Affichage des articles dont le libellé est Projet Dominique Blanc ( 2023- 2024). Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Projet Dominique Blanc ( 2023- 2024). Afficher tous les articles

samedi 1 juin 2024

Terminales pour vos carnets de bord : conduite de Chantier, nous faite par sandrine pour le 21 mai

 

Conduite Chantier Nous 21 mai 2024


QUOI,QUI?
Entrée du public/ Tutti
Fin d'entrée du public
Entrée acteurs au lointain éclats de rire
Mise chaussures face
Silence déplacement des chaises en ligne milieu de scène
ITW écouteurs
attente de dosOndine
attente sur une chaise de dos/ face
Fin regards sur Ondine
Tout le monde se met à jardin / cour
Ishaana Debout posture clope de dos
début du parcours Oh on s'ennuie mon petit Nicolas... Ishaana
entrée en Dominique Blanc/ Parcours jusqu'à Coup de foudre pour l’écriture de Marguerite Duras. ». (p 20 – 21)

Fiorelle
entrée en Dominique Blanc/ Ton parcours jusqu'à un ami de quelqu'un ici?Matéo
Parcours début jusqu'à Robert L.Flavie
La Douleur / il demandait à faire cacaFiorelle
Biographie Dominique BlancMathilda / passage Marionnette
Mise chaussures face cour PaulinePauline
interactions rires jardin et courtutti
Ondine /jusqu'à ma ville à moiOndine
Mila avec acteurs lointainMila
discussion l'importance de François F / école échecTutti
Le douteMatéo
éclater en sanglots
Play back Enfer StromaeTutti
Banc de poisson c'est quoi le jeu d'acteurPauline
Banc de poisson :Celle qui m'a donné envie d'aller vers le théâtreMila, Oriane , Flavie, Mathilda
Banc de poisson/ le jeu d'acteur c'estFiorelle
Cri "J'aime" Tutti
Itw seul / lien J_Y Ruf HippolyteMatéo
Scène PhèdreMatéo
ITW seul.e / ChéreauFlavie
Scènes Phèdre / Flavie
Eclats Phèdre / canon ensemble ou tuilerMathilda

Fiorelle/ Ishaana

Pauline
C'est quoi le jeu de l'acteur..tout ce que je veux c'est jouerOndine , Pauline et tutti
installation Mila Oriane
Scènes Mariage de FigaroMila Oriane

Ondine Ishaana
Eclats mariage / reprise scènes en même tempsMathilda Flavie
Et toi tu pense continuer le théâtre?tutti ligne assis debout au sol
citation Samuel BeckettTutti
aller retour sans fin samule beckette




samedi 25 mai 2024

Dominique Blanc à Cannes pour le film d'animation La Plus précieuse des marchandises ( article Telerama)

Bande annonce


ç a commence comme un conte, de ceux qui nourrissent le terreau de nos mémoires enfantines. « Il était une fois une pauvre bûcheronne », au plus profond de la forêt, au plus froid de l’hiver. Cette forêt, cependant, n’appartient pas à quelque royaume enchanté. Cet hiver ne frissonne pas hors du temps. Ce conte d’animation à nul autre pareil trace peu à peu les contours de l’humanité, le meilleur au cœur du pire.

Nous sommes en Pologne, en pleine Seconde Guerre mondiale. Sans cesse, de longs trains sombres et aveugles déchirent le drap immaculé de la neige, emportant leur cargaison d’âmes innocentes vers l’enfer. La bûcheronne ignore tout de cette industrie de la mort. Elle se contente de prier les « dieux du train » pour qu’ils lui jettent une aumône au passage. Une « marchandise », n’importe laquelle. Et voilà qu’ils l’exaucent. Un geste désespéré, un père prêt à tout pour sauver au moins l’un de ses bébés, et c’est un petit paquet rose et vagissant qui tombe d’un wagon plombé.

« Il était une fois dans un grand bois une pauvre bûcheronne et un pauvre bûcheron », comme l’écrit Jean-Claude Grumberg dans le roman éponyme dont ce dessin animé est la splendide et délicate adaptation, narrée par Jean-Louis Trintignant, dans son dernier rôle (sans oublier les voix de Dominique Blanc, Grégory Gadebois, Denis Podalydès…). Histoire d’un couple à son tour déterminé à sauver cette enfant minuscule, envers et contre tout, y compris leurs propres préjugés antisémites. Les juifs ont-ils un cœur ? Oui, constate le bûcheron stupéfait, qui soudain le sent battre partout, dans le bois de sa cognée comme dans le tronc des arbres, le temps d’une scène d’une poésie poignante.

