Pour votre carnet de création:
Notes prises sur son livre Le Comédien Désincarné dont Sandrine a lu un extrait: Le Comédien désincarné Louis Jouvet
Conférence de Louis Jouvet en 1951 De Molière à jean Giraudoux.
Louis Jouvet professeur au Conservatoire : une mine de leçons de théâtre données par Jouvet sur un site qui lui est dédié.
Enregistrement audio de L'Ecole des femmes avec Louis Jouvet dans le rôle d'Arnolphe
Ce que Louis Jouvet pense de Tartuffe qu'il a incarné et mis en scène:
LOUIS JOUVET : UN TARTUFFE HUMAIN AVANT TOUT.
Le
Tartuffe de Louis Jouvet s'est joué au Théâtre de l’Athénée
en
1950. Sa façon de concevoir Tartuffe permet une nouvelle
lecture de cette œuvre. Il est en césure avec les
interprétations
traditionnelles qui le décrivent comme «
porc
lubrique, un gibier
de potence, tantôt jésuite (par sa doctrine), tantôt
janséniste
(par son emportement contre l’ajustement des femmes)...,
un
truand de sacristie, un grotesque,un hypocrite de la luxure ». Jouvet cherche l'humanité chez
Tartuffe.
Cet imposteur devient, aux mains de Jouvet, un homme amoureux d'une jeune femme qui ne
cherche simplement qu'à la séduire. Il explique ses
intentions
dans « JOUVET, Témoignages sur le
théâtre » des éditions Flammarion :
« Je
ne crois pas à une pièce ni à une mise en scène qui ne
sont pas conçues avec le désir de présenter un peu plus que l’homme de chaque jour, un peu plus que
ce que nos oreilles peuvent entendre, un peu plus que ce que nos
yeux peuvent voir.
« Tartuffe
ne fait qu'accepter ce qu'on lui offre ».
Ce procès-verbal est faux. Je défie le juge d'instruction
le plus
subtil de pouvoir trouver, au début de la pièce ou même au cours
de l'action, « les sourdes menées» de l'intrus et le « triple
danger » qui va fondre sur la maison : «l'aventurier voudra
épouser la fille, séduire la femme, dépouiller le mari. »
D'ailleurs, pourquoi Tartuffe serait-il un aventurier? Il était pauvre et mal vêtu lorsqu'il vint chez
Orgon, ainsi que le dit Dorine ? Il n'y a à cela rien d'infamant. Son comportement
à l'église est peut-être l'indice d'une grande piété. Pourquoi Orgon
ne serait-il pas séduit par un homme qui n'accepte que la moitié
de ses dons, et distribue l'autre moitié aux pauvres
? Est-ce la
puce que Tartuffe tue avec trop de colère qui vous paraît une
tartufferie ? Il y
eut un saint nommé Macaire qui, lui aussi, tua une puce en
faisant sa prière, et fit neuf ans de retraite dans le désert ; après quoi
il fut canonisé. Où prend-on que Tartuffe veut épouser Mariane ?
Il le dit : ce n'est pas le bonheur après quoi il soupire. Il est amoureux
de la femme. Julien Sorel est amoureux de Mme de Rênal. On n'en
fait pas un monstre pour autant. Pourquoi dire qu'il veut dépouiller Orgon
? C'est
Orgon qui, dans un
élan
de tendresse, sans que Tartuffe ait rien sollicité, veut lui
faire une
donation entière : «Un bon et franc ami que pour gendre je
prends, – M'est bien plus cher que fils, que femme et que parents.» Tartuffe ne fait qu'accepter ce qu'on
lui offre.« Les enfants luttent, guidés par la servante et l'oncle. »
Il n'y a pas de lutte ; du moins, la lutte est vite terminée. Orgon, sur le
simple soupçon que Damis a faussement accusé Tartuffe – sans que
celui- ci intervienne –, chasse son fils, avec sa malédiction, et
invite sa fille à mortifier ses sens avec son
mariage. Quant à
la scène « hardie et forte »
du quatrième acte, où Elmire
cache son mari pour le rendre « témoin
et juge des criminelles entreprises de Tartuffe », relisez-la avant que
d'en parler : Elmire provoque Tartuffe, lui parle «
d'un coeur
que l'on veut tout » et lui déclare qu'elle
est prête à se rendre. Je sais bien que c'est pour démasquer l'imposteur,
mais qui ne se laisserait prendre à ce jeu lors qu'il est amoureux
? Et que Tartuffe, bafoué dans son
amour et – ce qui est pire – dans son amour propre, se venge d'Orgon
avec les armes qu'il a, c'est humain plus que monstrueux. »