Dans son
livre Le Jeu verbal, Michel Bernardy
nomme avec justesse le processus de déchiffrage par l’acteur de la partition de
l’auteur : « Faute de sentir que la langue est à la fois proche et distante,
les jeunes acteurs brûlent généralement l’étape verbale, comme supposée connue,
pour passer au stade téméraire de l’interprétation. Les mots ne leur semblent
exister que pour être mémorisés au plus vite. Ils les consomment sans tenir
compte de leur substance, de leur énergie, de leur action réciproque. Ils
méconnaissent le maniement des phrases pour n’avoir pas envisagé l’énoncé dans
sa forme et dans sa vibration. Or, l’incarnation du verbe par l’acteur est une
opération privée qui sert de préalable à toute représentation théâtrale. Elle
suppose un accord parfait entre un texte écrit et la personnalité physique de
l’interprète avant la moindre intervention du metteur en scène. Tant que
l’écriture n’a pas trouvé sa respiration exacte, sa pulsation cardiaque, aucun
rendez-vous ne peut être donné au personnage. »
Robin Renucci