Se souvenir des problèmes dramaturgiques que posent la scène du Seder et la fin de la scène 6 à partir des souvenirs du cours de pratqiue de lundi dernier:
- "les collisions temporelles": Léah et Wahida sont à Jérusalem à la scène 6 dans la maison de Léah et le récit du Seder par Wahida va faire retourner à NY. Comment organiser au plateau le passage d'un espace et d'un temps à l'autre? Où situer les deux personnages de Léah et Wahida? cf la didascalie p34 " Au milieu d'eux, Wahida entraîne Léah dans le récit"
-la question de la scénographie: mobilier,accessoires et costumes: le Seder une fête juive. Quels signes de judaité?
-La question des différentes langues utilisées dans la représentation alors que nous partons du texte en français.
- la façon de jouer des différents acteurs.
Revoir toute la scène Captation
(à partir de 41mn)
Tous des oiseaux, texte et mise en scène de Wajdi Mouawad, La Colline – théâtre national, 2018
Distribution: . David (Raphael Weinstock), Leah (Idit Teperson), Etgar (Rafael Tabor), Norah (Helene Grass), Eitan (Jérémie Galiana), le Rabbin (Victor de Oliveira) et Wahida (Nelly Lawson)
Dans les scènes 6 et 7 (Wajdi Mouawad, Tous des oiseaux, Montréal/Arles, Leméac/Actes Sud, coll. « Babel », 2019, p. 33-37), Wahida raconte à Leah un événement passé : le repas du Seder, lors duquel Eitan a annoncé à sa famille qu’il aimait la jeune fille.
Donne à voir les deux actions qui se déroulent de manière concomitante : le récit de la soirée et la soirée elle-même.
La scène du Seder repose sur un procédé d’écriture récurrent dans la
création mouawadienne, procédé que l’artiste nomme les « collisions
temporelles » (Wajdi Mouawad, « Compagnon », in Sylvain Diaz,
Wajdi Mouawad, Avec Wajdi Mouawad. Tout est écriture, Montréal/Arles,
Leméac/Actes Sud-Papiers, coll. « Apprendre », 2017, p. 37).
Celles-ci consistent dans l’entrelacs de divers espaces-temps dans l’ici et
maintenant de la représentation. ( Amusez -vous à chercher d'autres scènes qui contiennent une collusion temporelle.)
Wahida et Leah, qui se trouvent en Israël, se voient projetées à New York. Elles assistent à un repas passé, qui s’est déroulé avant l’attentat et le coma d’Eitan. L’une comme l’autre étaient en réalité absentes de ce dîner : Leah, qui avait coupé les ponts avec sa famille, ignorait qu’il avait lieu, tandis que Wahida était restée au seuil de la porte de l’appartement, sans jamais oser la franchir.
Les personnages partagent le même espace concret, le plateau, mais ils appartiennent, en fait, à des géographies et des temporalités distinctes.
Solutions au plateau: deux espaces scéniques différents délimités par des éclairages différents et alternés. Jeu sur la couleur des éclairages avec des filtres, passage par des fondus au noir.
Mais la didascalie indique que Léah et Wahida vont se trouver au milieu des autres personnages pendant le Seder. Lorsqu'on regarde la captation, le passage de la maison de Lah à la pièce américaine où se déroule le Seder est mis en scène par Wahida fin de la scène 6: elle enlève son imperméable de voyage, laisse apparaître la robe rouge qui symbolise, l'amour , la passion. Puis une musique de tango se fait entendre avec les mêmes connotations et wahida se déplace langoureusement pendant que les comédiens qui jouent dans le Seder installent la table et les accessoires dans une atmosphère sereine et tendre. ( nombeux gestes affectueux de l'un à l'autre). Wahida se pose à cour, formule son nom, il ya un temps et une bascule d'éclairage sur la table et Norah fait comme réagir sur le mot en crachant le nom de Wahida exagérant haineusement la prononciation arabe de ce nom.
La distribution des langues :
Voici ci-dessous un extrait du carnet de Valérie Nègre, assistante à la mise en scène pour ce spectacle.
Il correspond à un passage de la scène 7 (Wajdi Mouawad, Tous des oiseaux, Montréal/Arles, Leméac/Actes Sud, coll. « Babel », 2019, p. 40).
Ce document présente le texte français (colonne n° 1), accompagné de ses différentes traductions : en allemand (colonne n° 2), anglais (colonne n° 3) et hébreu (colonne n° 4). Il attire notre attention sur l’importance du choix des langues dans la mise en scène. Celles-ci font partie intégrante de la dramaturgie. La querelle du père et du fils se manifeste notamment par le fait qu’ils ne s’expriment pas toujours dans la même langue. David ne supporte pas qu’Eitan s’adresse à lui dans « la langue des bourreaux » qu’est pour lui l’allemand (Wajdi Mouawad, Tous des oiseaux, Montréal/Arles, Leméac/Actes Sud, coll. « Babel », 2019, p. 41). Il conviendra de mesurer que le choix des idiomes, loin d’être anodin, dit quelque chose des relations qu’entretiennent les personnages.Les traits turquoise (en haut à gauche de chaque réplique) indiquent les langues qui ont été choisies. Valérie Nègre a indiqué en violet une transcription phonétique du dernier mot prononcé en hébreu par David (« Bassar Vadam », « Yehudi »). On repère également quelques indications de mise en scène au crayon : « Eitan se lève », « Eitan se rassoit », « David touche Eitan », ainsi que quelques schémas indiquant la position des personnages. À la cinquième réplique, Eitan et David se font face ; à la huitième, Norah est dos au public lorsqu’elle prononce la sienne.
