuglement utopique et destructeur. Cette plate-forme carrée, étroite et suspendue, exposée au regard de toute part, tient un peu du ring de boxe. Il s’agit bien de trouver les points faibles de l’autre et de le faire plier. Enfin, la présence des acteurs-spectateurs aux fenêtres élevées de la façade du Palais des Papes qui fait face au public nous renvoie à notre propre situation de spectateurs, témoins des abus d’Arnolphe, de son égarement et des tentatives des jeunes gens pour se libérer de sa tyrannie. Grâce à ce dispositif, la modération de Chrysalde, qui accepte les hommes et les femmes tels qu’ils sont, prend un relief beaucoup plus conséquent, plus visible et qui nous inclut. Arnolphe flotte à la dérive sur ce radeau de fortune qu’il s’est construit entre terre et ciel. Nous sommes, nous, dans un autre monde, aussi éloigné de la caricature diabolique que donne Arnolphe de la ville que de celle utopique du monde dont il rêve.

DM ( suite 3) le personnage de Dorine (Laura)

 

Je suis metteuse en scène et je travaille sur le personnage de Dorine dans Le Tartuffe. Après avoir fait son analyse dramaturgique, je clarifierai mes choix sur comment je la vois en scène.

            Dans Le Tartuffe, le personnage de Dorine est celui de la suivante de la fille d’Orgon, Mariane. Elle est très importante dans la pièce puisqu’elle est le soutient de Mariane, elle est comme une seconde mère. Par une réplique de Tartuffe, nous apprenons qu’elle a une forte poitrine : « Couvrez ce sein que je ne saurais voir ». ( Pas forcément, ça veut juste dire que conformément à la mode du temps elle porte un décolleté qui laisse voir sa poitrine et que tartuffe ne peut résister à la tentation. Ça peut vouloir dire qu’elle est encore avenante, pas trop vieille donc, d’ailleurs une suivante n’est pas forcément tellement plus âgée que sa maîtresse. C’est justement un point à discuter.)

On peut deviner qu’elle est dans une bonne condition et qu’elle n’a pas de soucis physiques, comme un mal de dos ou autre, car elle fait partie de la famille. C’est un personnage fort avec beaucoup d’énergie. Elle est franche, ne détourne pas ses mots et est prête à affronter son maître pour soutenir Mariane. Elle lui dit ses vérités, ironique et sans gêne. ( Prouve-le en renvoyant au texte. Utilise par exemple le portrait que fait d’elle Mme Pernelle.)

Mais elle a aussi un grand cœur qui l’attache à sa maîtresse et lui est d’une grande aide. Avec son fort caractère et sa langue bien pendue, Dorine n’hésite pas à dire ce qu’elle pense sur le mariage entre Mariane et Tartuffe et dit à Orgon : « Mais de ce mariage on m’a dit la nouvelle, / Et j’ai traité cela en pure bagatelle. ». Et sur cette lancée elle continue de se moquer avec : « je ne vous en crois point », « une plaisante histoire », « Chanson ! » et « Il raille ». Elle ose même menacer cet homme du fait que sa femme ( non sa fille !) va commettre un adultère si elle épouse Tartuffe car elle ne sera pas heureuse avec lui.( Thème de la mal mariée) Elle n’est pas trompée par l’escroc que représente Tartuffe et ne veut pas laisser sa jeune maîtresse entre ses mains. Elle fait même du théâtre dans le théâtre avec Mariane en faisant des louanges sur Tartuffe pour faire comprendre à Mariane qu’elle ne doit pas s’écraser devant son père et lui dire qu’elle ne veut pas de Tartuffe mais Valère.( Précise dans quelle scène.) Elle est donc très maligne et malicieuse. Elle est une guerrière à sa façon et lutte contre le désastre qui s’abat sur la maison et tente de faire retrouver la raison à la famille. Elle est donc un personnage très important qui en plus d’être la raison fait rire par son franc parlé et son ironie. ( oui ,A développer. Le comique du Tartuffe lui doit beaucoup.)

