jeudi 8 septembre 2016

Barbier de Séville de Rossini mise en scène Coline Serreau (2002)

extrait air de Figaro

 Le décor amovible de Jean-Marc Stehlé, bien éclairé par Geneviève Soubirou, s'ouvre sur un désert au milieu duquel est plantée une forteresse, où Bartolo tient captive sa pupille Rosine. C'est à l'intérieur de la citadelle que se déroulera l'action, jusqu'à ce que Rosine la détruise pour retourner dans le désert qui se transforme en florissante oasis.

Interview de la metteur en scène
Comment avez-vous conçu cette mise en scène du « Barbier de Séville » ?
Coline Serreau. L'histoire se passe à Séville, à l'époque où la ville était arabe. Ce n'est pas un hasard si la légende de l'enfermement de Rosine est née ici. C'est en Espagne que la prégnance de l'intégrisme musulman d'abord, puis catholique ensuite, a été la plus forte. Le décor est conçu comme un chemin : Rosine part du désert, puis de la maison de son tuteur où elle est enfermée, elle va vers un monde libre et adulte.


On retrouve ici votre engagement auprès des femmes ?
L'engagement auprès des femmes, ce n'est pas le mien, c'est celui de Rossini, et très nettement, celui de Beaumarchais. C'est le récit de la libération d'une femme, ce n'est pas moi qui l'invente. La différence tient au fait que je vois aujourd'hui Rosine non plus en corset, comme au XVIII e siècle, mais en burqa, cette robe de toile qui emprisonne les femmes afghanes, et dont elle va peu à peu se libérer. 


Quand avez-vous imaginé cette mise en scène, très marquée par l'actualité internationale ?
Bien avant le 11 septembre, car Hughes Gall, le directeur de l'Opéra, me demande de monter « le Barbier » depuis plus de dix ans. Je lui ai remis la maquette du spectacle il y a un an et demi. La situation des femmes dans le tiers-monde et dans le monde arabe est un drame intolérable. Il n'y aura pas d'issue pour ces pays sans la libération des femmes. 


Ce n'est donc pas une version comique de l'opéra-bouffe ?
L'histoire de Rosine est loin d'être drôle. Il y a dans Beaumarchais un côté vital qui fait qu'on passe par-dessus les difficultés de la vie, mais les destins humains qu'il décrit sont contradictoires, et pas seulement comiques. Le comique pour le comique ne m'intéresse pas. Dans « Trois Hommes et un couffin », les gens ont pleuré, et dans « Chaos », qui était un film dur, on riait beaucoup dans la salle. Le monde est fait ainsi. Il passe en permanence du rire aux larmes, comme nos vies.


Quel est le lien entre l'opéra et votre métier d'actrice et de réalisatrice ?
Un bon opéra, c'est d'abord un bon scénario. L'opéra devient vraiment génial quand la musique et le texte sont réussis, comme dans « les Noces de Figaro » de Mozart et dans « le Barbier de Séville » de Rossini, deux pièces du même auteur, Beaumarchais. Mais l'alchimie est rare.