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Un blog pour les élèves des options théâtre du Lycée Camille Sée à Colmar
vendredi 31 janvier 2020
Comprendre La Cerisaie: découvrir le théâtre d'art de Moscou
Figurer le réel : le théâtre russe au XIXème siècle:
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mercredi 29 janvier 2020
Qui est Paul? (extrait de la conférence de Francis Fischer à propos de Piscine(s))
Qui est Paul ?
Paul est d’abord un des propriétaires de piscine, peut-être le plus fortuné, un de ceux qui a su profiter au mieux des bénéfices de la société néo-libérale, et si généreux en plus avec ses amis.Et puis quelque chose est arrivé (nous le découvrons au fur et à mesure dans un temps perturbé : cela a eulieu ou aura lieu). Il a chu, il est tombé, ruiné sans doute. En tout cas, isolé, rejeté, Paul gène et provoque avec ses sentences et ses prophéties intempestives. Il divise et c’est cette division qui fait la pièce, dans les corps, dans les cœurs, au plus près des affects.Ainsi on découvrira tout d’abord son corps en souffrance. Paul boite, il souffre des chevilles : un véritable concentré de symboles. Bégaudeau s’en amuse.Paul boite sans doute parce qu’il a chuté, tel un diable boiteux, il tient de l’ange déchu. Ou alors divisé en lui-même, il a encore un pied dedans la société libérale et un autre déjà dehors et sans cesse, il faut aux autres le repousser, le mettre à nouveau à terre pour se préserver de leur propre chute. C’est que tous sentent bien leurs contradictions. Bégaudeau le dit de lui-même :« Je remets à jour ce qu’est l’homme moyen aujourd’hui, le citoyen incarnant l’époque...pour voir où j’en suis avec mes contradictions, pour faire des constats : je déteste Facebook, mais je l’utilise, je sais qu’unsmartphone est redoutable, mais j’en ai un dans ma poche...je suis pris dans le flux. »1
Avec sa claudication, Paul tient aussi d’Oedipe dont le nom signifie « cheville enflée ». Sans compter son rapport à l’eau qu’il boit comme s’il s’agissait d’une source fraîche, dont il use comme élément de purification, de révélation et même de transformation.(On est plutôt loin du Swimmer de Perry où Ned, joué par Burt Lancaster, utilise les piscines comme chemin d’eau pour revenir chez lui : une odyssée du swimming home.) Mais surtout, et c’est le plus marquant, il y a le verbe de Paul, ce qu’il dit et la manière dont il intervient. Il annonce sous une forme grandiloquente et décalée, moins La bonne nouvelle (celle de la conversion des libéraux comme le fait un certain Patrick dans une pièce précédente), que la nécessaire mutation de l’humanité, une transformation de l’homme. Pas moins.« Les hommes ont fait leur temps. J’étais le dernier. Je croyais être le premier et j’étais le dernier. »Et c’est bien dans ce sens qu’il faut entendre la plupart des citations de Nietzsche proférées par Paul : je suis une fatalité, la grande santé n’est pas la bonne santé, je suis venu restaurer la cruauté etc.Encore faut-il ici se méfier. Car c’est la force du théâtre d’expérimenter sur scène, de pouvoir jouer du sens.Cet appel à la mutation (à la transmutation des valeurs dirait Nietzsche) peut s’entendre à la fois comme salutaire et d’une réelle profondeur, la « vérité » d’un penseur de l’avenir et en même temps comme un délire philosophique, la phraséologie d’un désespéré.
Explorons les deux possibilités.Prenons Paul au sérieux. Admettons-le nietzschéen.
Tout nous conduit alors à penser que ce que la société libérale fait à nos corps et à nos consciences correspond à ce que Nietzsche nomme « le dernier homme » dans le Prologue de Ainsi parlait Zarathoustra.
Tout nous conduit alors à penser que ce que la société libérale fait à nos corps et à nos consciences correspond à ce que Nietzsche nomme « le dernier homme » dans le Prologue de Ainsi parlait Zarathoustra.
Pour Nietzsche le nihilisme européen qui culmine dans l’événement de la mort de Dieu, c’est-à-dire la dévaluation de toutes les valeurs jugées jusqu’alors comme sacrées, étend son ombre sur un temps très long encore à venir, un temps où la place vide de Dieu est occupée par les idoles humaines : le progrès indéfini,la science et la technologie et surtout l’argent et le profit tout ce qui est sensé nous conduire au bonheur et àla sécurité : un temps crépusculaire de vie rabougrie et décadente désertée par le désir où a cours la bonne santé et le besoin éperdu de narcotiques.« Du bonheur nous avons fait la découverte, disent les derniers hommes, et ils clignent de l’oeil ».