            Pour jouer le rôle de Dorine, j’aimerais une comédienne avec des rondeurs, pas trop grande et surtout avec une prestance impressionnante. Je veux une comédienne qui caractérise le côté « maman ours » par ses formes et sa taille mais qui pourtant en impose avec une posture droite et non courbée comme on pourrait s’y attendre pour une servante. En effet, on a dit qu’elle fait parti de la famille, donc on peut partir du principe qu’elle est bien ancrée au sein de la maison et n’est pas mal menée. D’ailleurs, si elle l’était, elle ne ferait pas l’insolente avec son maître. Donc elle n’est pas un personnage qui s’écrase ni physiquement ni mentalement et cela doit se sentir dans sa posture. Mais attention, elle n’est pas une bourgeoise, donc elle ne doit pas avoir d’effet de supériorité dans sa droiture.( Est-ce le bon mot ? Posture ?) Elle est normale. Etant donné que je ne veux pas faire une mise en scène avec un décor et des costumes typiques du XVIIème siècle, je ne vais pas faire porter à la comédienne une longue robe grise avec un bonnet blanc. Mais elle aura tout de même un uniforme de travail. Etant donné qu’elle est comme une seconde mère pour Mariane, je vais lui faire arborer une robe noire qui descend jusqu’à en-dessous des genoux, serré à la taille, avec un tablier blanc et des chaussures noires.( Et la question de la poitrine ?) Elle doit être très observatrice. Quand elle ne parle pas, elle regarde attentivement les autres, écoute, est toujours en mouvement en faisant des réactions à ce qui est dit. Par exemple à la scène 4 de l’acte II, quand Dorine ne parle plus pour laisser les amants se disputer, elle peut jouer sur le fait que ces deux-là l’ont oubliée et elle peut regarder comme un match de tennis. Elle joue aussi l’exaspération quand les amants commencent à dire n’importe quoi, notamment quand Valère dit « Je vous conseille, moi, de prendre cet époux ». En outre elle doit être un personnage expressif, toujours en action, qui réagit et se place avec les personnages qu’elle soutient. Elle a différents rapports avec les membres de la famille. Elle est la suivante et une sorte de mère pour Mariane. Elle est très attachée à elle et est bienveillante à son égard. Mais elle ne doit pas se départir de sa sévérité quand Mariane ne parle pas à son père et accepte à contre cœur sa décision de la faire épouser  Tartuffe. Donc dans son regard et sa gestuelle il y a une douceur à l’égard de sa maîtresse mais quand celle-ci tient des propos comme « me donner la mort si l’on me violente », Dorine doit être plus ferme avec elle et intransigeante. Dans ses rapports avec Orgon, Dorine semble être professionnelle. Elle le respecte puisqu’il est son maître et lui parle avec respect. Paradoxalement, elle lui dit le fond de sa pensée, ce qui peut créer un effet comique. Elle est très ironique tout en faisant mine qu’elle n’est pas dans la moquerie. Et elle s’amuse de la colère de son maître surtout à la scène 1 de l’acte II où à la fin elle échappe au courroux d’Orgon tout en continuant à le provoquer : « Je me moquerais fort de prendre un tel époux ».Elle est aussi celle qui voit claire dans le jeu de Tartuffe, elle est méfiante, aux aguets de la moindre erreur de sa part pour pouvoir le piéger. Quand celui-ci lui demande de couvrir sa poitrine à la scène 2 de l’acte III, elle le provoque, fait ressortir sa poitrine et s’amuse de la situation. Elle se moque de lui, notamment quand elle dit « toute votre peau ne me tenterait pas ». Donc en général Dorine est un membre de la famille qui respecte chacun de ses membres. Mais elle n’hésite pas à prendre parti pour l’un d’entre eux et à dire le fond de sa pensée à un autre. Elle ne dit et ne fait jamais rien d’inutile, il y a toujours une intention et la comédienne doit en avoir conscience, ses mots ont du poids. Et même si la comédienne n’est pas Molière, j’aime les visages expressifs donc j’aimerais que les spectateurs puissent voir un maximum d’informations rien qu’en regardant Dorine, je mets donc quelques croquis comme exemple :

            Pour ce qui est des déplacements, Dorine ne fait pas de déplacement« inutile », elle a toujours une intention que ce soit pour faire avancer le jeu des autres personnages ou pour montrer son ressenti dans une situation. Prenons une scène en particulier et ça sera la scène 2 de l’acte II.