Ça commence comme un conte, et le réalisateur Michel Hazanavicius, dont c’est le premier film d’animation (il en a lui-même dessiné les personnages, traits rugueux et sensibles, d’une extraordinaire expressivité), s’attarde dans le cycle des saisons, une nature qui déploie ses merveilles au mépris de l’horreur nazie toute proche. Inspirée des premiers Disney et de la peinture du XIXᵉ siècle (des nuages hautains à la Courbet, des roux terriens empruntés aux artistes russes), rehaussée de traits noirs et de contrastes élégants, à la manière d’Henri Rivière, cet illustrateur de la Belle Époque féru d’estampes japonaises, la forêt reste, un temps, le refuge de la tendresse humaine, l’abri précaire des justes (dont un magnifique personnage d’ermite bourru, gueule cassée de la guerre mondiale précédente).

L’animation pour esquisser l’indicible

Mais voilà qu’inexorablement la fable glisse vers la réalité du pire, vient se heurter aux bords tranchants de l’Histoire. Dans les regards soupçonneux des autres bûcherons, d’abord, puis dans le sillage d’un petit oiseau, qui décolle des verdoyantes nuées de la canopée pour s’en aller survoler l’ordre noir et géométrique des camps de la mort. Le dessin se durcit, écorché et cassant. Il impose une violence presque monochrome, de la figure fantomatique du père de la petite fille rescapée jusqu’à un chaos de visages hurlants, comme une prolifération terrifiante du fameux Cri d’Edvard Munch, cet éclat d’absolu désespoir.

Le filtre de l’animation, sa puissance d’évocation, du plus figuratif au plus abstrait, permet d’esquisser l’indicible, d’ouvrir un accès inédit à l’horreur absolue, là où toutes les représentations en prises de vues réelles risquent toujours l’obscénité. Michel Hazanavicius et son équipe d’artistes inspirés du 3.0 Studio – studio d’animation français basé à Angoulême et Paris – évitent tous les écueils prévisibles, toutes les fausses notes et les indécences, parce qu’ils ne cessent de chercher la lumière au cœur des ténèbres, jusqu’à la conclusion bouleversante, à la fois difficile et dédiée à la vie. Un chef-d’œuvre profondément juste.

 s La Plus Précieuse des marchandises, film d’animation de Michel Hazanavicius (France, 1h21). Avec les voix de Jean-Louis Trintignant, Dominique Blanc, Grégory Gadebois, Denis Podalydès. En compétition. Sortie le 20 novembre.

vendredi 24 mai 2024

Documentaire sur les répétitions de la Phèdre de Chéreau

 Je découvre ce documentaire exceptionnelle sur les répétitions de Phèdre avec Chéreau: répétitions avec Chéreau A regarder absolument ( 58 mn) Chéreau livre aussi son analyse dramaturgique de la pièce.

jeudi 23 mai 2024

Le jeu de l'acteur: recherche

 L'acteur flottant, invisible, rusé:

L’acteur flottant est un concept crée par Yoshi Oida, qui se considère lui-même comme un acteur flottant, tout d’abord c’est un homme qui a beaucoup voyagé, il est allé en Europe, Afrique, Proche-Orient, et leurs cultures,ont transformé la vision très orientale de Yoshi Oida.

Donc le principe de l’acteur flottant est le fait de mixer ses différentes cultures, expériences et vécus, qui font de nous la personne que nous sommes, afin de jouer et de s’adapter aux différents jeux. Donc à force d’avoir voyagé, il a acquis beaucoup de savoirs et cela a perfectionné son jeu d’acteur.

On dit : « Yoshi est un voyageur de l’espace et du temps, Il relie le passé à l'avenir, l'Est à l'Ouest. Son esprit flotte librement, mais en tant qu'artiste, il est ici et maintenant. » Yoshi a joué uniquement à l’extérieur de son pays natal. Il mélange donc sa culture avec les autres pour jouer.

