Scénographie de Pierre André Weitz : le
lego de Pierre André Weitz
Si priorité à la Parole, pourquoi pas tréteaux
nus ? cf Copeau ou Brook " S’il y a un décor, l’espace n’est pas vide,
il est encombré, même s’il s’agit d’éléments de grande beauté. Dans ce cas,
l’esprit du spectateur est lui aussi déjà meublé. » qchose de superflu et
qui renvoie au théâtre bourgeois.
Py renonce au décor en utilisant
le décor. Il peut contenir lui aussi une parole cf définition 34 cf règles d’or
de Craig : « Toutes choses naissent du mouvement » in De l’art du théâtre. Les déplacements
précis et fluides ne concernent pas que les comédiens. Lignes verticales et
horizontales de néons qui dessinent et sculptent l’espace ou aux filtres
jaunes, rouges et bleus qui transforment l’atmosphère.
Ampoules fixées aux praticables
et tubes de néons montants et descendants des cintres : associer dans un
même mouvement la transformation scénographique et le changement d’éclairage:
« chorégraphe d’espace selon
Weitz pour bien dissocier de la pratique statique que peut connoter le mot
scénographie ; cf Brook : "contrairement au peintre de chevalet qui
manie deux dimensions, ou au sculpteur qui en dispose de trois, le décorateur
pense avec une quatrième dimension : le temps. Il voit, non pas l’image
d’une scène mais l’image d’une scène en mouvement. »
Mais répétitions ont lieu
d’emblée dans les décors définitifs dont les acteurs doivent s’approprier le
mouvement, praticables sur roulettes : l’espace devient temps, mouvements
qui anticipent sur les scènes et mordent sur les paroles des acteurs.
D’où significations des
mouvements : exemples: gauche et droite pour la lecture des journaux, ascension pour
l’élévation du poète etc, personnage nouveau avec portes créées pour lui par
une ouverture des praticables : mère du poète, jeune fanatique élan côté
cour incontrôlable p27 + augmentation de volume d’éclairage comme dans une
scène de cabaret pour l’entrée d’un numéro.
Autre ex : Balazuc joue Dieu
dans le public « comme un metteur en scène après une mauvaise
générale » et c’est quand il dit « je veux m’incarner » qu’il
gravit les marches qui lui permettent de monter sur scène. Economie de moyens
limpide.
Ex de parole de la matière qui
soit à l’unisson de la parole du personnage avec la longue tirade de Girard sur
la tragédie : filtre rouge sur le néon, le tragédien pense ne rouge (maquillage
qu’a fait aussi Weitz, toge rouge et néon rouge du fond de scène :
harmonie entre texte et scéno.
Attention extrême de Py et Weitz
à ce qu’ils appellent un « continuum », mystérieuse et profonde unité
entre tous les éléments disparates d’un spectacle, Weitz parle de jeu de « correspondances »
au sens baudelairien du terme.
« un continuum qui va de
l’ourlet d’une robe jusqu’au mur le plus monumental. Si l’on installe un
continuum, c’est lui qui va penser ».
Meilleur gage de continuité=tout
construire avec les mêmes matériaux et les mêmes formes de départ. Module de
base transformé ensuite, différents niveaux, déplacements qui permettent un jeu
avec les hauteurs et les lignes, d’où le terme de Lego : dimension ludique
et familiarité, créer peu à peu une œuvre, pièces après pièces. Traits
caractéristiques du théâtre de Py au premier coup d’œil.
Ethique et souci pratique en même
temps que préoccupation esthétique : recyclage des décors, agencement
différents des mêmes modules, moindres frais : fidélité à un univers
visuel, prise en compte de la dimension provisoire et éphémère d’un spectacle
et résistance discrète à la société de consommation. A Bussang Weitz avait
appris à ne rien jeter, même les petits bouts de fil. Sens aigu de l’argent
public dont bénéficient les CDN de Py. Le même bois a connu peint et repeint
différentes pièces de l’univers de Py : éphémère est le contraire de
jetable.
Cf Weitz qui cite Le capitaine
Fracasse de Gautier roman du théâtre de tréteaux dont les héros ont leurs
costumes et décors pour seul trésor !