Théâtre Municipal 20h Durée 1H
Emission Coup de théâtre à la Comédie de Colmar
Tiago Rodrigues revient à sa première pièce de théâtre. Écrite et créée à Lisbonne, en 2007, Chœur des amants
est un récit lyrique et polyphonique. Un jeune couple raconte à deux
voix la condition de vie et de mort qu’ils traversent lorsque l’un d’eux
se sent étouffé. En juxtaposant des versions légèrement différentes des
mêmes événements, la pièce nous permet d’explorer un moment de crise,
comme une course contre-la-montre, où tout est menacé et où l’on
retrouve la force vitale de l’amour.
13 ans après sa première création, Tiago Rodrigues invite Alma Palacios
et David Geselson à donner corps à ces deux personnages qu’il a
inventés. Il en profite aussi pour imaginer ce qui leur est arrivé
toutes ces années. Sans se limiter à en faire une nouvelle mise en
scène, il décide d’écrire sur le passage du temps et ce qui en découle
sur la vie des amants. Qu’en est-il, de cet amour qui a défié la mort ?
« Interroger mes personnages sur leur vécu, c’est comme m’interroger sur
le vécu de mon théâtre depuis que j’ai commencé à écrire », nous dit
Tiago Rodrigues. « Les personnages seront-ils encore amoureux ? Ce jeune
homme que j’étais, qui a osé écrire cette pièce, sera-t-il porté par la
même nécessité de faire du théâtre ? Je ne sais pas si je suis prêt à
entendre la réponse, mais je ne peux éviter la question.
En savoir plus sur Tiago Rodrigues emission sur france Inter
Interview de Tiago Rodigues dans Ouest france:
Comment est né le spectacle Chœur des amants, que vous présentez en avant-première ce samedi, au Palais des arts à Vannes ?
Pendant quatre étés, à Lisbonne, j’organisais le spectacle Urgence. J’invitais les auteurs à écrire, avec les acteurs, des pièces de 10 à 12 minutes. Les saynètes étaient ensuite présentées au public, le temps d’une soirée. Je m’y suis essayé à mon tour en 2006. C’est là que sont nées les dix premières minutes de Chœur des amants. Trois scènes ont été écrites l’année suivante. Et treize ans plus tard, en 2020, je préparais Catarina ou la beauté de tuer des fascistes, pour le théâtre des Bouffes du Nord, quand ce dernier m’a proposé également de travailler sur une petite forme. Je me suis alors mis à écrire la dernière scène… Puis, le Covid est passé par là. On peut enfin partir en tournée avec ce spectacle de 45 minutes, après avoir répété une semaine à Vannes.
de quoi parle-t-elle?
Elle est courte mais très remplie. Il y est question d’hôpital, de forêt, de brosse à dents et d’amour… C’est le récit lyrique de deux amants confrontés à une situation limite de vie ou de mort, où l’oxygène commence à se faire rare. Deux acteurs/amants racontent, simultanément, des versions légèrement différentes d’une même histoire, célébrant l’amour quand tout est remis en cause. Le fait d’avoir achevé la pièce treize ans après l’avoir commencée, j’ai fait vieillir les personnages. La pièce se déplace. C’est moins de leur vie privée dont il est question mais davantage de leur rapport au monde qui a changé. Ils ne sont plus « il » et « elle ». Ils sont un ! C’est une pièce qui parle beaucoup du temps.
Quelle est votre définition de la mise en scène ?
Cette question, je me la pose encore. Je privilégie le rapport entre les comédiens et le texte. Avant chaque nouveau spectacle, je me dis que j’aimerais mettre des feux d’artifice et de la vidéo sur scène pour en mettre plein les yeux aux spectateurs (rires). Et puis ça n’arrive jamais, car j’aime entendre les acteurs parler et les voir expérimenter des choses, même si je sais à l’avance que ça ne va pas aller. Je devrais être plus directif : diriger plus et parler moins.
Cet été, vous avez été nommé directeur du festival d’Avignon. Vous prendrez vos fonctions après la prochaine édition. N’est-ce pas trop intimidant de succéder à des personnalités comme Jean Vilar ?
C’est bien sûr écrasant, mais très inspirant. C’est un festival qui a une histoire, une renommée et une grande exigence. Mais, aussi étonnant que cela puisse paraître, il y a une vraie place accordée à la liberté de création. C’est très rare. Il y a tout ce passé mais aussi une page blanche merveilleuse à écrire. D’une édition à l’autre, la ligne artistique peut se contredire…
Vous serez le premier directeur de nationalité non française à prendre les rênes de ce prestigieux rendez-vous… Irez-vous encore plus loin dans la dimension internationale du festival ?
Avignon est ouvert et déjà très tourné vers d’autres mondes et d’autres géographies artistiques. C’est aussi ma personnalité. Ça fera donc partie du festival en 2023. Cet aspect ne dominera pas mais contribuera au futur projet. Après une pandémie qui a exigé par nécessité le retour des frontières, du contrôle des mobilités, on en a bien besoin… pour des raisons humanistes, artistiques et culturelles. Dans la mesure de l’impossible, spectacle que je monterai à Vannes, les 18 et 19 mai, s’intéressera aux humanitaires et à leur travail aux quatre coins du monde. On doit énormément s’intéresser à l’autre, même s’il est à 30 000 km de nous.