Selon lui, un acteur flottant doit pouvoir jouer d'un point de vue qui lui est extérieur; il doit apprendre à voir et à consolider son interprétation à partir du point de vue du public et de la perception qui lui est propre. D’où pour lui l’importance d’observer les différents types de personne et leur culture. Selon lui, la concentration de l'acteur est aussi une question primordiale, puisqu'elle se pose dès le début de la formation de tout acteur. La concentration exige un entraînement comme le corps mais une fois parfaitement maîtrisée, on doit apprendre à relâcher sa concentration pour la libérer, car si on se concentre trop, on perd en naturel et en liberté. Et également on doit lire un texte sans avoir aucune idée préconçue. Il n'est pas suffisant, bien entendu, de dire les mots à haute voix. Il faut se faire réceptifs aux sensations que ces mots évoquent à l'intérieur de soi, savoir les écouter et les reconnaître. Il faut donc que les mots nous inspirent quelque chose et ressentir les mots à partir de notre vécu et nos propres aventures.

 Buttard Ondine

L’acteur pneumatique : Novarina. 

Site de valère Novarina 

Flavie

Cette notion est décrite dans la « lettre aux acteurs » de Valère Novarina en 1974 pendant les répétitions de « l’atelier volant ». Il l’écrit lorsque sa première pièce va être mis en scène.

L’acteur pneumatique : aller au bout du souffle lorsqu’on dit la finale : qu’on ait plus d’air lorsqu’on arrive au point de la phrase. Il ne faut pas découper ses phrases en soulignant les mots importants, mais se lancer dans cette expiration comme si on tombait en chute libre. Pour « souligner » les mots importants il faut que ça parte du ventre pour accentuer ce mot, comme si on crachait notre texte, qu’on le vomissait.

Lorsqu’on joue il faut que tout notre corps soit impliqué : le jeu est fatiguant, tout est sollicité, ce n’est pas une balade de santé. La parole active le corps, il réagit à ce qui est dit, mais ce n’est pas un travail intelligent.

Il faut trouver la rythmique, les mouvements du texte, en mettant du corps dans le travail

Extrait de Lettre aux acteurs

J’écris par les oreilles. Pour les acteurs pneumatiques.

Les points, dans les vieux manuscrits arabes, sont marqués par des soleils respiratoires… Respirez, poumonez ! Poumoner, ça veut pas dire déplacer de l’air, gueuler, se gonfler, mais au contraire avoir une véritable économie respiratoire, user tout l’air qu’on prend, tout l’dépenser avant d’en r’prendre, aller au bout du souffle, jusqu’à la constriction de l’asphyxie finale du point, du point de la phrase, du poing qu’on a au côté après la course.

Bouche, anus. Sphincter. Muscles ronds fermant not’ tube. L’ouverture et la fermeture de la parole.

Attaquer net (des dents, des lèvres, de la bouche musclée) et finir net (air coupé). Arrêter net. Mâcher et manger le texte. Le spectateur aveugle doit entendre croquer et déglutir, se demander ce que ça mange, là-bas, sur ce plateau. Qu’est-ce qu’ils mangent ? Ils se mangent ? Mâcher ou avaler. Mastication, succion, déglutition. Des bouts de texte doivent être mordus, attaqués méchamment par les mangeuses (lèvres, dents) ; d’autres morceaux doivent être vite gobés, déglutis, engloutis, aspirés, avalés. Mange, gobe, mange, mâche, poumone sec, mâche, mastique, cannibale ! Aie, aie !… Beaucoup du texte doit être lancé d’un souffle, sans reprendre son souffle, en l’usant tout. Tout dépenser. Pas garder ces p’tites réserves, pas avoir peur de s’essouffler. Semble que c’est comme ça qu’on trouve le rythme, les différentes respirations, en se lançant en chute libre. Pas tout couper, tout découper en tranches intelligentes, en tranches intelligibles – comme le veut la diction habituelle française d’aujourd’hui où le travail de l’acteur consiste à découper son texte en salami, à souligner certains mots, les charger d’intentions, à refaire en somme l’exercice de segmentation de la parole qu’on apprend à l’école : phrase découpée en sujet-verbe-complément d’objet, le jeu consistant à chercher le mot important, à souligner un membre de phrase, pour bien montrer qu’on est un bon élève intelligent – alors que, alors que, alors que, la parole forme plutôt quelque chose comme un tube d’air, une colonne à échappée irrégulière, à spasmes, à vanne, à flots coupés, à fuite, à pression.

