Le monde juif dans Tous des Oiseaux
Pour l’auteur raconter l’histoire d’une famille israélienne, c’est adopter le point de vue de l’Autre.
Comme l’oiseau amphibie, il s’immerge dans un univers étranger, voire opposé.
« Les personnages dit-il sont des juifs, ceux là, justement, que, pendant des années, enfants, on m’a appris à haïr ».
a) Le Seder
C’est lors du Seder, le repas de la Pâque juive, qu’Eitan annonce à sa famille qu’il aime ou Wahida ( p 34)
Traditionnellement, la soirée se déroule selon un rite bien précis, Seder signifiant « ordre » en hébreu.
On commence par chanter le récit de l’exode ou Haggadah. C’est ce que tente de faire le rabbin page 36. Mais il est totalement dépassé par la querelle familiale.
Traditionnellement le Seder se poursuit après le récit de l’exode par le repas à proprement parler, sous forme de question réponses ( questions posées par les enfants) composé de divers aliments rituel parmi lesquels, l’afikomen.
b) L’Afikomen
Sur le plateau du Seder trône généralement la matsa, le pain azyme.
C’est l’aliment le plus important du Seder. Il rappelle que les hébreux furent contraints de quitter précipitamment l’Égypte sans avoir le temps de lever la pâte qu’ils avaient préparée.
Pendant le repas, le maître de cérémonie casse la matsa en deux, rappelant que Dieu a fendu la mer en deux afin de permettre à son peuple de la traverser.
Une partie de la matsa est réservée pour l’afikomen qui signifie dessert en hébreu.
Dans certaines familles on cache l’afikomen pour que les enfants s’amusent à le chercher et pour les aider à rester éveillés. Le père d’Ethan évoque le souvenir de cette tradition page 47.
Si le Seder évoque le passage de l’esclavage à la liberté, l’afikomen symbolise la part de soi-même que l’on perd ou à laquelle on renonce quand on est esclave. Le moment où l’on ingère ce fragment de pain représente le moment où l’on récupère la part de soi-même qui faisait défaut.
Selon la tradition, on consomme le symbole afin de l’intégrer spirituellement dans un geste qui peut rappeler la transsubstantiation chrétienne, c’est-à-dire la conversion d’une substance en une autre, et en l’occurrence, pour les chrétiens, la conversion du pain et du vin en corps et sang du Christ. L’évocation de l’afikomen a une valeur symbolique dans le texte. Alors que David est aveuglé par sa haine, il découvre brutalement à la fin de la pièce qu’il est arabe, cet autre qu’il déteste. La révélation le plonge dans la folie. Ayant appris la vérité sur sa naissance, il redevient un enfant page 120.
L’afikomen que David ne trouvait jamais devient une image de la lucidité retrouvée. Le personnage saisit enfin la vérité qui s’était toujours dérobé à lui. Le père voyait dans la facilité qu’Eithan avait de trouver ce fragment de pain une preuve de la supériorité de son fils (p66).
c) La Shoah
En hébreu Shoah signifie "destruction".
Depuis le génocide, le terme désigne la politique d’extermination des juifs par les nazis. Elle est mentionnée à de nombreuses reprises dans le spectacle.
Afin de persuader Eitan de sa responsabilité dans la transmission de l’identité du peuple juif, David lui rappelle les violences dont a été victime Etgar page 40.
La famille de Nora a subi un destin similaire. Elle l’apprend brutalement, son père lui ayant caché son appartenance à cette communauté page 99.
Le grand-père du rabbin qu’Eitan fait venir pour Seder est lui aussi une victime de la shoah
Eitan lui réduit l’holocauste à 46 chromosomes. Pour lui, l’unique transmission est génétique.
Etgar et Leah font allusion à cette extermination avec un certain humour. Ainsi répondant à Nora qui lui annonce qu’elle ne parle pas bien hébreu, la belle-mère réplique « ne vous en faites pas c’est réciproque, j’ai une haine profonde pour tout ce qui est allemand. Voiture, langue, gaz, trains et savons. Vous avez fait bon voyage ? » Page 57.
Edgar pour évoquer les difficultés rencontrées pour atteindre l’hôpital dit « il y en avait un à côté de moi, de mon âge il a dit : on nous conduit au four ou quoi ? On a rigolé » page 79.
d) Le Kaddish
Tous des oiseaux se termine par le Kaddish qu’Eitan prononce lors de l’enterrement de David. Le Kaddish des affligés est une prière récitée lors des enterrements. Selon la tradition juive, c’est le fils aîné qui doit qui doit le réciter pour son parent décédé. En yiddish, le fils aîné et même souvent appelé le Kaddish.
Malgré la douleur ,une certaine douceur émane de cette adresse au père. Il est rare avant cela que le fils appelle David" papa". Le fils se rapproche du père.
Il y a réconciliation, mais elle est brisée par la mort du parent.
« David ne peut pas s’asseoir avec les autres, c’est une chose consciente, voulu, il y a véritablement quelque chose qui est déchiré, séparé. »
« Terminer par le spectacle dans une complète harmonie était impossible explique l’auteur car le problème du Moyen-Orient n’est toujours pas résolu. Je ne me voyais pas résoudre quelque chose d’irrésolu ».
Mais il y a tout de même une réconciliation à la fin , et celle-ci se fait par la langue allemande dans le spectacle.