lundi 30 mars 2020

la Cerisaie: le personnage de Lioubov selon Anaïs: version améliorée


Analyse dramaturgique de Lioubov Andreevna :

Mon personnage est Lioubov Andreevna, c’est la propriétaire terrienne de La Cerisaie, et elle devra la vendre. C’est une femme veuve, qui a perdu son fils car il s’est noyé, elle est également la mère d’Ania et la mère adoptive de Varia. Son frère est Gaev. 

  Son entourage dit d’elle qu’elle est accueillante et généreuse, elle est également affective et on peut remarquer qu’elle est estimée par de nombreux personnages : « c’est quelqu’un de bien », dit Lopakhine (p. 10) ; « Ce que je voudrais seulement, c’est que vous me fassiez confiance comme avant […] autrefois » dit Lopakhine (p.23). Varia l’appelle souvent « ma bonne maman » ce qui montre qu’elle la considère comme sa vraie mère, Lioubov a su jouer un rôle maternel assez puissant envers Varia, pour que cette dernière se sente à l’aise dans cette famille. Nous pouvons également retrouver l’attachement de Trofimov envers Lioubov, lorsqu’il la qualifie de « bonne amie » (p. 74)
On peut voir sa générosité dans la phrase « Douniacha offrez du thé aux musiciens » (p.68)

Cependant son frère Gaevla qualifie de « dépravée ». Mais elle semble tout de même entretenir une relation très fusionnelle avec son frère, cela peut s’exprimer par leur réaction qui est la même face à la vente de la Cerisaie. Ils se jurent que le domaine ne sera pas vendu et refusent d’adapter leur chère Cerisaie aux nouvelles contraintes de la Russie en pleine émergence. Mais cela doit également être puisque Gaev était la seule famille que Lioubov avait, avec ses filles, lorsqu’elle a perdu son fils et son amant. Nous pouvons également remarquer qu’ils partagent les mêmes souvenirs d’enfance, ce qui nous amène à croire qu’ils avaient une vraie complicité étant enfant, et que celle-ci n’a pas disparu au fil du temps. Et nous pouvons animer cette pensé avec la didascalie à l’acte IV : Lioubov et Gaev se jettent dans les bras l’un de l’autre et sanglotent, tout bas, de peur qu’on ne les entende.
 Elle est également qualifiée de dépensière selon ses propres dires et ceux des autres : (p. 16)
-> « Sa villa près de Menton, elle l’avait déjà vendue, il ne lui restait rien, mais rien » dit Ania. A la page 97 Lioubov affirme son côté dépensier lorsqu’elle dit « cet argent ne fera pas long feu ».
Ranevskaïa est également représentée comme une femme très émotive, elle pleure souvent, nous le retrouvons régulièrement dans les didascalies :
-          « les larmes aux yeux » p.22
-          « elle pleure » p.74
-          « elle sort un mouchoir » p.75 …



