La question du père
dans illusions comiques
Père ressuscité, père
défiguré
Définitions du théâtre: « évangile des enfants sans
père », « un fleuve qui remonte à sa source »
Pour l’orphelin le retour du père est la bonne nouvelle.
Génération de PY, d’après mai 68 : sans père, l’enfant
est-il abandonné ou libéré ? Allégé
ou exilé du sens, écrasé par l’effroi de la perte ou exalté par l’ivresse de la
quête ?
Fils aux prises avec un père dans l’œuvre de PY
Maman envahissante, mon père, quelques apparitions qui
ponctuent la couse folle de Moi-Même P67,78,101
Pas présent à l’acte 1 sauf
pape, nom qui signifie père et qui l’appelle « mon fils », n’entre en
scène acte II que pour renier son descendant et mettre en cause la filiation :
« Tu nous as couvert de honte !
Et d’ailleurs il m’est venu une idée, tu ne peux pas être mon fils. Il
coule dans mes veines un honneur que tu ne soupçonnes pas.…P67 souvenir du Cid, Don Diègue de de Don Louis du Dom Juan de Molière
Temps du procès et prison : visite du père : cadre
du praticable devient cellule comme il a été coulisse et confiserie, poète en
costume de bagnard à rayures cf Dalton ou Brother des frères Cohen ;
Père change lui d’état civil »je ne veux plus de ce nom
qui nous relie » : casquette de cuir sur la tête = Brecht : « c’est un nom qui a fait ses
preuves »
Acte III dernière apparition : retrouvailles avec le
fils, reprise du patronyme : comédie tjrs réconciliation au
dénouement : « Quand tu écrivais dans ce cahier bleu, j’étais fier
de toi. Si tu redeviens cet enfant au dos un peu voûté sur son ouvrage alors je
pense que mon nom ne me fera plus peur. » P101
A rapprocher d’Orlando, autre pièce de Py
Père théâtral = image brouillée du père céleste, « sale
gueule » plus que sainte Face, nombreux pères bourreaux
Peut-on aimer son père ? et si oui comment ?: avec
le père se joue la relation au passé, à l’héritage, à l’autorité, à Dieu :
enjeu politique quand votre père est dictateur dans Les vainqueurs, qu’il a
torturé en Algérie comme dans l’Exaltation du labyrinthe, ou qu’il est ancien
Mao devenu milliardaire dans Les Enfants de saturne, enjeu moral et humain
quand il vous a battu à coups de ceinture ou violé rendant l’idée de pardon ou
de miséricorde insupportable comme dans jeunesse, enjeu spirituel aussi car
cette même violence rend l’affirmation d’un Dieu père inaudible.
Génération 68 : le rapport avec le père est assez
violent. Il y en a un qui le prostitue, un autre veut le sauter, un troisième
veut l’assassiner…Enfin c’est le rapport que ma génération a eu avec les soixante
huitards ! la génération de 68 débute en voulant tuer le père puis
continue en cherchant à tuer le fils. Elle refuse absolument d’être père, c’est
normal, c’est leur histoire. » dans les Inrocck. A propos d’orlando
Cf amputation par les pères des mains des enfants,
castration détournée mais pas seulement : mains clouées du Christ, mains
coupées qui témoignent de la violence paternelle cf la jeune fille le diable et
le moulin, condamner les fils à l’impuissance.
A opposer aux mains offertes, signe d’un refus de toute
maîtrise, de toute mainmise, emerveillement renouvelé devant les mains acquises
cf fin de La jeune fille…
Fécondité paradoxale des blessures et des mutilations.
Révolte à rebours du fils contre le père cynique :
« les pères salissent les fils, mais les fils sauvent les pères » in
Exaltation… rédemption inversée ?
Importance dans l’œuvre de Py de Les aventures de Paco Goliard, sa première pièce.
« le rapport au
père est l’un de mes sujets fondateurs » programme d’orlando
Père joué par Bruno
Sermonne, père théâtral à qui Py rend hommage, mort en novembre 2013 laissant
« deux générations d’orphelins de sa parole »
La première scène entre un père et son fils est une scène de
reconnaissance et d’embrassade.Retour du père porté disparu. Père qui sait se
montrer fils : entend la voix qui l’appelle, africaine, voix maternelle : »
un coup de tonnerre/c’est ce qu’il faut, mon fils/pour s »arracher de la
base !/pour être décroché du repère/et noyé dans la joie. » Paco
Goliard.
La mort du père n’est plus révolte prométhéenne mais nouveau
confort intellectuel.
Œuvre de Py commence donc par cette résurrection théâtrale
du père, tourner la page du XXème siècle, ressassement du meurtre du père qui
avait ouvert le XIXème siècle cf Orion dans Apocalypse Joyeuse pas se laisser
dicter sa conduite par « le siècle dernier, celui des drapeaux, des
marteaux, des épées qui a fatigué les mains de l’humanité ». différent
pour Py le père n’est pas mort, il s’est régénéré à la source africaine et il a
à nouveau une parole à offrir à son fils » révélation d’une vie héroïque
et brutale » (…°)
« Tout homme qui jouit d'un récit avoue qu’il n’a pas
perdu la foi en la Providence " Py préface de l’Apocalypse joyeuse à la
face de ceux qui ont réduit la scène à un lieu d’inanités muettes cf Beckett ;
Importance de la voix du père, scène où le fils tète le
père : y-t-il quelque chose à boire dans la tétée paternelle ? une
présence, pas une certitude sauf celle que le père existe.
Le théâtre, Hamlet en sait quelque chose, est le lieu où le
père peut encore apparaître, parce que c’est un lieu vertical .
Le théâtre se souvient du père, lui rend hommage et
l’attend .
Dédicace de la Servante : « A mon père, nous les
chasseurs »
Dans la suite de l’œuvre, image du père moins positive.
Py aime jouer avec la paronomase : fils ( tissu) fils
enfant cf « L’incantation est incarnation à une lettre près » Chez Py
tout père porte donc avec lui l’histoire sanglante du XXème siècle.