jeudi 5 février 2015

Les conditions de la représentation au XVIIème siècle

L'art du comédien au temps de Molière: une émission de France Culture

Les conditions matérielles du théâtre au XVIIe S
   Le théâtre français du XVIIe siècle se joue dans des conditions très différentes de celles d'aujourd'hui. Elles expliquent nombre de ses traits spécifiques, qu'on aurait tort d'attribuer à des choix purement esthétiques. Le théâtre de Cour ignore ces contraintes spatiales et financières du théâtre commercial public. 
Le système des troupes 
   Les troupes sont des associations d'acteurs, constituées pour un an devant notaire, sans recrutement en cours de saison, et se partageant les bénéfices des recettes et les dons des protecteurs. Elles doivent comprendre tous les types de rôles possibles, une douzaine en moyenne : deux couples de jeunes amoureux, un couple de parents, un couple de valets d'intrigue, un valet balourd et trois personnages pittoresques. Pour être jouable, une pièce doit correspondre à cette composition type. 

   En province, ces troupes sont itinérantes. Paris seul dispose de théâtres permanents, mais très peu nombreux. Les auteurs savent donc généralement pour quels acteurs ils créent des rôles. Se font concurrence une troupe italienne de commedia dell'arte, et les troupes de l'Hôtel de Bourgogne, du Marais et du Palais-Royal (dirigée par Molière), qui seront réunies en 1680 pour former la Comédie-Française. Elles suffisent étant donné la capacité des salles (plus de mille spectateurs) et la population : quinze représentations d'une pièce sont alors un triomphe.
Architecture et équipement des salles 
   Construites ou non dans des jeux de paume, les salles en adoptent toujours le plan rectangulaire, pourtant non prévu pour le théâtre. La scène, surélevée, en occupe une extrémité. 

   Les spectateurs sont répartis sur le reste de l'espace. Au parterre, sur le terrain de jeu d'origine, s'entasse le public populaire, debout et donc souvent turbulent. La bonne société est assise, soit dans des loges latérales, soit au fond de la salle, sur les gradins de l'« amphithéâtre ». Sur la scène même, des sièges sont réservés de chaque côté pour les spectateurs de marque, qu'on ne peut empêcher d'arriver en retard ou de perturber le spectacle. Dans de telles conditions, l'attention du public est difficile à conquérir.

   Le plateau, exigu, a une largeur utile réduite à six ou huit mètres. Pour cette raison, s'impose le modèle intimiste du duo et du trio entre maîtres au premier plan, doublés au second plan de leurs suivants. Les scènes historiques à multiples personnages sont rares car difficiles à mettre en scène.

   Le rideau de scène, s'il existe, ne peut être manœuvré. Les éventuels changements de décors se font donc à vue, ce qui brise l'illusion théâtrale.

   Les éléments de décor sont disposés sur les côtés et le fond du plateau. Ce sont de grands panneaux peints suivant les lois de la perspective pour augmenter l'impression de profondeur. Il existe trois systèmes : soit un lieu d'action et donc un décor unique, soit des lieux d'action multiples représentés soit simultanément, soit successivement avec changements aux entractes. Les acteurs apprécient évidemment l'unité de lieu, économique. Le public préfère les décors somptueux et animés des pièces à machines.

   L'éclairage est assuré par des chandelles. Il faut les moucher toutes les demi-heures, sous peine d'enfumer le public. C'est pourquoi les pièces sont obligatoirement divisées en actes, tous de la même longueur. Il est, de plus, impossible de plonger la salle dans l'obscurité pendant la représentation.