D ’être un exemplaire de ce dernier homme, Bégaudeau ne s’en exempte pas. A preuve cet extrait qui se trouve vers le fin de Histoire de ta bêtise :« Le réel s’éprouve à la violence qu’il me fait...Mon mode libéral m’a rendu craintif de la violence du réel.Si le surhomme se reconnaît à la quantité de réel qu’il peut encaisser, alors je suis autant que toi un spécimen du dernier homme décrit par Nietzsche.Je suis en bout de chaîne, en fin de race, un rien m’effraie... Je ne suis pas courageux, mais je peux au moins exercer ce moindre courage de penser ce qui vient. »Paul, le personnage bégaudien est en charge de cette pensée. C’est pourquoi il prône la vitalité de la nature et une sorte de réveil de la brutalité primitive sous forme de restauration de la cruauté. Son apparition intempestive et ses propos sur la violence primitive qui nous fait défaut donnent lieu à des échanges cocasses dès les premières scènes.Mais le ton vertical et autoritaire en fait, au fil de la pièce, un prophète illuminé à la recherche de la vérité perdue, plutôt qu’un annonciateur du Surhomme. Et les situations théâtrales confrontent le penseur de génie à son existence de mâle prédateur souvent misérable. L’appel à la cruauté se résume au méprisable écrasement de son chien Glorieux et le dernier homme aimerait rester le dernier amant de sa maîtresse, d’oùle combat dérisoire avec le jeune et nouvel amant Léo qui ne peut et ne doit être le « nouvel homme ».
Alors tout ce qui fut petit et mesquin le rattrape. La grande clairvoyance de Paul/Œdipe, se heurte à son aveuglement sur lui-même.Et c’est bien en tragédie que la pièce se clôt. A preuve l’introduction dans la dernière partie d’un personnage étonnant « Homme-femme à chemise Hawaï », une sorte de Tirésias moderne, celui qui a connu la jouissance de l’homme et de la femme et qui guide Paul vers son effacement, sa finitude (tel une sorte d’Œdipe à Colone qui trouve un denier abri dans son fond de jardin). Il est difficile ici d’en parler parce que cela se joue vraiment dans la mise en scène, comme l’essentiel de ce qui vient d’être dit
Mais ce qu’on peut dire, c’est que dans toute cette fin François Bégaudeau s’amuse et que l’accès de Paul àla vérité de sa finitude s’accomplit dans ce qu’il faut bien nommer une joie tragique.Une joie qui est aussi une jouissance de l’écrivain, il le dit : « Créer un texte sans savoir si c’est une parole de vérité très autoritaire et respectable ou la parole d’un taré proche du stade terminal le rend très intéressant. On est dans un vieux motif de l’hubris, de l’orgueil d’Oedipe de voir sa vérité en face. Plus il y va, plus il découvre à quel point il est le coupable ou l’homme faible. »
Paul est d’abord un des propriétaires de piscine, peut-être le plus fortuné, un de ceux qui a su profiter au mieux des bénéfices de la société néo-libérale, et si généreux en plus avec ses amis.Et puis quelque chose est arrivé (nous le découvrons au fur et à mesure dans un temps perturbé : cela a eulieu ou aura lieu). Il a chu, il est tombé, ruiné sans doute. En tout cas, isolé, rejeté, Paul gène et provoque avec ses sentences et ses prophéties intempestives. Il divise et c’est cette division qui fait la pièce, dans les corps, dans les cœurs, au plus près des affects.Ainsi on découvrira tout d’abord son corps en souffrance. Paul boite, il souffre des chevilles : un véritable concentré de symboles. Bégaudeau s’en amuse.Paul boite sans doute parce qu’il a chuté, tel un diable boiteux, il tient de l’ange déchu. Ou alors divisé en lui-même, il a encore un pied dedans la société libérale et un autre déjà dehors et sans cesse, il faut aux autres le repousser, le mettre à nouveau à terre pour se préserver de leur propre chute. C’est que tous sentent bien leurs contradictions. Bégaudeau le dit de lui-même :« Je remets à jour ce qu’est l’homme moyen aujourd’hui, le citoyen incarnant l’époque...pour voir où j’en suis avec mes contradictions, pour faire des constats : je déteste Facebook, mais je l’utilise, je sais qu’unsmartphone est redoutable, mais j’en ai un dans ma poche...je suis pris dans le flux. »1
Avec sa claudication, Paul tient aussi d’Oedipe dont le nom signifie « cheville enflée ». Sans compter son rapport à l’eau qu’il boit comme s’il s’agissait d’une source fraîche, dont il use comme élément de purification, de révélation et même de transformation.(On est plutôt loin du Swimmer de Perry où Ned, joué par Burt Lancaster, utilise les piscines comme chemin d’eau pour revenir chez lui : une odyssée du swimming home.) Mais surtout, et c’est le plus marquant, il y a le verbe de Paul, ce qu’il dit et la manière dont il intervient. Il annonce sous une forme grandiloquente et décalée, moins La bonne nouvelle (celle de la conversion des libéraux comme le fait un certain Patrick dans une pièce précédente), que la nécessaire mutation de l’humanité, une transformation de l’homme. Pas moins.« Les hommes ont fait leur temps. J’étais le dernier. Je croyais être le premier et j’étais le dernier. »Et c’est bien dans ce sens qu’il faut entendre la plupart des citations de Nietzsche proférées par Paul : je suis une fatalité, la grande santé n’est pas la bonne santé, je suis venu restaurer la cruauté etc.Encore faut-il ici se méfier. Car c’est la force du théâtre d’expérimenter sur scène, de pouvoir jouer du sens.Cet appel à la mutation (à la transmutation des valeurs dirait Nietzsche) peut s’entendre à la fois comme salutaire et d’une réelle profondeur, la « vérité » d’un penseur de l’avenir et en même temps comme un délire philosophique, la phraséologie d’un désespéré.