 

Le comédien désincarné de Louis Jouvet ( Fiorelle)



Le Comédien désincarné est un recueil de textes de Louis Jouvet écrits entre 1939 et 19501 sur l'art du comédien et publié à titre posthume en 2009.

Louis Jouvet : Immense acteur des années 1950, professeur au conservatoir.e

Le recueil se divise en 6 chapitres :

Vocation

Comportement de l'Acteur

Divagations du comédien ; Le personnage de théâtre

Texte et jeu

Intuition

Les actes du théâtre

Article à lire 

 Souligner le paradoxe de la formule  et la distinction acteur/comédien

Intro :

-       Le théâtre est fait pour apprendre aux gens qu’il y a autre chose que ce qui se passe autour d’eux, que ce qu’ils croient voir ou entendre, qu’il y a un envers à ce qu’ils croient l’endroit des choses et des êtres, pour les révéler à eux-mêmes, pour leur faire deviner qu’ils ont un esprit et une âme immortels.

-       Être en disponibilité pour la poésie, l’esprit, , la métaphysique.

Vocation :

-       Se dramatiser soi-même et ce qui nous entoure : comprendre pourquoi on aime, pourquoi on souffre… remonter aux causes

-       Sortir de soi-même, se distancer de sa personne> Diderot : Le paradoxe du comédien (ex ne pas faire comme Dominique Blanc dans Phèdre)

Comportement de l’acteur :

-       Nécessité d’être dans le paraitre

-       Souci de l’attitude et de l’impression d’autrui par rapport à notre jeu

-       Fuite constante : on se réfugie dans n’importe qui d’autre que soi (devenir cabotin : vouloir se mettre en valeur lui-même)

 Toujours changer, toujours être obligé par une nouvelle opération, désintégration ou amplification de soi, dépossession, repossession

Mise à l’épreuve du comédien: accepter les doutes, les ratages, les remarques...

 Le théâtre est l’imitation d’un geste divin

Le rôle doit servir à se désincarner de soi-même. Ce n’est que dans cet état qu’on atteint au personnage. Le comédien ( théâtre) atteint au personnage par un effort de sensibilité et de spiritualité// l’acteur (cinéma), lui, ne se désincarne jamais.

Se sentir le personnage pour l’acteur est exceptionnel et grave de conséquences

Désincarnation : Sans chair

Comédien désincarné : Le comédien n’est pas le personnage, il ne faut pas s’identifier à lui.

Monsieur Jouvet émission de radio

 

lundi 20 mai 2024

Portrait de Dominique Blanc dans le journal Le Point

 

Portrait

Dominique Blanc : « Je suis un peu un lonesome cow-boy ! »

Son enfance lyonnaise, ses débuts difficiles, son trac qu’elle dompte par la méditation… La très discrète actrice de la Comédie française se confie au Point.

Par Violaine de Montclos

Publié le 19/05/2024 à 09h00

Sur la scène de la Comédie française, son beau visage, rond et pâle comme une lune, semble absorber toute la lumière et sa voix porte loin, claire et toujours audible, même depuis le deuxième balcon : elle a une présence folle. Tandis que, hors du théâtre, à la terrasse de café où elle a donné rendez-vous, il faut chercher longtemps avant de repérer sa silhouette poids plume, ses traits à peine fardés, son sourire amusé qui paraît dire « Oubliez-moi, faites comme si je n'étais pas là ».

Savent-ils, ces Parisiens qui se chauffent au soleil des jardins du Palais Royal, que cette discrète dame attablée près d'eux est, sans le moindre doute, l'une de nos plus grandes comédiennes ? Qu'elle a remporté quatre César, quatre Molière, que son jeu est, depuis un an, comme le fut jadis celui de Michel Bouquet, au programme du baccalauréat pour les élèves de terminale en spécialité théâtre ? Une sorte de Bac blanc… « Lorsqu'on me l'a annoncé, j'ai cru à une blague », dit-elle dans un éclat de rire.

