samedi 25 avril 2020

Tartuffe d'après Tartuffe d'après Tartuffe d'après Molière, conception Guillaume Bailliart

Le mardi 28 avril, vous auriez dû voir à la Comédie de Colmar ce seul en scène étonnant Tartuffe d'après Tartuffe, d'après Tartuffe de Molière de et avec Guillaume Bailliart.

Il n'existe pas de captation complète mais je vous invite à découvrir le projet sur le site du Théâtre Contemporain: Tartuffe d'après Tartuffe...  
 Vous trouverez sur le lien une video dans laquelle Guillaume Bailliart explique son projet et des extraits du spectacles. Il est intéressant de comprendre comment des idées de mises en scène et de performances nourrissent le théâtre contemporain.

« La comédie Tartuffe commença devant un public plein d’une attention enthousiaste et bienveillante – qui fit aussitôt place à une profonde stupeur. », écrit Mikhaïl Boulgakov, comme s’il y était, dans Le Roman de monsieur de Molière. L’effarement de la cour de Louis xiv en mai 1664, qui voit Tartuffe, escroc de la pire espèce, menteur, hypocrite, vénal et lubrique jouer les dévots, reste intact. S’y ajoute dans le spectacle de Guillaume Bailliart, l’émerveillement cette fois, de voir un acteur jouer avec virtuosité et de façon insolite près de deux mille alexandrins et tous les rôles de la pièce. Tartuffe d’après Tartuffe d’après Tartuffe d’après Molière est une revisite drôle et décalée de la pièce de Molière, dans un décor où les noms des personnages inscrits sur le sol nous guident dans les méandres de l’être et du paraître et sur les traces de l’imposteur.


Note d’intention :

 « Il s'agit de jouer seul cette pièce de théâtre issue de notre folklore à partir de la version montée par l'équipe du théâtre permanent de Gwénaël Morin.
Le souvenir de cette mise en scène est mon «repère flou», l'équivalent d'une tradition.
Lentement, à force de micro décisions prises dans l'exercice du jeu; le sens a bougé, la dramaturgie s'est transformée par la pratique donc, et par la pensée qu'elle déclenche.
Ce processus de fabrication est extrêmement rudimentaire. Dans Tartuffe de Molière, il est un jeu dans la langue: l'alexandrin, contraignant, agit comme un corset qui presse la pensée qui elle même pousse la métrique pour essayer de vivre dans cette espèce de dictature formelle du vers. Ce conflit interne, dans la langue, me semble être une réserve d'énergie énorme, et particulièrement pour une version jouée en solitaire: seul, on perd les rapports d'un acteur à l'autre, mais on gagne en précision rythmique.
Portées par un seul corps, les ruptures, les montées en pression, le souffle, éclairent le sens et la situation parce qu'on est dans l'énergie de l'écriture qui est une énergie globale (pensée pour plusieurs), démesurée, déclamatoire et forcément pas psychologique. Je pense ainsi me rapprocher de l'auteur, du jaillissement de l'écriture, de trouver et de comprendre, plus intimement qu'une troupe d'acteurs, l'effort d'écriture, ses fulgurances, son énergie. Tartuffe (le personnage) est si l'on ne lit pas la pièce d'un point, de vue moral, le joueur absolu, il est en quête de liberté totale, n'obéissant qu'à ses désirs.
Il organise les transgressions dont il a besoin pour arriver à ses fins.
C'est une figure dionysiaque, pulsionnelle, ultra consciente du contexte qui l'entoure.
Il faudra une joueuse de son calibre, Elmire, pour augmenter le jeu, révéler l'envers du décor et provoquer l'exorcisme.
Je pense devoir fuir le numéro d'acteur,
Je pense devoir rechercher la transe. »  Guillaume Bailliart

Il existe en revanche une captation du Tartuffe de Molière dans la mise en scène de Stéphane Braunschweig que je vous invite à regarder en entier: Tartuffe de Molière