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Le théâtre de Crimp : un théâtre de questions.
Dans La Campagne il est question du couple et de ses dérivés : amour et désamour, crise
et complicité, errance des individus; celle de Richard s’acclimate à celle de Corinne. Leurs
errances entremêlées ne serait-elle pas l’unique chose qui les réunit ? Et la sécurité de la
Campagne n’est-elle pas que tous les dangers y sont connus, nommés et répertoriés ? Les
repères habituels ne sont que des habitudes,
le mensonge et la vérité des apparences, comme la réalité ou l’illusion, les mots s’épuisent
dans leurs manipulations jusqu’à céder la place, silencieusement, au non-dit.
« Je ne sais pas si cette question du non-dit est particulièrement anglaise. Même si
quelqu’un comme Harold Pinter est un expert en la matière. En tout cas, il est certain
que, tout au long de La Campagne, il y a une discussion sur ce qui peut ou ne peut pas
être dit. (...) en tant qu’écrivain dont le métier consiste à se servir du langage, il m’est
nécessaire de croire jusqu’à un certain point que celui-ci peut être utilisé pour produire du
sens ». Martin Crimp.
Cette Campagne dissèque au scalpel une situation de couple faussement ordinaire. Elle
révèle l’existence d’une profondeur des êtres, en laissant le spectateur toujours libre de
dire laquelle; elle sonde avec ironie et mordant leurs errances à la fois drôles et tragiques.
Au milieu du couple, il y la troisième personne, celle qui le fait vaciller ou le cimente, on
ne sait plus. Avec elle, toute la question du bonheur, du désir, de l’amour passionnel, de
l’état de manque, de la dépendance, des compulsions. On interroge le couple, l’amour,
la vie. On combat pour sa vie, son existence dans un refuge de campagne qui prend des
allures de piège.
Le temps est le temps présent questionné par un passé très lointain.
L’auteur s’amuse à brouiller les pistes. Il bouscule le spectateur. Le monde qu’il nous décrit
est à la fois familier et singulier, le réel n’est pas toujours facile à saisir.