Ce soir, elle joue dans Les Démons, une adaptation, par le metteur en scène flamand Guy Cassiers, du texte de Dostoïevski, d'où le rendez-vous donné tout près de la Comédie française. Il est 14 heures, le rideau se lève à 20 h 30, elle a comme tous les jours fait son italienne* ce matin, chez elle, et gagnera le théâtre aussitôt que notre conversation sera achevée. « Les jours de représentation, j'arrive toujours tôt, j'ai besoin d'être sur place, avec la troupe ou dans ma loge, pour conjurer toutes les catastrophes qui pourraient m'arriver au-dehors et pour me mettre, longtemps avant qu'elle ne commence, dans l'atmosphère de la pièce. »

Son personnage, Varvara Petrovna, apparaît dès la première scène. Cassiers lui a demandé d'être drôle et elle s'exécute à la perfection, incarnant cette aristocrate, propriétaire terrienne soucieuse de préserver sa fortune, avec un aplomb et un naturel qui arrachent, immédiatement, de grands rires au public. « Je l'aime beaucoup, cette Varvara ! dit-elle. Elle est solide, sûre d'elle, c'est une femme puissante comme il en existe tant chez Dostoïevski. Et puis, elle est d'une génération qui ne veut rien lâcher, elle incarne une forme de conservatisme que je connais un peu. »

Ado maladivement timide

À Lyon, où elle a grandi dans une famille catholique et plutôt classique, quatrième d'une fratrie de cinq enfants dont elle est la seule, très tôt, à caresser des rêves de saltimbanque, elle a longtemps cherché sa place. « Nous habitions près de l'église Saint-Bonaventure, mais la boulangerie était dans la rue des putes, je passais devant toutes ces dames en allant chercher le pain et je les trouvais vraiment très jolies sans avoir, évidemment, la moindre idée de ce qu'elles faisaient, se souvient-elle. J'aime beaucoup revenir à Lyon aujourd'hui, cette ville est sublime, mais dans ma jeunesse y régnait quelque chose de noir, de pesant, lié sans doute à mon adolescence difficile. »

Malheureuse et maladivement timide, elle tente de se soigner, dès le collège, en prenant des cours d'art dramatique, et la révélation est fulgurante. « C'était une terre de promesse qui s'ouvrait à moi, j'étais tellement plus heureuse sur la scène que dans la vie. »

Sauf qu'on ne fait pas les clowns dans la famille Blanc, on a un vrai métier, médecin, ingénieur ou autre, certainement pas actrice, et lorsque la jeune femme décide de plaquer ses études d'architecture pour tenter sa chance à Paris, son père, sans trembler, lui coupe les vivres. « Je crois qu'il m'a rendu un immense service, analyse-t-elle, cinquante ans plus tard. Il a voulu tester mon désir d'être comédienne. »

Pour survivre, se payer, notamment, ses leçons au cours Florent, elle fait tous les métiers : modèle pour peintre, promeneuse de chien, vendeuse d'assurances vie, habilleuse dans les défilés de mode, femme de ménage… Au cours Florent, dont le maître des lieux, François Florent, lui confie les clés, elle passe chaque matin l'aspirateur et nettoie les toilettes à la turque avant de se mêler aux autres élèves.

Malmenée par Francis Huster

Une leçon d'humilité qui explique peut-être en partie, aujourd'hui encore, la modestie du personnage. D'ailleurs, tout, au début, est difficile, elle échoue trois ans de suite au conservatoire et à la Rue Blanche, puis opte pour la classe libre du cours Florent où elle est malmenée par l'un de ses professeurs, Francis Huster. Humiliations, brimades qu'elle a depuis élégamment pardonnées : « Nous nous sommes parfois croisés aux Molières, c'est de l'histoire ancienne », sourit-elle.

on dimanche idéal. Au travail ! La musique militaire avec laquelle sa mère réveillait ses frères aux aurores, la messe, les longs après-midi mornes des dimanches lyonnais de son enfance lui ont laissé un souvenir détestable. Depuis, elle n'est jamais plus heureuse que lorsqu'elle doit gagner le théâtre pour jouer en matinée.

