Scénographie et musique
Dans les didascalies, différence entre indications spatio-temporelles et atmosphères qui habitent le plateau.
Les didascalies sont à la fois instrumentales et modalisées, souvent ironiques : « folklore interchangeable » p. 28 et 51, « enseignes de dents géantes » p. 34, « bureaux aux allures de vaisseaux spatiaux » p. 47.
Ces didascalies posent la question de leur représentation. Écriture presque cinématographique, comme le déroulé d’un voyage avec des arrêts sur image à certains moments. Comment représenter la « petite route polonaise », qu’a-t-elle de particulier ? Faut-il la représenter ? Autant de questions sur la représentation des didascalies, également sur l’importance des titres des tableaux qui peuvent être abordées.
Certaines indications sont récurrentes : « lit simple, ordinateur, vêtements sales, tasses, cendrier », objets scéniques caractéristiques de la Fille.
Retour à l’Est et arrivée du folklore, VS les « non-lieux », les lieux standardisés de l’Ouest, la « modernité ».
Lieux en alternance, en lien avec l’heure : chambres d’hôtel la nuit (objets scéniques différents pour fille et père) – dans la voiture le jour. Huis-clos.
Ils ne sortent de la voiture que dans les didascalies virtuelles des Cata-strophes.
Après l’accident, peu de didascalies de lieux mais ils sont indiqués dans les titres : planètes. Tableau 22 : « le cosmos ». Les 6 derniers tableaux se situent dans espace galactique. Seule la dernière scène entre parenthèses donne une didascalie : « sur une planète inconnue ».
MUSIQUE :
Les indications musicales ne sont données que lorsque la fille est présente, seule ou avec son père.
Elle, seule dans sa chambre : bulle musicale.
Nirvana (1993), Placebo (2000), Max Richter (2012), DDT (russe, 1992), David Bowie (2002), Bashung (1998), Vissotsky (chanteur russe, 1968 et 1977), Christian Scott (2007) : essentiellement des musiciens britanniques, français, allemand ou américains (pop rock, new wave, musique électronique) des années 1990-2000 ; deux Russes se détachent du lot, dont un chanteur à texte des années 70.
Les musiciens russes n’apparaissent que lors du voyage dans les pays de l’Est. Rapport au père ?
(p. 26) « FILLE. Je peux mettre de la musique alors ?
PÈRE. Je préfère pas. J’aime pas quand je comprends pas les paroles. »
Pour la série de tableaux intergalactiques Gustav Holst (compositeur anglais 1874-1934) avec The Planets, un ensemble de morceaux entièrement symphonique qui dure près de 54 minutes.
Une chanson russe (p.59-60) et une de Gainsbourg (p.87-88, dans l’espace intergalactique) chantées par le père dans le texte lui-même.
La chanson de Gainsbourg sert de base à la transposition en musique d’un texte, dit par Eltsine, le premier – seul ? – président russe élu démocratiquement, post-URSS, pré-Poutine. Skalova mêle ainsi la grande et la petite histoire. Les adieux d’un homme politique et ceux que chante Gainsbourg dans sa chanson. En filigrane, on y lit aussi les adieux du père à sa fille…
NB : le père n’écoute donc, et ne dit/chante, que des chansons dont il comprend les paroles, en Français ou en Russe.
Lien à la petite et grande histoire aussi par le rock, que ne connaît pas et ne comprend pas le père. (p. 26)
Mais le jean, symbole vestimentaire du rock, est un objet désiré par le jeune père. (p. 58)
Homme pétri de ses contradictions.
Tout comme la fille.
Toutes
ces chansons, ces musiques, posent la question de la temporalité des
tableaux et plus généralement de la pièce. Parfois les paroles ne sont
pas dans l’ordre chronologique de la chanson (ex : Placebo), les
chansons sont en lien explicite avec ce qui se déroule dans le tableau
(absence de sommeil, question de la drogue, les planètes etc.) Malgré
les instructions données en préalables dans les didascalies, la manière
d’incorporer la musique à tout ceci reste très libre, mais renforce
également le côté cinématographique – avec des émotions soulignées par
la musique. ( d'après documents fournis par le TNS)