La croix rouge est Mariane, la noire c’est Orgon et pour le brun il s’agit de Dorine avec ses déplacements qui sont chiffrés. Le premier c’est son entrée sur le plateau et elle se met en bouclier devant Mariane. Progressivement qu’elle parle et montre avec ironie son désaccord avec Orgon, elle l’approche (2ème et 3ème déplacements). Elle revient sur Mariane quand elle « Oui, c’est lui qui le dit : et cette vanité, … » (déplacement 4). Elle va plus à l’avant avec le 5ème déplacement quand elle dit « Enfin avec le Ciel … ». Elle s’éloigne totalement d’Orgon quand soi-disant elle se parle à elle-même (6ème déplacement). Et enfin le 7ème et dernier déplacement qui va vers le lointain est au moment où elle dit « Je me moquerais fort de prendre un tel époux » et c’est pour éviter la gifle d’Orgon. Ainsi la scène se finirait avec Dorine au lointain, Orgon qui part et Mariane, plus au centre côté cours.

Voilà comment je verrais Dorine dans une mise en scène du Tartuffe.

( C’est développé, précis et fondé sur le texte donc plutôt convaincant et en plus il ya du graphisme ! Je crois juste que tu ne parles pas de la voix et de la diction. 10/12)

 

DM ( suite 2)

 Proposition de Basile pour la première partie:

L’acte II du Tartuffe est peut-être celui de Dorine. C’est une partie de la pièce qui est rajoutée par Molière après la première version de 1664 (5 ans avant la version définitive). L’ajout de cet acte est l’union précédemment approuvée par Orgon de Marianne et Valère. Et la rupture de ce serment sera la cause principale défendue par Dorine dans la pièce, elle semble à la fois attachée à la parole tenue et à sa jeune maîtresse à qui ce nouveau mariage est imposé. Sur quatre scènes dans l’acte, Dorine apparaît dans les trois dernières, seule Marianne y est plus présente qu’elle, mais moins bavarde. Le premier acte est avant tout un acte d’exposition, on y est éclairés sur la nature de la famille des personnages et de l’emprise que Tartuffe a pris dans ce foyer. Dans la scène 5 du premier acte par exemple, son beau-frère Cléante tente de rappeler à Orgon son engagement auprès de Valère, qui sera le point central de l’acte II : « […] Vous savez que Valère/Pour être votre gendre a parole de vous ? ». En dépit de ce rappel, Orgon fuit la conversation et dans la première scène de l’acte II, il annonce à Marianne qu’il souhaite la faire épouser Tartuffe. Dans la scène suivante il découvre que Dorine écoutait la discussion, cachée, alors même qu’il s’était assuré que personne ne pouvait les entendre. Elle rappelle que Orgon n’a aucun argument pour défendre ce mariage, que Tartuffe est un homme d’église, déplaisant pour sa fille, désargenté et qu’il l’avait promise à Valère. Orgon fait la sourde oreille et, comme à plusieurs reprises dans la pièce, clôt la discussion en quittant les lieux sans avoir entendu raison. Dans la troisième scène Dorine s’applique à réconforter Marianne dans son désespoir. Dans la quatrième scène, Valère apparaît après avoir appris la nouvelle du futur mariage de Marianne et Tartuffe, assez en colère car on lui a repris ce qu’on lui avait promis. Marianne étant désespérée et perdue, Valère surpris et contrarié, la discussion est pleine de mécompréhension et tourne au vinaigre. La réplique pivot de la dispute est sûrement la réponse de Marianne « Je ne sais. » à la question de Valère « Et quel est le dessein où votre âme s’arrête/Madame ? » alors que Valère attendait que sa fiancée lui reconfirme son envie de l’épouser malgré la situation. La tâche de Dorine dans cette scène est de réconcilier les amants.