Costumes : Lors d’un entretien, la
costumière Emmanuelle Thomas est revenue sur son travail pour la scène du
Seder : « Il fallait souligner le caractère solennel de la scène. Les
murs gris me permettaient de mettre des couleurs claires et foncées. J’ai
choisi le noir et blanc. Etgar est dans les tons de bleu, avec un gilet pour
souligner le fait qu’il est plus âgé et aussi moins rigide par rapport à la
religion. Le fait que tous les personnages soient dans des noirs et blancs
renforce l’étrangeté de Wahida, elle dérange, elle est différente. Le rouge
aussi est souvent associé à la passion, l’amour. Elle est là, source de
conflit.
À travers ce spectacle, Wajdi Mouawad a cherché à plonger dans un quotidien, des rites et des coutumes qui lui étaient totalement étrangers : « J’ai envie d’écrire et d’aimer les personnages de Tous des oiseaux, ceux d’une famille israélienne, des Juifs, ceux-là, justement, que, pendant des années, enfant, on m’a appris à haïr. » (Extrait du programme de salle 2017 de La Colline – théâtre national).
Le passage se situe à New York, lors du Seder, le repas de la Pâque juive. La présence du Rabbin signale le respect des traditions.
Pessah, la Pâque juive, commémore l’Exode, événement fondateur du peuple juif lors duquel celui-ci quitte l’Égypte, terre de servitude, pour accéder à la liberté.
Le repas traditionnel s’ouvre sur le récit de l’Exode ou Haggadah. Lisez l’extrait de la Haggadah proposé par Beth Hillel, la communauté israélite libérale de Belgique (p. 10, « C’est parce que nous avons été les esclaves de Pharaon […]. Et plus on en parle, plus on mérite de louanges. ») et repérez comment l’auteur-metteur en scène s’en est inspiré pour écrire cette scène.
La Pâque juive sert de toile de fond à la dispute familiale. Alors que « Seder » signifie « ordre » en hébreu (traditionnellement, le repas se déroule selon un rite très précis), le dîner sombre dans le chaos. Au milieu de cette querelle, le Rabbin tente de rappeler la tradition à la famille qui s’entre-déchire.
La judéité est manifestée par la présence du rabbin qui psalmodie la prière ,par les deux livres saints que tiennent le rabbin et David, et par le port de la kipa pour les trois hommes de la famille.
Les vêtements sont sobres dans des tons de gris bleu, costumes pour les hommes , élégante robe noire et perles pour Norah, bourgeoise allemande. Sur la table, des verres, de l'eau, des couverts, un peu de vert à identifier, mais pas les nourritures rituelles qui composent le Seder.
Scénographie : maquette que je n'ai pas montrée en cours:
Voici une photographie d’une maquette préparatoire à la scénographie du Seder (scène 7), suivie d’une photographie de la reprise du spectacle, en 2018.
Il faut bien faire la différence entre les sous-titrages de la captation et le stextes projetés lors de la représentation pour traduire les langues utilisées dans la fable. La place du texte a été longuement discutée avec le scénographe Emmanuel Clolus pas trop heut ni trop bas, dans la scène un peu comme les bulles de BD.
La scène du Seder commence par la réplique de Norah, qui semble presque vomir le nom de la jeune fille (« Wahida ?! »), au moment où celle-ci termine le récit introductif qu’elle adresse à Leah, et, à travers elle, aux spectateurs. La transition est minutieuse : la mère reprend le dernier mot de sa réplique, comme si elle lui répondait, alors qu’en réalité, la narration de Wahida est postérieure au repas de famille. La projection dégoûtée du nom coïncide avec l’arrêt de la musique. Le changement d’éclairage fait résonner le silence concomitant. La lumière s’intensifie comme pour signifier le choc provoqué par la révélation d’Eitan.
La table est l’élément central de la mise en scène. Alors qu’elle devrait réunir les différents membres de la famille autour d’un repas festif, ce meuble met en évidence les tensions qui les séparent. La vaisselle, sobre et élégante, indique le rang aisé des personnages. Plusieurs accessoires renvoient à la tradition juive : la kippa portée par les hommes, les livres de la Haggadah que détiennent David et le Rabbin (soulignant le lien étroit de ceux-ci avec la religion). Au premier plan, enfin, la chaise vide, signale l’absence de Wahida et son impossible intégration à la famille d’Eitan.Le mobilier par ailleurs est basique: chaises de collectivité, nappe sorte de drap blanc.
Jeu des acteurs très engagé physiquement: David montre son hostilité en ne s'asseyant pas face aux autres mais face public, en se redressant de façon crispée, en enlevant la kippa quand il n'écoute plus la prière et s'en prend à Eitan. Les répliques de Norah s'accompagnent d'une gestuelle précise pour souligner les paroles. Les déplacements sont significatifs: geste de tendresse du grand-père à l'égard d'Eitan, colère de david qui se redresse et bouscule la table, Norah tiraillé entre son mari et son fils qui fait le geste des poings liés, dispute très forte: ça gueule, le père et le fils en viennent aux mains et se parlent sous le nez. accablement du rabbin qui à la tête baissée sur ses mains jointes. beaucoup de précision dans les adresses les uns aux autres...
Léah et Wahida sont toujours sur scène, mais pas toujours visibles dans les plans de la captation. Elles ne sont pas en position neutre fantomatique mais regardent les autres personnages par exemple tendresse de Léah à l'égard de david qui dévoile que malgré ses dires à la scène 6 elle l'aime toujours comme un fils, Wahida est parfois très proche d'Eitan.
Quand la dispute aura fait éclater la tablée à partir de P47 Léah DE quel hasard il parlait? elles sont assisses toutes les deux au milieu de la table et regarderont Eitan ramasser le scouverts pour effectuer les tests ADN.