Explorons les deux possibilités.Prenons Paul au sérieux. Admettons-le nietzschéen.
Tout nous conduit alors à penser que ce que la société libérale fait à nos corps et à nos consciences correspond à ce que Nietzsche nomme « le dernier homme » dans le Prologue de Ainsi parlait Zarathoustra.
Tout nous conduit alors à penser que ce que la société libérale fait à nos corps et à nos consciences correspond à ce que Nietzsche nomme « le dernier homme » dans le Prologue de Ainsi parlait Zarathoustra.
Pour Nietzsche le nihilisme européen qui culmine dans l’événement de la mort de Dieu, c’est-à-dire la dévaluation de toutes les valeurs jugées jusqu’alors comme sacrées, étend son ombre sur un temps très long encore à venir, un temps où la place vide de Dieu est occupée par les idoles humaines : le progrès indéfini,la science et la technologie et surtout l’argent et le profit tout ce qui est sensé nous conduire au bonheur et àla sécurité : un temps crépusculaire de vie rabougrie et décadente désertée par le désir où a cours la bonne santé et le besoin éperdu de narcotiques.« Du bonheur nous avons fait la découverte, disent les derniers hommes, et ils clignent de l’oeil ».
D ’être un exemplaire de ce dernier homme, Bégaudeau ne s’en exempte pas. A preuve cet extrait qui se trouve vers le fin de Histoire de ta bêtise :« Le réel s’éprouve à la violence qu’il me fait...Mon mode libéral m’a rendu craintif de la violence du réel.Si le surhomme se reconnaît à la quantité de réel qu’il peut encaisser, alors je suis autant que toi un spécimen du dernier homme décrit par Nietzsche.Je suis en bout de chaîne, en fin de race, un rien m’effraie... Je ne suis pas courageux, mais je peux au moins exercer ce moindre courage de penser ce qui vient. »Paul, le personnage bégaudien est en charge de cette pensée. C’est pourquoi il prône la vitalité de la nature et une sorte de réveil de la brutalité primitive sous forme de restauration de la cruauté. Son apparition intempestive et ses propos sur la violence primitive qui nous fait défaut donnent lieu à des échanges cocasses dès les premières scènes.Mais le ton vertical et autoritaire en fait, au fil de la pièce, un prophète illuminé à la recherche de la vérité perdue, plutôt qu’un annonciateur du Surhomme. Et les situations théâtrales confrontent le penseur de génie à son existence de mâle prédateur souvent misérable. L’appel à la cruauté se résume au méprisable écrasement de son chien Glorieux et le dernier homme aimerait rester le dernier amant de sa maîtresse, d’oùle combat dérisoire avec le jeune et nouvel amant Léo qui ne peut et ne doit être le « nouvel homme ».