La mise en scène de Stéphane Braunschweig du Tartuffe en 2008 prends le parti d’une interprétation très moderne du texte, tant dans les costumes et la scénographie que dans le traitement du texte que font les acteurs. Leur diction n’accentue pas particulièrement les vers et les rimes sont jouées comme si elles étaient le parler de tous les jours.

Dans l’extrait de la scène étudiée, on observe d’abord Dorine qui rassure Marianne tant qu’elle le peut. Ensuite lorsque la dispute entre les deux amants s’envenime, elle se retire un peu tout en restant visible du public, en se plaçant dans l’embrasure de la porte au lointain côté jardin. Lorsque l’extrait étudié se finit, elle y est encore. Dans cette première partie de scène, le choix du traitement du personnage de Dorine en fait une figure quasi-maternelle pour Marianne. Bien que dans le reste de la pièce, la voix, la présence et la carrure d’ Annie Mercier soient mises à profit pour en faire un personnage haut en couleurs, impertinent et très critique des non-sens de ses maîtres, elle ne joue dans ce passage que la tendresse et l’observation inquiète. En effet vis à vis de Marianne, elle se montre d’abord très réconfortante, d’un point de vue psychologique et dramaturgique, on peut souligner que Orgon est veuf et que Dorine n’est pas que servante mais bien suivante de Marianne, ce sont deux raisons pour lui donner un rôle privilégié vis à vis de la jeune femme, comme une sorte de mère de substitution. Le premier geste qu’on la voit faire est très significatif, elle embrasse le front de la jeune fille en lui tenant la tête à deux main, c’est un acte tendre et protecteur et on comprend qu’elle ne souhaite que le bien de Marianne, surtout si on double cette vision des paroles qui promettent une solution aux problèmes de l’amoureuse trahie par son père : « […] Ne vous tourmentez point/On peut adroitement empêcher […] ». L’attitude plus passive et bienveillante de Dorine par rapport au reste de la pièce s’observe aussi dans sa posture pendant la dispute des amants : si elle n’était que la servante insolente qu’elle semble être la plupart du temps, elle aurait sûrement laissé les jeunes à leurs problèmes sans se fatiguer à entendre leurs provocations. Mais pourtant elle reste au lointain, changeant souvent de positions et d’appuis, comme si elle était gênée ou concernée. Elle est très réactive et expressive du visage face aux piques de Valère et Marianne, la captation permet, par des gros plans, aux spectateurs d’observer des micro-expressions sûrement indétectables depuis la salle qui montrent bien le dépit et l’embêtement que Dorine a de voir ses protégés en désaccord. On a donc une Dorine qui met de côté son caractère bien trempé un temps pour compatir aux malheurs de sa jeune maîtresse et de son fiancé.