Par bonheur, un autre professeur, Pierre Romans, la soutient sans faillir et, un soir de 1980, alors que Romans met en scène ses élèves de la classe libre, Patrice Chéreau, dans le public, est aimanté par la présence et l'émouvant visage de Dominique Blanc. Il demande à la rencontrer quelques jours plus tard : les portes s'entrouvrent enfin pour elle, elle s'y engouffre, joue dès lors sans discontinuer au théâtre, Ibsen, Duras, Racine, Schnitzler, Genet, au cinéma pour Louis Malle, Claude Chabrol, Amos Gitaï, Claude Sautet, Patrice Chéreau, bien sûr…

Le « désir » mis à l'épreuve par le père n'a pas faibli malgré les vents contraires. Ce père qui, jamais, n'est venu la voir au théâtre, et qui a dédaigné la plupart de ses films. « Sa fille sur scène ou sur grand écran, c'était peut-être trop fort, trop impressionnant pour lui, c'était un homme d'une grande sensibilité », l'excuse-t-elle, décidément hermétique à la rancune.

Elle a travaillé avec les plus grands réalisateurs et metteurs en scène de son temps, mais s'est aussi toujours tenue loin des mirages de cette drôle de vie, loin des cours d'admirateurs, surtout, notamment celle, délétère, qui gravitait autour de Patrice Chéreau. « Je suis un peu un lonesome cow-boy », s'amuse-t-elle. Elle est tout de même entrée à 60 ans à la Comédie française, appelée par son ami Éric Ruf qui fut jadis son Hippolyte dans Phèdre, et y découvre depuis huit ans cette étrange vie de troupe qui l'épuise et la comble. « Notre époque est tellement individualiste, je suis heureuse d'être dans le collectif. Attention, la troupe, c'est pas les bisounours, on s'engueule, c'est fort, mais l'atmosphère est bonne. »

On la questionne sur ses amitiés, au cinéma ou au théâtre, elle réfléchit longtemps. « De ma génération, ç'aurait pu être Huppert ou Adjani, mais nous n'avons que des rapports cordiaux, rien de plus. Je suis proche de la comédienne Dominique Reymond, et avec Michel Piccoli, nous avons été très amis, au point que nos deux familles étaient vraiment liées. Il avait tellement d'humour… Il m'envoyait des fax pleins de drôlerie, j'en avais gardé des quantités et puis, un jour, sans doute lors d'un déménagement, je les ai tous jetés et je le regrette tant. »

Depuis qu'elle est au programme du Bac, elle sillonne les lycées de France, savoure ces face-à-face avec les jeunes élèves, et découvre qu'elle a maintenant, à 68 ans, pas mal de choses à transmettre. « Ils me posent toujours des questions pertinentes, la franchise et la maturité de ces gamins me sidèrent. » Elle les renvoie parfois au formidable petit texte, « Chantiers, je »(Actes Sud.), qu'elle a publié en août dernier, un texte qui raconte ses débuts si difficiles et qui lui ressemble, direct, drôle, pas narcissique pour un sou. « J'ai aimé l'exercice, dit-elle. Cela m'a donné envie de recommencer, en cinquante ans de carrière, j'ai quand même accumulé pas mal de choses à raconter. » Avis aux éditeurs…

Une allusion à son « homme lumière »

On lui propose une cigarette, elle a arrêté il y a deux jours. « Je vais jouer dans une comédie musicale, je préserve ma voix », soupire-t-elle. D'ordinaire, elle fume des Vogue, uniquement en cas de montée de stress, c'est une traqueuse, une inquiète qui a découvert il y a une dizaine d'années la méditation et la pratique au quotidien, dans la rue, dans le train qui l'amène de sa grande banlieue jusqu'à la Comédie française, dans sa loge, bien sûr, avant le spectacle.

« Je me suis formée très sérieusement auprès d'une professeure de médecine, le docteur Corinne Isnard Bagnis, et maintenant, où que je sois, je suis capable de m'évader, de me concentrer en dix minutes. » Elle dit surtout que, dans sa vie parfois chaotique de comédienne, sa famille – elle a deux filles et un beau-fils – et le couple toujours amoureux qu'elle forme depuis près de 40 ans avec le même homme, lui ont épargné bien des souffrances. Il est éclairagiste. Ils se sont mariés, sur le tard, au Cirque d'hiver : un truc joyeux, des enfants partout, pas une personnalité du métier présente. Elle sourit en l'évoquant. Se garde bien de donner son nom. Mais elle lui a dédié son livre : « À l'homme lumière »…

* répétition d'une pièce sans mettre le ton, d'une voix neutre.