Alors tout ce qui fut petit et mesquin le rattrape. La grande clairvoyance de Paul/Œdipe, se heurte à son aveuglement sur lui-même.Et c’est bien en tragédie que la pièce se clôt. A preuve l’introduction dans la dernière partie d’un personnage étonnant « Homme-femme à chemise Hawaï », une sorte de Tirésias moderne, celui qui a connu la jouissance de l’homme et de la femme et qui guide Paul vers son effacement, sa finitude (tel une sorte d’Œdipe à Colone qui trouve un denier abri dans son fond de jardin). Il est difficile ici d’en parler parce que cela se joue vraiment dans la mise en scène, comme l’essentiel de ce qui vient d’être dit
Mais ce qu’on peut dire, c’est que dans toute cette fin François Bégaudeau s’amuse et que l’accès de Paul àla vérité de sa finitude s’accomplit dans ce qu’il faut bien nommer une joie tragique.Une joie qui est aussi une jouissance de l’écrivain, il le dit : « Créer un texte sans savoir si c’est une parole de vérité très autoritaire et respectable ou la parole d’un taré proche du stade terminal le rend très intéressant. On est dans un vieux motif de l’hubris, de l’orgueil d’Oedipe de voir sa vérité en face. Plus il y va, plus il découvre à quel point il est le coupable ou l’homme faible. »
Piscine(s), une réécriture de The Swimmer de Frank Perry
Présentation du film The Swimmer
bande annonce
Analyse du film avec photos
Pour tous les artistes embarqués dans le projet Piscine(s) les références cinématographiques sont primordiales. Vous pouvez les repérer dans les différentes interviews.
Voir aussi la piscine dans le film the Party de Black Edwards avec Peter Sellars et qui a donné son nom à la compagnie d'Emilie Capliez et Matthieu Crucciani:
The party
bande annonce
Analyse du film avec photos
Pour tous les artistes embarqués dans le projet Piscine(s) les références cinématographiques sont primordiales. Vous pouvez les repérer dans les différentes interviews.
Voir aussi la piscine dans le film the Party de Black Edwards avec Peter Sellars et qui a donné son nom à la compagnie d'Emilie Capliez et Matthieu Crucciani:
The party
Interview de Zouzou Leyens costumière de Piscine(s)
Interview Zouzou Leyens : Costumière
1) Depuis quand êtes-vous sur le projet ?
Matthieu m’en a parlé de manière informelle il y a deux ans. C’est depuis le printemps qu’il m’en a parlé plus précisément en me disant que les dates de spectacles étaient fixées. J’ai commencé à rêver au projet.La difficulté est que le projet est en bord de piscine. Je suis partie à la recherche de pièces pour les costumes, mais c’était à la fin des vacances d’été et il y avait moins de choix.Nous sommes sur des costumes contemporains. Je vais travailler sur quelque chose de très précis, de fin et de non perceptible.Début juillet, Matthieu a affiné ses demandes.
2) Avez-vous déjà travaillé avec Matthieu? On s’est rencontrés avec Matthieu en 2006. J’ai travaillé sur plusieurs projets quand il était comédien. C’est son troisième projet en tant que metteur en scène sur lequel on collabore. On a beaucoup de références communes.
3) Comment travaillez-vous en collaboration avec Matthieu ? C’est un travail en grande complicité qui est pensé comme un tout.J’ai proposé de travailler sur la question d’une garde robes commune. Dans l’écriture de François Bégaudeau, il y a quelque chose de particulier : une communauté d’êtres, mais pas de personnages avec des singularités très pointés. J’ai le sentiment que les personnages peuvent être interchangeables. C’étai tdifficile de travailler sur cette sensation d’uniformité.J’ai proposé à Matthieu de travailler sur l’idée du féminin, du bord de piscine, qu’est ce qui se fait et se défait. On a suggéré de travailler sur une année symbolique de leur vie au sein de la narration et sur des saisons de leur vie (printemps/été, automne/hiver) qui seraient les saisons de la vie !!Les questions des couleurs et des matières se sont posées très vite.Ma première proposition a été celle des couleurs pastel. C’est dangereux, mais j’aime prendre des risques !!J’ai tenté la corde pastel, au risque d’en devenir désagréable. L’enjeu du projet en général, c’est grinçant !!Puis, j’ai proposé des blancs, des pastels, des rouges/fuschias /jaunes : des couleurs plus joyeuses et des couleurs d’automne.Ça a évolué. J’ai proposé des brillances avec de l’argenté pour la question des fêtes, qui viennent ponctuer les rendez-vous des personnages.La mise à l’épreuve des costumes sur la scénographie blanche a été une grande difficulté, car soit les costumes s’effacent, soit il faut se démarquer.Je me suis dit qu’il fallait des demi-teintes comme dans les années 50 et 60. C’était une référence cinématographique de cette époque. Les questions de la coupe, de la couleur, choses fines, précises, des lignes dessinées, la couleur vert de gris, beige, avec les vibrations de la fibre dans le tissu. Je suis dans cette recherche !
