Dans le Journal la Terrasse:
Qui est Jakob Bronsky ?
Haïm Menahem : Jakob Bronsky, fils d’une famille rescapée par miracle de la catastrophe, émigre en Amérique en 1950. Débarqué à New York, Jakob n’a qu’une obsession : écrire son histoire dans sa langue natale, l’allemand, pour retrouver une mémoire trouée et écrire son livre, Le Branleur, qui le rendra célèbre dans ce pays où seule la réussite compte. Il va survivre en enchaînant des boulots minables au milieu des laissés-pour-compte du rêve américain. Dans ce roman autobiographique, l’auteur raconte son histoire de survivant des ghettos à travers le personnage de Jakob, son double, – « écrivain allemand d’origine juive dans un pays étranger, un pays que je ne comprends pas et qui ne me comprend pas ». Hilsenrath s’appuie sur des situations déjantées et loufoques pour faire entendre une parole rare, un témoignage hors norme sur cette tragédie.
Comment caractérisez-vous la langue d’Edgar Hilsenrath ?
H. M. : Hilsenrath parle de la Shoah avec une grande singularité en déployant une écriture burlesque, délurée, percutante ; avec des bouffées de dérision et des moments hallucinatoires qui rendent le héros du livre, Jakob Bronsky, à la fois drôle et vivant. Une langue sans détour, sans mélo, sans aucun tabou, et qui laisse la place à une grande humanité. D’aucuns pourraient qualifier son écriture de crue et simpliste, mais au fur et à mesure du déroulement de l’histoire transparait la cruauté et la simplicité d’une tragi-comédie.
H. M. : En faisant confiance à l’écriture vivante de l’auteur lorsqu’il dépeint les aventures de Jakob Bronsky : ses pensées, ses obsessions, ses fantasmes sexuels, sa vie d’exilé sur cette terre promise américaine…
Quels sont vos partis pris de jeu et de mise en scène ?
H. M. : Seul, comme Hilsenrath et son double Bronsky lorsqu’ils écrivent, dans ce rapport de solitude que les auteurs affrontent. Un choix qui s’est imposé de lui-même : une seule et même « figure » restitue cette parole. Quant à l’espace, il est minimaliste, épuré, avec au sol, posées comme une figure géométrique aléatoire, des feuilles de papier où est inscrite la parole d’Hilsenrath étalée dans l’espace ;l’écriture comme support de jeu dans cet espace. La musique de David Rueff très présente sur scène apporte un souffle, des respirations, un dialogue avec le texte et symbolise une Amérique loin des tonalités attendues. J’ai voulu faire entendre sur un plateau de théâtre cette parole singulière, la dimension tragique de cette histoire forte et burlesque.
Propos recueillis par Agnès Santi
Haïm Menahem : Jakob Bronsky, fils d’une famille rescapée par miracle de la catastrophe, émigre en Amérique en 1950. Débarqué à New York, Jakob n’a qu’une obsession : écrire son histoire dans sa langue natale, l’allemand, pour retrouver une mémoire trouée et écrire son livre, Le Branleur, qui le rendra célèbre dans ce pays où seule la réussite compte. Il va survivre en enchaînant des boulots minables au milieu des laissés-pour-compte du rêve américain. Dans ce roman autobiographique, l’auteur raconte son histoire de survivant des ghettos à travers le personnage de Jakob, son double, – « écrivain allemand d’origine juive dans un pays étranger, un pays que je ne comprends pas et qui ne me comprend pas ». Hilsenrath s’appuie sur des situations déjantées et loufoques pour faire entendre une parole rare, un témoignage hors norme sur cette tragédie.
Comment caractérisez-vous la langue d’Edgar Hilsenrath ?
H. M. : Hilsenrath parle de la Shoah avec une grande singularité en déployant une écriture burlesque, délurée, percutante ; avec des bouffées de dérision et des moments hallucinatoires qui rendent le héros du livre, Jakob Bronsky, à la fois drôle et vivant. Une langue sans détour, sans mélo, sans aucun tabou, et qui laisse la place à une grande humanité. D’aucuns pourraient qualifier son écriture de crue et simpliste, mais au fur et à mesure du déroulement de l’histoire transparait la cruauté et la simplicité d’une tragi-comédie.
« Une langue sans détour, sans mélo, sans aucun tabou, et qui laisse la place à une grande humanité. »
Comment rendre compte sur scène de l’ironie féroce de l’écriture ?H. M. : En faisant confiance à l’écriture vivante de l’auteur lorsqu’il dépeint les aventures de Jakob Bronsky : ses pensées, ses obsessions, ses fantasmes sexuels, sa vie d’exilé sur cette terre promise américaine…
Quels sont vos partis pris de jeu et de mise en scène ?
H. M. : Seul, comme Hilsenrath et son double Bronsky lorsqu’ils écrivent, dans ce rapport de solitude que les auteurs affrontent. Un choix qui s’est imposé de lui-même : une seule et même « figure » restitue cette parole. Quant à l’espace, il est minimaliste, épuré, avec au sol, posées comme une figure géométrique aléatoire, des feuilles de papier où est inscrite la parole d’Hilsenrath étalée dans l’espace ;l’écriture comme support de jeu dans cet espace. La musique de David Rueff très présente sur scène apporte un souffle, des respirations, un dialogue avec le texte et symbolise une Amérique loin des tonalités attendues. J’ai voulu faire entendre sur un plateau de théâtre cette parole singulière, la dimension tragique de cette histoire forte et burlesque.
Propos recueillis par Agnès Santi