Lioubov ne cesse de se mettre en scène comme un personnage tragique en évoquant le « châtiment » qu’elle aurait reçu pour ses « péchés » (p. 50), la punition de Dieu (p. 50) et son « destin » (p. 71).Lioubov ne meurt pas de mort violente, mais elle finit par perdre la cerisaie. Cette perte est annoncée dès l’Acte I, et les actes suivants vont voir cette annonce devenir réalité, comme dans une tragédie. Néanmoins, Lioubov pourrait très bien échapper à son destin et éviter cette vente en reconvertissant le domaine ou en cherchant à le rentabiliser, comme le lui recommande Lopakhine à plusieurs reprises dans la pièce. Or, elle ne le fait pas, parce qu’elle considère cette reconversion comme « vulgaire ». Elle n’est donc pas soumise à un destin implacable, cependant elle ne fait rien pour changer le court des choses. Ce comportement représente mal le colossal attachement que Lioubov a envers cette Cerisaie. Effectivement nous pouvons remarquer cet amour à de nombreuses reprises. Tout d’abord puisqu’elle y retrouve tout ses souvenirs, la Cerisaie est la représentation de son enfance. Mais je pense également qu’elle peut représenter une figure maternelle pour Lioubov, comme nous le voyons dans la phrase « Regardez notre pauvre maman qui marche dans la Cerisaie… en robe blanche ». Ce fut certainement auprès de La cerisaie qu’elle allait quand elle était triste. D’ailleurs elle le dit « le bonheur s’éveillait avec moi », ce qui veut dire que cet endroit était source de joie pour Lioubov. Je pense alors que, Lioubov, malgré tout cela a voulu partir, puisque comme elle le dit la Cerisaie est synonyme de souvenir, elle a pu en vivre des bon comme des mauvais. Je pense notamment à la mort de son fils noyé, qui l’a profondément blessé car c’est à cause de cela qu’elle a quitté la Cerisaie pour la première fois. Mais c’est aussi pour cela que Lioubov a essayé de se suicider. Je pense alors que pour elle quitter cette Cerisaie est synonyme de laisser le passé, de détruire les fantômes qui la hantaient. Ainsi, pour elle, chaque arbre abattu est une part de mémoire qui disparaît.

   Lioubov commence la scène en étant à Paris, et revient à sa source en Russie, elle est heureuse de revenir dans son cocon d’enfance, puisqu’elle y retrouve tous ses souvenirs. Cependant son euphorie diminue petit à petit puisqu’à la fin de la pièce elle est forcée à quitter la Cerisaie, comme si elle n’était pas faite pour rester dans cette maison. Elle passe alors par plusieurs émotions, la joie, l’exaspération et la tristesse. Mais elle va tout de même réussir à se relever, et surmonter cette épreuve, elle quittera alors la Cerisaie de façon très humble. Son évolution se voit alors surtout dans ses émotions. 

  J’interprète Lioubov dans l’acte IV, et dans celui-ci nous pouvoir voir qu’une didascalie nous montre qu’elle est profondément affectée par le fait de quitter La Cerisaie, « elle est pâle, son visage tremble, elle ne peut pas parler ». Cependant elle commence à aller mieux, comme nous le montre la didascalie « Mes nerfs vont mieux », elle fait preuve d’une force démesurée pour oublier son passé et débuter une nouvelle vie. Elle essaie tout de même de prolonger sa présence dans la maison, en regardant longuement l’intérieur de cette dernière. Je pense que c’est dans cette acte que nous pouvons ressentir plus intensément l’attachement de Lioubov face à la Cerisaie, puisqu’elle exprime « Mon deuxième chagrin c’est Varia ». Ainsi cela nous montre qu’elle place l’abandon de la Cerisaie avant sa propre fille. Enfin comme je l’ai dit Lioubov fini par quitter la maison humblement, comme si elle était déterminée à recommencer une nouvelle vie, oublier les démons de son passé.

 Pour moi, Lioubov est synonyme de fragilité et de légèreté, mais également d’une certaine naïveté. Cela pourrait être traduit par le fait qu’elle ne sait pas gérer l’argent, mais également par le manque de réactivité fasse à La Cerisaie, certes elle est triste, mais elle ne se donne pas les moyens pour garder sa propriété. Je pense que Tchekhov a voulu la représenter comme figure de deuil, du fait qu’il souffrait de la Tuberculose lors de l’écriture de la Cerisaie. Ainsi elle représenterait cette facette, à travers la perte de son fils, de son amant, de son mari, mais également lors de la vente de La Cerisaie. Je pense que ce sont toutes ses épreuves, qui font de Lioubov une femme fragile, et sensible, mais également très affective. Peut-être a-t-elle besoin de se sentir exister, de sentir aimer, c’est pour cela qu’elle étreint souvent ses proches.  A l’aide de ce procédé elle enfouit sa tristesse, grâce au bonheur des autres, grâce à leur compassion.