LA NOTION DE PRÉSENCE
Josette Féral
Réponse (sur la question de la présence) des différents metteurs en scène interviewés dans les
livres : Mise en scène et jeu de l’acteur (J. Féral, 1997, 1998 et 2006). Volume 1 : L’espace du
texte; Volume 2 : Corps en scène; Volume 3 : Voix de femmes. Les questions posées abordaient
cette notion de différents points de vue (Qu’est-ce que la présence? Utilisez-vous cette notion
dans votre travail? Comment définir ce concept?).
A lire là
La réponse de Jean-Pierre Vincent:
Il est très difficile de répondre à cette question, de même qu’il est très difficile, quand on
est par exemple au jury d’entrée dans une école de comédiens, de dire exactement pourquoi on
vote très fort pour tel acteur plutôt que pour tel autre.
La présence, c’est une cohérence, disons mystérieuse, tout simplement parce qu’il est
difficile de l’expliquer avec des critères scientifiques. C’est une cohérence particulière entre le
corps d’un acteur, son visage, son système phonique et son imagination.
Il y a des cohérences instinctives supérieures à d’autres. Je prends par exemple un acteur
de la Comédie-Française avec qui j’ai travaillé, Jean-Luc Boutté, qui est atteint d’une grave
maladie. C’est un acteur absolument exceptionnel avant même d’avoir commencé à travailler,
parce qu’il a un système phonique, que la vibration de sa voix touche n’importe qui à moins de
vingt-cinq mètres, va au cœur du système auditif de l’autre, que la plastique de son corps, de son
visage correspond, selon des critères que je ne cherche même pas à expliquer, à ce système
phonique. C’est qu’il a en plus une imagination parfaitement adaptée à ce que son corps, sa
physiologie produit de toute façon et qu’il a su, en outre, au cours de sa vie, augmenter sa
capacité imaginative, son sérieux, la diversité de son travail. Cette faculté se cultive, mais à vingt
pour cent seulement. Pour les quatre-vingt pour cent restant, c’est inné.