Après avoir pratiqué le théâtre forum dans un premier projet, les élèves de l’option facultative théâtre en seconde se sont vu proposer l’adaptation d’ une pièce de théâtre contemporain à la très forte dimension engagée, Delta Charlie Delta, de Michel Simonot.
27 octobre 2005, à Clichy-sous-Bois, trois jeunes adolescents rentrent chez eux : Zyed, Bouna et Muhittin. Ils se mettent à courir, parce que la police court derrière eux. Ils se réfugient dans un transformateur électrique. La police ne signale pas le danger, n’alerte personne. Au bout de quarante minutes, deux des adolescents meurent, un survit, gravement brulé. Des semaines de révoltes sociales se déclenchent, gagnant rapidement d’autres banlieues. Le gouvernement déclare alors l’État d’Urgence, la première fois depuis la guerre d’Algérie. Dix ans plus tard, un tribunal reconstitue les faits et le survivant prend la parole...
Le texte de Michel Simonot ne relève pas du théâtre documentaire à proprement parler, poétique, musical, écrit pour un chœur d’acteurs qui met les faits en perspective, il donne la parole à tous, aux morts, au survivant, aux adultes impliqués lors du procès, mêlant réalité et fiction. Il ne vise aucun sensationnalisme, se transforme en une sorte d’enquête qui égrène le temps minuté de la fatalité en marche. Sur la base d’un témoignage, celui d’un employé des pompes funèbres qui dit voir des jeunes courir, « autour d’un cabanon / quelque chose de louche », la radio de la police envoie des hommes sur place : « des enfants en train de voler, allez-y ». Glissement de formulation, donc de sens, d’une présomption incertaine à une accusation définitive. Un simple quiproquo à l’origine, - à l’issue mortelle.
Avec Emilie, les 17 élèves de l’option ont mis en voix, en corps, en cris cette histoire vraie qui dans la pièce de Simonot devient une tragédie de la parole perdue : un policier a dit voyant entrer les enfants dans le transformateur « Je ne donne pas cher de leur peau », mais cette parole n’a pas résonné comme il fallait, n’a pas été entendue dans ses conséquences. Prise au sérieux, la parole est salvatrice –puisque le policier aurait pu sauver les enfants de la mort s’il avait pris conscience de ce qu’il disait, en prévenant les employés de la centrale électrique. Lancée en l’air, elle devient un rouage terrifiant d’une tragédie qui aujourd’hui encore scandalise.
Christine Huckel-Ottenwelter
Avec BEN HASSINE Omaya, CAYROU Clarisse, DELEMER Achil, GRANDVUILLEMIN Maud, HERZOG-DAVID Aliénor , IBISHI Fjolla , KIZU KIABOKOLO Marina, KIZU, LAMNOUAR Larbi, LUDWIG Sarah, MONFRONT Margot, MONFRONT Margot, PATRAO ESTEVENS Diogo, PEUCH Basile, REHM Clara, SALIHI Adam, SIEGWALD Emile , TAZEGUN Rabia, THABTI Yousra