mercredi 29 janvier 2020

Interview de Zouzou Leyens costumière de Piscine(s)

Interview Zouzou Leyens : Costumière 

1) Depuis quand êtes-vous sur le projet ?
 Matthieu m’en a parlé de manière informelle il y a deux ans. C’est depuis le printemps qu’il m’en a parlé plus précisément en me disant que les dates de spectacles étaient fixées. J’ai commencé à rêver au projet.La difficulté est que le projet est en bord de piscine. Je suis partie à la recherche de pièces pour les costumes, mais c’était à la fin des vacances d’été et il y avait moins de choix.Nous sommes sur des costumes contemporains. Je vais travailler sur quelque chose de très précis, de fin et de non perceptible.Début juillet, Matthieu a affiné ses demandes. 

2) Avez-vous déjà travaillé avec Matthieu? On s’est rencontrés avec Matthieu en 2006. J’ai travaillé sur plusieurs projets quand il était comédien. C’est son troisième projet en tant que metteur en scène sur lequel on collabore. On a beaucoup de références communes. 

3) Comment travaillez-vous en collaboration avec Matthieu ? C’est un travail en grande complicité qui est pensé comme un tout.J’ai proposé de travailler sur la question d’une garde robes commune. Dans l’écriture de François Bégaudeau, il y a quelque chose de particulier : une communauté d’êtres, mais pas de personnages avec des singularités très pointés. J’ai le sentiment que les personnages peuvent être interchangeables. C’étai tdifficile de travailler sur cette sensation d’uniformité.J’ai proposé à Matthieu de travailler sur l’idée du féminin, du bord de piscine, qu’est ce qui se fait et se défait. On a suggéré de travailler sur une année symbolique de leur vie au sein de la narration et sur des saisons de leur vie (printemps/été, automne/hiver) qui seraient les saisons de la vie !!Les questions des couleurs et des matières se sont posées très vite.Ma première proposition a été celle des couleurs pastel. C’est dangereux, mais j’aime prendre des risques !!J’ai tenté la corde pastel, au risque d’en devenir désagréable. L’enjeu du projet en général, c’est grinçant !!Puis, j’ai proposé des blancs, des pastels, des rouges/fuschias /jaunes : des couleurs plus joyeuses et des couleurs d’automne.Ça a évolué. J’ai proposé des brillances avec de l’argenté pour la question des fêtes, qui viennent ponctuer les rendez-vous des personnages.La mise à l’épreuve des costumes sur la scénographie blanche a été une grande difficulté, car soit les costumes s’effacent, soit il faut se démarquer.Je me suis dit qu’il fallait des demi-teintes comme dans les années 50 et 60. C’était une référence cinématographique de cette époque. Les questions de la coupe, de la couleur, choses fines, précises, des lignes dessinées, la couleur vert de gris, beige, avec les vibrations de la fibre dans le tissu. Je suis dans cette recherche !
 Je cherche des tissus vintage, de la seconde main. J’achète rarement des choses neuves. Je déteste aller dans un magasin d’une marque précise car cela fausse le regard. Je veux trouver une pièce qui me parle. Je travaille avec un magasin de costumes de seconde main à Bruxelles. Ils m’ont prêté 45 à 50 kilos de costumes.Je retouche énormément. Je travaille avec des couturiers quand je dessine les pièces. Je copie également des pièces anciennes sur du tissu contemporain et inversement.J’arrive avec des pièces depuis septembre. Je fais des allers-retours entre des dessins, des pièces et on refait des nouvelles coupes

 4) Quelles sont vos influences ?
 Nos références sont :- La Piscine de Jacques Deray, avec les silhouettes de Delon, de Romy Schneider
.- À bout de souffle de Jean-Luc Godard- Le Mépris de Jean-Luc Godard
 - Les films de Maurice Roney 

La recherche visuelle est très dessinée !!Le point de départ de tout est Larry Sultan Cela a encore plus influencé les costumes que la scénographie. ( Site du photographe Larry Sultan)
sa série Swimmers

 5) Les comédiens incarnent différents personnages, comment les différenciez-vous par le costume ?
 On fait glisser des personnages. Un personnage passe d’un autre sans que ce soit très différent.Pour ce spectacle, on a 40 silhouettes. Cela passe par les boucles d’oreille, les costumes, les chaussures...Je suis la costumière des maillots de bain !! C’est le quatrième en lien avec la piscine.Je travaille à partir des corps des comédiens. Les corps féminins ont les mêmes mensurations : 1m70 et les garçons aussi, sauf Arnaud. J’étais désemparée, je n’avais pas de singularité des corps.Je les dessine nus et je les habille après.Matthieu ne voulait pas stigmatiser un type de société et il voulait trouver la finesse.

 Zouzou Leyens, décembre 2019.