dimanche 6 juin 2021

Textes utilisés pour la séance du 4 juin ( Suite) Julia et Marylou

 

Un extrait de S'embrasent (Luc Tartar)

- Jonathan sexuellement il fait mouiller tout le monde. Les filles les garçons les profs et même le proviseur. Tu le croises dans les couloirs c’est comme les chutes du Niagara. Tu transpires tellement t’en peux plus. Il est beau et ses yeux des étoiles des éclairs des petites pointes trempées dans le curare qui te chatouillent la peau tambourinent à ta porte et pénètrent ton cœur. Un regard et je me paralyse. Je bous. Je mouille. Une vraie cocotte

- Chaud devant

- Jonathan sexuellement il l’a fait avec Sophie Isabelle Dorothée Ludivine Jean-Baptiste mais pas avec moi

- Jonathan sexuellement il a rien fait du tout

- Avec Latifa crois-moi il avait pas sa langue dans sa poche

- Tu les as balancés

- Sophie Isabelle Dorothée Ludivine Jean-Baptiste mais pas moi

- Jonathan sexuellement. Faites passer

- J’ai pas écrit ça

- Texto

- Jonathan sexuellement il nous en fait baver. Il se tient dans la cour droit il fait rien juste que respirer le corps alangui ouvert au monde et ça nous fait trembler. Les feuilles les arbres le sol ça fait trembler nos bases on oublie tout ce qu’on a appris les conseils de maman « Suis pas les inconnus » on tremble sur nos bases et hier ce qui devait arriver Latifa s’est écroulée

- On dit tomber amoureux

- Elle a chuté de sa hauteur

- C’est un éblouissement des sens. Latifa tombe en arrière le crâne lourd des promesses d’un regard échangé. Latifa vient d’arriver et les nouvelles vont vite. On lui dit « Jonathan sexuellement » elle le croise dans la cour et direct c’est un coup de foudre qui la secoue et qui lui offre en prime un ticket pour le bonheur. Latifa s’abandonne à l’avenir tombe en arrière et entre dans l’inconnu. Et lui Jonathan se retourne et la rattrape au vol. Ma parole c’est un ange. Bouge à la vitesse grand v. La recueille dans ses bras l’étreint légèrement et l’embrasse. Leurs corps s’entremêlent – une main ici un pied là. On dirait qu’ils vont tomber. Mais non. Ils s’embrassent. Et nous on se demande comment ça marche. On fait cercle autour d’eux. On voudrait comprendre. La gravité. La pesanteur. Ce corps à corps insensé et nous dans les cordes. Venir au monde. Tenir debout. Franchir un à un les obstacles se croire invincible et découvrir le vrai sens de la vie dans un baiser de cour de lycée. Maman. Papa. Tout s’écroule. Moi aussi je tombe. Et personne pour me rattraper

- Je trébuche je m’évanouis je m’étale ce baiser me fait mal s’insinue dans mon ventre se blottit dans ma tête et m’empêche d’avancer. Je me fais des films des histoires d’amour qui me cueillent au réveil qui me boostent et m’aident à passer la journée mais aujourd’hui patatras Jonathan embrasse Latifa et comment tenir debout après ça

- Les amants eux font leurs premiers pas. Traversent la cour sous nos yeux ahuris et passent la grille. La scène est vécue en direct par tout le monde. Les filles les garçons les profs et même le proviseur. Quelle veinarde cette Latifa. Elle a trouvé chaussure à son pied. Elle marche. Elle et son Roméo de l’autre côté de la rue. On en reste bouche bée

- Et le proviseur

- Tête baissée. On dirait qu’il s’incline devant tant d’évidence ou qu’il cherche quelque chose à dire. Là. Une trace de pas laissée par Jonathan. Puis il lève des yeux rouges de colère et s’écrie « Au voleur »

- Au voleur

- A moi. Ma réputation ma carrière mon autorité mon règlement intérieur et mon conseil de discipline

- Et moi je dis : A moi mes illusions. A moi mes rêves d’enfant. Mes leçons mes devoirs mon quatre heures. A moi mon for intérieur ma vision du monde et mes perspectives d’avenir. A moi la vie. Quinze ans d’apprentissage des choses du monde et aujourd’hui mon cœur se tord. Jonathan aime Latifa. Et moi alors