Les Bacchantes d’André
Wilms à la Comédie française en 2005 dans la traduction de Jean Bollack
Désacralisation : « La pièce n’est plus objet de
vénération, elle peut apparaître plus dure, plus cruelle, et , partant, plus
intéressante. » cf la dualité de Dionysos ou comment la tragédie s’interroge
sur elle-même.
Traduction qui propose une remise à plat. Euripide se fonde
sur un mythe déjà connu pour en proposer une nouvelle version : la
punition de Penthée est la manière de donner corps à son existence divine par
la manifestation de sa puissance. L’anéantissement de Penthée- dont le seul
crime est de ne pas reconnaître sa divinité- est le moyen, pour le dieu du
théâtre, d’affirmer sa force, qui est précisément celle du théâtre : dans
la traduction déjà la mise en évidence du spectacle.
Relation dissymétrique entre les deux protagonistes à tel point que le
combat est forcément factice :
« Penthée n’est pas coupable. Aucune transgression ne
se retourne ici contre son auteur le dieu se livre Penthée en offrande à son propre triomphe. Penthée
est la négation qui s’attache à son propre triomphe te l’enrichit. … Dans cet
affrontement, le culte n’est pas reproduit comme tel ; Il y est fait
référence mais l e drame présente les rites à sa façon. L’initiation théâtrale
suit ses propres lois. La fantasmagorie féérique, au centre, porte le signe du
délire. La destruction du palais a la réalité d’une hallucination ; elle
libère toute l’énergie du dieu, entré dans le monde des hommes attaché par des
liens comme un animal. »Bollack
Wilms en droite ligne de Bollack, mais poussé à l’extrême :
domination du dieu, méta théâtralité de la pièce = danger de la radicalisation
religieuse qui lui paraissent d’actualité.
André Wilms : «
cette tragédie d’Euripide m’intéressait car c’est une pièce contre la religion,
qui apparaît comme un fait totalitaire. Vu ce que nous vivons en ce moment pou
toutes les confessions, je trouvais que cela donnait à penser. On peut voir
dans cette pièce une condamnation du dyonysisme. Le dieu revenant dans sa ville
natale pour imposer son culte, se montre arbitraire et prend plaisir à l’être. Il
fait preuve d’une grande cruauté envers Penthée, il le manipule, le déguise en
femme, le raille et finit par le faire tuer par sa mère. C’est d’un grotesque
cauchemardesque. Dionysos est un metteur en scène. Il met tout en scène y
compris Penthée
Accentuation de la dimension théâtrale de la manifestation
de Dionysos : bacchantes + suivantes dévotes selon l’expression de Bollack
( Pas approche mystique, rituelle, apparitions
spectaculaires : costumes, accessoires, scéno,c’est là que réside la divinité, donc
fruit d’un jeu,
Wilms veut éviter le côté « Ur », pas de sacralisation , pas de retour à l’origine
avec décor argileux, sombre évoquant la Grèce mythique.
Nicky Rieti propose une scéno abstraite : arcades et
colonnes géométriques de couleurs vives et variées, qui ne se découvrent qu’après
le prologue dit devant le rideau par un Podalydes vêtu d’un peplos doré comme
les stucs des théâtres, terminé par une queue de cheval en or, phallus doré à
un moment ,bâton flexible aussi en or ; à cour une grande tête de taureau
dorée : attributs du dieu + accessoires., Bollack déjà dévalue leur spécificité
rituelle : en nommant le thyrse bâton
Femmes du chœur :bâton plus petit intégré à leur
chorégraphie
Jeu avec Penthée (Ruf) ironie et amusement, chat et souris.
Kommos qui suit le 2ème stasimon : Podalydes surgit à l’avant scène alors que le
rideau s’est fermé sur des sons grondants, il annonce la ruine du palais et
quand le rideau se relève, l’espace est bouleversé, les colonnes se sont
effondrées les unes sur les autres. Interviendra aussi au second balcon puis épiphanie finale dans une petite scène sur
élevée tandis que la voix du dieu se fait entendre hors scène, toute fin vient
mettre sa tête dans le masque de taureau avec un rire.
Wilms orchestre un jeu pas un rituel comme un jeu d’enfant
avec des signes clairement théâtralisé de divinité ; mise à distance du
mythe. ( in Les Bacchantes Canopé)