Deuxième
partie du programme : Cendrillon
de Joel
Pommerat
Comme cette pièce avait déjà été
montrée par les élèves de terminales des deux précédentes années
lors de la traditionnelle présentation de travaux, il a été décidé
en accord avec le partenaire artistique, le comédien Patrice
Verdeil, que la promotion 2016 travaillerait uniquement les scènes
qu'ils voudraient présenter au baccalauréat. Toutefois, les scènes
choisies par le groupe ont révélé une cohérence entre elles dans
la mesure où elles éclairaient le processus de deuil chez
Cendrillon en insistant sur le contexte familial dans lequel elle
évoluait. Le choix retenu a été de développer les rapports
entretenus par Sandra avec les autres et de montrer comment ils
éclairent le rapport complexe de la jeune fille à la mort de sa
mère mais également au refus d'être elle-même. Une seule scène
ne met la très jeune fille en scène et montre la relation
dominant/dominé qui est celle que le père et la belle-mère
développent. Le travail opéré a donc cherché à montrer comment
peu à peu Sandra reconquérait son identité, comment les autres
personnages l'ont aidée ou au contraire ont tenté de l'en dissuader
en la salissant verbalement et en la moquant.
Mais cette évolution du personnage
dans ce processus d'accouchement de soi devait s'appuyer sur un jeu
sincère et minimaliste, à l'image du parti pris de Pommerat.
Patrice Verdeil a demandé à ce que les élèves jouent au plus
« juste » en développant l'émotion dans certaines
scènes ou alors en soulignant les traits des sœurs ou de la
belle-mère pour en faire des « opposants » traditionnel
du conte dont toute la mesquinerie ressortirait, mais toujours dans
l'idée de ne pas en faire trop, le texte suffisant à exprimer les
petits bonheurs et les points de rupture des personnages. Jouer
« juste » sous-entendait dès lors, jouer au plus près
de la signification du texte. Un grand travail de compréhension de
l’œuvre a été fait en amont et a permis d'éclairer le sens de
certaines scènes. Par exemple, il y a eu débat autour de la
question de l'amour possible entre Sandra et le Prince mais
finalement, seule l'idée d'un « sauvetage mutuel » des
personnages a été retenue, le groupe trouvant que la dimension
amoureuse n'était pas un enjeu primordial dans ce texte.
A la première lecture, les élèves
ont d'emblée souligné la dimension comique du texte, il a donc été
décidé que lorsque cela s'y prêterait, cette dimension serait
rendue apparente et même soulignée. Ainsi, dans la scène de la
buanderie, les deux sœurs sont jouées par deux garçons qui mettent
en avant le fait qu'ils « jouent des filles »,
c'est-à-dire que cette scène marque un décalage et montre les deux
sœurs telles deux idiotes égocentriques mais également sadiques.
Il fallait montrer le véritable visage de ces filles mais aussi
montrer leur violence.
Un réel travail dramaturgique a donc
été opéré sur la recherche d'un jeu traduisant une vérité chez
les comédiens, comme le préconise d'ailleurs Joël Pommerat. Il a
fallu aux élèves qui incarnaient Sandra désapprendre à « jouer »
pour ne laisser place qu'à la sincérité touchante de cette jeune
fille. Le travail a donc mis en exergue la recherche de naturel à
l'image de Sandra, de la Fée ou encore du Prince. Le partenaire
artistique, Patrice Verdeil, voulait que le texte soit pris tel quel,
que les élèves expriment la simplicité de l'écriture de Pommerat
mais aussi que la tension du corps soit palpable parce que, dans une
certaine mesure, c'est par elle que passe les émotions. Pommerat
explique lui même que son théâtre s'adresse aux sens avant de
s'adresser à l'intellect. L'idée demandée par le metteur en scène
était simple : jouer de manière « primaire » (ou
première) le texte sans forcer la lecture psychologique dans le but,
paradoxal, que la psychologie des personnages apparaisse.