« Nous
sommes une communauté d’utopistes non autoritaires; même les pièces que nous
concevons
n’ont pas de
dessein ni de direction (au sens conventionnel de ces mots).
Que cela
vous plaise ou non, vous allez devoir
affronter un
assaut total de la culture.
Il n’y a pas
d’autre moyen de faire naître
un monde
libre et créateur: précipiter la révolution. » Julian Beck
En 1968, le
Living Theatre de Julian Beck et Judith Malina fait
scandale au
22eFestival d’Avignon. En effet, le
Living est invité
pour trois
œuvres au Cloître des Célestins, Antigone d’après un
texte de
Brecht, Small
Mysteries et Paradise Now... Le 24 juillet,
lors de la
représentation de Paradise Now, Julian Beck prône un
théâtre qui
doit “ sortir de sa prison” et envahir la rue. Après le
spectacle
déjà très “corsé” selon les observateurs puritains de
l’époque, un
défilé “débraillé” et contestataire s’improvise dans
les rues de
la ville festivalière, aux cris de “le théâtre est dans la
rue”. Dès le lendemain, le maire,
demande au Living de substituer
à son Paradise Now une des deux autres pièces de son
programme.
Paradise Now
entre dans
la légende.
Le Living
Théâter milite dès le début des années 1960 pour un
théâtre
engagé, impliqué dans le substrat social et politique. Sur
le terrain
de la contestation, ses armes sont la performance et
le
happening, pratiques révolutionnaires qui font du Living, en
réaction au
contexte politique des États-Unis et face à la guerre
du Vietnam,
un instrument radical au service de la liberté de
l’art comme
de la société. Le Living est anarchiste, rebelle et
non aligné.
Très influencé par le Théâtre de la Cruauté d’Antonin
Artaud,
comme par les théories révolutionnaires de l’époque, le
Living
s’inspire largement des modalités d’expression en œuvre
dans l’art
visuel, dont la performance ou le happening sont les
outils d’une
puissance de déflagration sans égale. Les idées
anarchistes
et pacifistes de la jeunesse américaine inséminent
leurs
spectacles et toute leur pratique de contamination de
l’espace
politique: en organisant des sit-in pour la Paix ou en
installant
le happening au cœur de la Cité, le Living conduit une
action
politique et artistique d’une rare acuité. Expulsés après leur
spectacle The Brig qui s’inspire des théories d’Artaud,
les membres
du Living
s’exilent en Europe où ils développent principalement la
performance
et le happening comme outils de propagation de leur
pensée
révolutionnaire.
En 1970,
après deux ans de tournée de leur Paradise Now dans
toute
l’Europe, le Living Theatre se sépare. Julian Beck et Judith
Malina
poursuivent alors séparément leurs propres recherches
formelles
jusqu’à la mort de Julian Beck en 1985