Le fiancé en question est très remonté, dès son arrivée, il est très ironique puisqu’il a amené du champagne et 3 coupes, comme pour trinquer au mariage de Marianne et Tartuffe, ces objets, en plus d’un certain gag visuel, accentuent l’amertume cachée dans l’ironie de la réplique : « On vient de débiter, Madame, une nouvelle/Que je ne savais pas, et qui sans doute est belle. ». Il est évident que le fiancé ne trouve pas que c’est une belle nouvelle que cette union. Dans la même lignée que cette froide ironie, il adresse la plupart de ses répliques de manière très frontale à Marianne, avec un débit assez élevé. Au-delà de ne jouer que la colère, Thomas Condemine est entièrement tendu vers Julie Lesgages : il ne la quitte que très peu des yeux, même sans être très proche, on sent et remarque l’attention qu’il lui porte. La bascule de l’ironie cinglante au vrai énervement s’opère à la réplique de Marianne : « Je ne sais » comme vu plus haut. Il y a une rupture qui se marque d’abord par le temps de réaction de Valère, puis des répliques formant une gradation de la froideur jusqu’au cri. Les répliques sont très accentuées lorsqu’elles sont ironiques et très rapides et sèches lorsqu’elles ne le sont pas. Le premier départ de Valère est très clairement sur le ton de la colère, mais lorsqu’il revient, on sent une légère variation dans le ton, notamment grâce au temps d’hésitation avant « Ne m’appelez vous pas ? ». Le changement de ton doublé de la réplique interrogative montre un Valère avant tout très inquiet, dont la colère l’a submergé. Même si la colère est très importante, elle reste avant tout fondée sur la peur de perdre Agnès ( Mariane ( lapsus intéressant.), car comme nous le montrerait la fin de la scène si nous avions à l’étudier, les jeunes gens sont avant tout éperdument amoureux.

Marianne quant à elle, est dans ce passage tout à son désespoir, après les baisers de Dorine qui se veulent réconfortants, elle reste dans une forme de léthargie en accueillant Valère, par un jeu volontairement peu expressif, Julie Lesgages donne à voir une Marianne abattue qui ne sait même plus répondre à son amant qu’elle l’aime, alors même que c’est le cas puisque son mariage avec Tartuffe la frustre en partie puisqu’il contredit celui avec Valère. Elle se prend de plein fouet l’ironie et la sécheresse de Valère, déçu, et on observe à plusieurs moments un mouvement de recul qui témoigne de la violence des paroles reçues et de leur effet dévastateur sur Marianne. La conséquence de cette violence est d’accentuer la confusion de la jeune femme, ce qui aura pour effet le fameux « je ne sais » qui ne fera qu’envenimer la situation. Elle a plusieurs regards publics (qui peuvent être simplement interprétés comme de regards dans le  vague puisqu’il n’y a pas d’adresse au dit public) dans lesquels on peut observer une forme de béatitude ( Le mot n’est pas très bien choisi car il connote un état de bonheur, ne voulais-tu pas dire hébétude ?)), avec un corps et un visage proches de l’immobilité, le tout souligné par les gros plans de la captation qui s’enchaînent avec des plans larges qui nous laissent voir au mieux la disposition des acteurs dans l’espace : tantôt ramassés dans le coin lointain-jardin autour de Dorine dans un noyau de tension, tantôt éclatés dans l’espace après le recul d’Agnès( Mariane) meurtrie. Elle aussi témoigne de son amour au milieu de cette querelle puisqu’après le premier départ de Valère, bien qu’elle ne le rappelle pas comme il l’aurait souhaité, elle le laisse aller à son désespoir et colle sa tête au mur, entre ses bras qui sont vers le haut, comme pour pleurer ou se cogner la tête de frustration de ne pas pouvoir mieux communiquer.

 

Dans l’ensemble, cette mise en scène montre un passage de grande tension, appuyé tant dans la direction vocale des acteurs que dans le déplacement, avec une discussion bipolarisée entre Valère et Marianne qui laisse à Dorine le rôle du témoin exaspéré au pire de l’nage ( Orage ?), gardien au mieux (puisqu’elle proposera par la suite un plan pour ramener les fiancés à leur mariage en débit des lubies du père Orgon).

Bien que le dispositif soit complexe, cette scène mise sur la simplicité, une seule porte est utilisée et le fauteuil est le seul meuble touché. La justesse et l’intérêt viennent de la maîtrise des acteurs qui savent nuancer suffisamment leur jeu pour savoir se disputer et jouer la colère sans pour autant s’enfermer dans un ton, peuvent marquer des temps de pause et des ruptures qui témoignent de la richesse de la scène et des pensées et angoisses qui les traversent quant à l’avenir de leur couple.

Tout cela est fort intéressant. 7 /8