Un théâtre de la
complexité et de la perplexité
Pommerat :« Je passe mon temps à chercher le réel »
en réaction à la mention que son théâtre fait souvent surgir l’étrange :
mais il appartient au réel, à un réel complexe à multiples facettes.
Df. philosophiques du réel :
Rosset : « idiotie toujours déjà là et que l’on
tente de doubler d’illusions pour l’apprivoiser »
Bataille : « notre part maudite »
Lacan : « trou », « objet d’angoisse par
excellence, irréductible à toute symbolisation et qui ne finit pas de ne pas s’écrire »
Heiner Muller en 1970 : « on ne voit plus la
réalité, on voit de la réalité »
alors que Brecht croit encore à la capacité du théâtre à modéliser le
monde, à élaborer une représentation globale du monde, voie d’accès à sa
possible transformation.
Bernard Dort : « question qui hante le
théâtre, celle de son aptitude à représenter la réalité contemporaine, à mettre
sur scène le monde dans lequel nous vivons. »
Contexte de crise de la représentation dans lequel Pommerat
revendique d’écrire « un théâtre réaliste : mais différent du sens
traditionnel de réalisme, parti pris du
réel, quête du réel : défi esthétique et éthique pour appréhender le
réalisme à nouveaux frais.
Compagnie Louis Brouillard : Chercheurs
de réalités au pluriel
Equilibre entre réalisme et abstraction afin de capter le
spectateur : forme d’une pièce peut exprimer autant que le discours qu’elle
véhicule.
Question de la perception du réel ( par les personnages) et
de la réalité scénique (par le spectateur )au cœur de beaucoup de pièces .
Dans les contes se teintent de surnaturel, pas réalisme rationaliste, vers un « réalisme
magique ».
Écrire avec et à partir du réel en cherchant à
inventer des modalités de mises en visibilités théâtrales capables d’en exposer
les énigmes sans en réduire la complexité.
Pommerat : « Je
pense que dire le monde et sa réalité, c’est entremêler l’intérieur et l’extérieur »
Sens du réel de l’artiste = un don de voir : acuité d’observation
et capacité de témoigner de la société.
Théâtre = lieu possible d’interrogation et d’expérience
de l’humain » : nous permet d’affronter des situations qui dans la
vie nous terrasseraient ; il nous permet de faire retour sur ce qui
échappe au quotidien pour en percevoir les mécanismes. Invite à aiguiser notre
regard sur les autres et sur le monde. Pas recherche d’un jugement arrêté sur
le monde, mais dévoilement de la complexité : « je crois à la
complexité. Et je crois même que la complexité est une des définitions de la
beauté. La complexité ne me fait pas peur, la contradiction non plus, l’assemblage
des contraires m’attire. » in Troubles
Cf pensée du complexe du philosophe Edgar Morin :
révolution épistémologique : passage d’une science qui s’efforçait de
réduire le complexe en entités simples, closes et explicables à une
représentation de systèmes comme ouverts. Existences e logiques à
plusieurs valeurs, interférences, indétermination, aléatoire. Pas une mais des
réalités.
homme = entité
complexe, identité à la fois biologique, subjective, sociale. Pommerat ne
dissocie pas le monde social du monde mental et explore leurs multiples aspects.
Cf p 93
+Réalité fantôme : « quelque chose qui doit s’immiscer,
se glisser entre les lignes des gestes et des phrases prononcées, comme une
réalité fantôme bien plus présente, bien plus forte sous cette forme que si
elle était désignée par le texte ou par le jeu des interprètes » in Théâtre en présence
Déjouer les interprétations et représentations établies ;
fable pas « le bel animal
aristotélicien » selon lequel le drame est une forme structurée de façon
logique, vraisemblable, linéaire : chez Pommerat : dramaturgie plus équivoque, brouillée,
contradictoire mais dans un travail très organisé et scrupuleux : c’est d’une
manière sciemment organisée, à l’aide de procédés d’écriture précis et choisis,
que les spectacles de Pommerat produisent
de la perplexité et du trouble.