mercredi 25 janvier 2023

Delta Charlie Delta de Michel Simonot ( nouveau projet seconde)

 Version radiophonique ( 42 minutes)

Michel Simonot est homme de théâtre, écrivain et metteur en scène. Il  a écrit une vingtaine de textes tous portés à la scène. Il a mis en scène des textes de Katherine Mansfield, Max Frisch, Heiner Müller, Jean Jourdheuil, Armand Gatti, Philippe Malone Il est membre du groupe d’écrivains Petrol, avec Lancelot Hamelin, Sylvain Levey et Philippe Malone. Il dirige le festival Bruits Blancs, avec le compositeur et metteur en scène Franck Vigroux, dont il est le dramaturge. Il est également  dramaturge auprès d’Annabelle Playe, compositrice, musicienne et chanteuse. Il est actuellement en résidence à Anis Gras (Arcueil). Il a été artiste associé au Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis (Centre Dramatique National), adjoint au conseiller de programme fictions de France Culture, dirigé ou codirigé des établissements artistiques et culturels. Universitaire et sociologue il a publié sur l’écriture et la scène et les politiques culturelles. Dernièrement : La langue retournée de la culture (éd. Excès. 2017).

 
I. Le texte

1. RÉSUMÉ

Un soir d'octobre à Clichy- sous-Bois trois enfants, Bouna 15 ans, Zyed et Muhittin, tous deux 17 ans, courent parce que la police court derrière eux. Ils se réfugient dans un transformateur. Un policier voit, n'alerte pas. Ils sont électrocutés. Deux enfants meurent. Un survit. Des semaines d'émeutes, de révoltes s'ensuivent. Deux policiers sont mis en examen.
Dix ans plus tard, un tribunal reconstitue les faits - heures, minutes, secondes, voix enregistrées de la radio de la police. Dix ans plus tard, le survivant est encore et toujours celui qui porte dans sa peau les deux enfants morts, celui dont on ne parle pas, celui qui fait face à la police, celui que l'on interroge. Comme une tragédie jamais achevée.


2. PRÉSENTATION

Ce texte est écrit en écho à l’événement survenu en octobre 2005 à Clichy-sous-Bois.
Zyed, Bouna et Muhittin sont poursuivis par la police. Ils se réfugient dans un transformateur
électrique où deux d’entre eux meurent électrocutés. Le soir même, des émeutes se déclenchent et gagnent plusieurs pays d’Europe. Suivront trois procès des policiers qui avaient poursuivis les enfants alors qu’ils revenaient d’un match de foot.

« J’étais à l’époque artiste associé au théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis, le directeur qui était Alain Ollivier m’avait demandé de faire un travail, une création, une écriture avec la ville enjeux. Et j’avais invité trois autres auteurs, jeunes, que je ne connaissais pas trop, Lancelot Hamelin, Philippe Malone, Sylvain Levey
, et nous avons commencé à écrire... Et au moment où nous sommes-là, à lieu cet événement, la mort de Zyed et Bouna, électrocutés, qui déclenche les émeutes là-bas, puis dans toute l’Europe.
Et nous, nous faisons un texte qui donne d’ailleurs une publication, qui reprend un peu le climat de l’époque ; L’extraordinaire tranquillité des choses
, comme le dit le titre. (...)
Et moi, cette histoire de la mort de Zyed et Bouna m’est resté, c’est marquant, on était au milieu des émeutes là-bas. Je savais qu’un jour j’écrirai dessus. (...) En 2015, j’apprends que le procès a lieu, et j’apprends qu’il y a un survivant, qui est là pour témoigner. (...) »

Michel Simonot, Extrait de l’entretien accordé à ARTCENA


Après L’extraordinaire tranquillité des choses, Michel Simonot décide donc de poursuivre
l’écriture en 2015, au moment du troisième et dernier procès des policiers impliqués dans la mort des deux adolescents. Pour cela, il déploie un processus d’écriture original en écrivant à partir de sources de seconde main, à savoir les tweets des journalistes qui relatent le procès en direct.
Durant les trois jours que durent le procès, il archive ces tweets, matière première qui constitue les faits établis, et permet ensuite à l’auteur de « déborder » et d’imaginer ce qu’on vécût ces adolescents avant et après le drame.

L’auteur précise à l’issue du texte que le matériau de l’écriture s’appuie sur « les tweets de Willy le Devin, Juan Branco, Simon Gourmellet, Marie Barbier, Pascal Robert-Diard, et d’autres, publiés en
direct relatant le dernier procès de Rennes en mars 2015 ». Par ailleurs, « les faits repris dans ce texte reprennent les informations provenant de tous les articles de quotidiens et d’hebdomadaires, les reportages télévisés, les sites Internet ayant traité de l’affaire. Les faits datés dans les parties « tribunal » relatent des faits rapportés par les journalistes présents et par la presse lors du procès de mars 2015. Le reste du procès relève de la libre fiction poétique ».
Dans une écriture concise, précise et ciselée et poétique, Michel Simonot évoque, suggère une vérité sans jamais chercher à la raconter. Dans un rythme qui rappelle celui de la sphère
médiatique, le texte provoque chez le lecteur-spectateur un sentiment d’urgence et d’empathie pour les trois adolescents que l’auteur nomme non pas « victimes », mais « vaincus ».

L'auteur parlant de sa pièce sur le site Théâtre Contemporain