 

jeudi 16 mai 2024

Sur le thème de la lutte contre le Sida, regardez 120 battements à la minute ( Terminales)

 Le formidable film 120 battements à la minute est en replay sur France TV jusqu'au 22 mai seulement:

https://www.france.tv/france-3/120-battements-par-minute/2091223-120-battements-par-minute.html

mercredi 15 mai 2024

Les Anges dans Angels in America

 

« TRÈS STEVEN SPIELBERG ! » (Millénium, III, 7) : LA FORCE DES APPARITIONS

Faire apparaître des anges sur scène est une grande gageure pour la mise en scène : comment techniquement faire apparaître les figures ailées, comment faire de la scène le théâtre d’une vision impossible,à laquelle pourtant le spectateur puisse croire aussi bien que le personnage ?

« Très Steven Spielberg ! » est la remarque de Prior à la première apparition de l’ange. En consultant la filmographie du réalisateur avant 1991, émettre des hypothèses sur ce qui peut déclencher un tel commentaire.

Spielberg est particulièrement connu pour des films comme Rencontres du troisième type, E.T. ou encore La Guerre des mondes, films qui comportent des apparitions diverses

Tony Kushner, notes de l’auteur

"Les hallucinations et moments de magie doivent être délibérément traités comme des instants d’illusion et de merveilleux théâtral et tant mieux si les procédés sont visibles, sans pour autant nuire au merveilleux"

Angels in America, M, III, 7

Prior :

(Près du lit, les lampes clignotent frénétiquement, tandis que le lit avance et recule. Il se produit un craquement accompagné de gémissements provenant du plafond au-dessus du lit, suivi d’une pluie de plâtre.) OH ! OH ! Il va se passer quelque chose, j’ai peur, ça ne me plaît pas du tout, quelque chose approche et je… (Une musique triomphale éclate, annonciatrice d’un événement. La lumière devient impitoyablement pâle, froide, d’un bleu d’acier, puis se change en une couleur estivale, chaude, dorée, puis en un jaune verdâtre intense et enfin dans un pourpre impérial, spectaculaire. Prior dans un souffle, terrorisé.) Dieu tout-puissant… Très Steven Spielberg !

Un son comparable à celui d’une météorite tombant verticalement comme une pierre, venu de très très loin de la Terre, vient heurter la chambre à une vitesse incroyable ; la lumière semble reculer à mesure devant cette arrivée ; lorsque la chambre devient obscure, on entend un crash terrifiant comme si quelque chose d’énorme venait heurter la Terre ; le bâtiment entier tremble sur ses bases, et une partie du plafond tombe sur le sol. Alors, dans une lumière blanche tombant en douche, irréelle, l’Ange, ses grandes ailes d’opale argentée déployées, descend dans la chambre et s’immobilise au-dessus du lit.

L’Ange :

Je te salue, Prophète ! Le Grand Œuvre commence !

Le messager est arrivé.

 

 la scène de l’apparition de l’ange dans la série Angels in America de Mike Nichols (DVD 1, chapitre 3, de 2 h 31 min 40 s à 2 h 34 min 57 s)Chercher un photogramme.

Différentes mises en scène de l’Ange à étudier.

propos de Krzysztof Warlikowski recueillis par Jean-François perrier en février 2007

— Comment avez-vous traité le problème de l’ange, des anges qui sont au centre de la pièce ?

— Tony Kushner n’est pas allé très loin dans son analyse du « Ciel », du divin. L’ange est présenté ici comme une créature déchue, comme chaque individu sur terre. On pourrait alors traiter cela par le grotesque ce qui ne me convient pas du tout. J’ai choisi de mettre en scène une femme, mais très hermaphrodite, d’une telle beauté qu’elle en est presque inhumaine. J’ai construit le personnage autour d’une des phrases que lui fait dire Kushner : « nous on est fait pour aimer », comprise aussi dans le sens d’une copulation éternelle et universelle. Il me semble que l’ange en faisant passer l’homme vers la mort lui rend la vie. Mais je n’ai pas de certitude absolue concernant cette analyse

  Voir le traitement de l'Ange dans le film Les Ailes du désir de Wim Wenders