vendredi 20 octobre 2023

Approfondir la question de la nudité au théâtre: Introduction (1) ( réflexion prolongée sur la nudité de l'acteur dans Richard III d'Ostermeier)

 Ecoute d'une émission de radio:La nudité: danser nu, jouer nu 58mn

 

 

Découpage de l'article Nudité au théâtre pour en faciliter la lecture:

L’être humain est le seul à pouvoir être dénudé, différence avec l’animal
vêtement  =signe la sortie de l’état de nature. Souci de la parure, pudeur, jeu de voilement/dévoilement, scandale au croisement de l’esthétique et de la morale, normes, codes
Pour l’acteur et l’actrice, la nudité en scène est une condition de jeu toujours possible, très sollicitée par les metteurs en scène depuis les années 1990. Quand elle est gratuite et galvaudée, elle agace. Quand elle est justifiée par un propos de mise en scène, elle bénéficie d’une bonne réputation: générosité, disponibilité totale à son art, maîtrise du regard sur soi et lâcher-prise. La nudité devient garante d’authenticité et de vérité.
Pas costume comme un autre Le dévoilement de son intimité devant un public n’est jamais banal et on constate qu’un certain coût psychique, voire social, doit souvent être acquitté tôt ou tard par l’acteur nu.
De quels outils se doter pour s’y préparer? L’acteur reste celui qui peut décider in fine de la pertinence de son dénudement. Il lui faut penser sa nudité pour l’endosser ou s’y soustraire. En comprenant ce qu’elle recouvre ̶ses codes, sa polysémie, ses enjeux ̶l’acteur augmente son potentiel expressif, ses  moyens de contrôle et donc de lâcher-prise.

Plusieurs questions méritent d’être approfondies par un acteur-créateur pleinement engagé dans son art et soucieux du sens de ses actes. Ainsi que signifie la nudité en scène? D’autres scènes que celle du théâtre peuvent-elles nous instruire sur le potentiel esthétique de la nudité? Quelles conventions sous-tendent la mise à nu du comédien? La nudité scénique peut-elle être vécue par l’acteur et reçue par le spectateur sans référence à la nudité réelle de l’espace privé et public, sans être influencée parla nudité médiée et représentée? La nudité est-elle un risque pour l’acteur et sur quel(s)plan(s)? Le coût psychique et social de la nudité pour l’acteur peut-il être sublimé?

La nudité frontale, intégrale, s’est installée régulièrement sur les scènes du théâtre public dès la fin des années 1990, atteignant un pic, et provoquant quelques scandales publics quand elle était accompagnée de gestuelle sexuelle et/ou scatologique, dans les années 2000. Un processus de normalisation s’est opéré dans les années 2010, faisant émerger des conventions tacites, une sorte de bienséance de la nudité à la française. En fait, le scandale arrivait d’ailleurs, inspiré par des artistes venus de la performance, de scènes du nord de l’Europe moins attachées que la France à une culture du haut du corps (Belgique, Allemagne) et par une nouvelle danse contemporaine dégagée de la sacralité du corps. Ces nudités subversives, prosaïques ou conceptuelles, parfois charnelles, ont été perçues comme des œuvres provocatrices par le grand public et la critique, et reçues avec scepticisme par une grande partie de la profession théâtrale en France. Leur esthétique n’a pas perduré. A contrario, la nudité réaliste et érotique de l’écran ne fonctionne pas davantage comme référence pour la scène. Que sont ces nudités radicales que le théâtre évite, et pourquoi?