Je cherche des tissus vintage, de la seconde main. J’achète rarement des choses neuves. Je déteste aller dans un magasin d’une marque précise car cela fausse le regard. Je veux trouver une pièce qui me parle. Je travaille avec un magasin de costumes de seconde main à Bruxelles. Ils m’ont prêté 45 à 50 kilos de costumes.Je retouche énormément. Je travaille avec des couturiers quand je dessine les pièces. Je copie également des pièces anciennes sur du tissu contemporain et inversement.J’arrive avec des pièces depuis septembre. Je fais des allers-retours entre des dessins, des pièces et on refait des nouvelles coupes
4) Quelles sont vos influences ?
Nos références sont :- La Piscine de Jacques Deray, avec les silhouettes de Delon, de Romy Schneider
.- À bout de souffle de Jean-Luc Godard- Le Mépris de Jean-Luc Godard
- Les films de Maurice Roney
La recherche visuelle est très dessinée !!Le point de départ de tout est Larry Sultan Cela a encore plus influencé les costumes que la scénographie. ( Site du photographe Larry Sultan)
sa série Swimmers
5) Les comédiens incarnent différents personnages, comment les différenciez-vous par le costume ?
On fait glisser des personnages. Un personnage passe d’un autre sans que ce soit très différent.Pour ce spectacle, on a 40 silhouettes. Cela passe par les boucles d’oreille, les costumes, les chaussures...Je suis la costumière des maillots de bain !! C’est le quatrième en lien avec la piscine.Je travaille à partir des corps des comédiens. Les corps féminins ont les mêmes mensurations : 1m70 et les garçons aussi, sauf Arnaud. J’étais désemparée, je n’avais pas de singularité des corps.Je les dessine nus et je les habille après.Matthieu ne voulait pas stigmatiser un type de société et il voulait trouver la finesse.
Zouzou Leyens, décembre 2019.
1) Depuis quand êtes-vous sur le projet ?
Matthieu m’en a parlé de manière informelle il y a deux ans. C’est depuis le printemps qu’il m’en a parlé plus précisément en me disant que les dates de spectacles étaient fixées. J’ai commencé à rêver au projet.La difficulté est que le projet est en bord de piscine. Je suis partie à la recherche de pièces pour les costumes, mais c’était à la fin des vacances d’été et il y avait moins de choix.Nous sommes sur des costumes contemporains. Je vais travailler sur quelque chose de très précis, de fin et de non perceptible.Début juillet, Matthieu a affiné ses demandes.
2) Avez-vous déjà travaillé avec Matthieu? On s’est rencontrés avec Matthieu en 2006. J’ai travaillé sur plusieurs projets quand il était comédien. C’est son troisième projet en tant que metteur en scène sur lequel on collabore. On a beaucoup de références communes.
3) Comment travaillez-vous en collaboration avec Matthieu ? C’est un travail en grande complicité qui est pensé comme un tout.J’ai proposé de travailler sur la question d’une garde robes commune. Dans l’écriture de François Bégaudeau, il y a quelque chose de particulier : une communauté d’êtres, mais pas de personnages avec des singularités très pointés. J’ai le sentiment que les personnages peuvent être interchangeables. C’étai tdifficile de travailler sur cette sensation d’uniformité.J’ai proposé à Matthieu de travailler sur l’idée du féminin, du bord de piscine, qu’est ce qui se fait et se défait. On a suggéré de travailler sur une année symbolique de leur vie au sein de la narration et sur des saisons de leur vie (printemps/été, automne/hiver) qui seraient les saisons de la vie !!Les questions des couleurs et des matières se sont posées très vite.Ma première proposition a été celle des couleurs pastel. C’est dangereux, mais j’aime prendre des risques !!J’ai tenté la corde pastel, au risque d’en devenir désagréable. L’enjeu du projet en général, c’est grinçant !!Puis, j’ai proposé des blancs, des pastels, des rouges/fuschias /jaunes : des couleurs plus joyeuses et des couleurs d’automne.Ça a évolué. J’ai proposé des brillances avec de l’argenté pour la question des fêtes, qui viennent ponctuer les rendez-vous des personnages.La mise à l’épreuve des costumes sur la scénographie blanche a été une grande difficulté, car soit les costumes s’effacent, soit il faut se démarquer.Je me suis dit qu’il fallait des demi-teintes comme dans les années 50 et 60. C’était une référence cinématographique de cette époque. Les questions de la coupe, de la couleur, choses fines, précises, des lignes dessinées, la couleur vert de gris, beige, avec les vibrations de la fibre dans le tissu. Je suis dans cette recherche !
Je cherche des tissus vintage, de la seconde main. J’achète rarement des choses neuves. Je déteste aller dans un magasin d’une marque précise car cela fausse le regard. Je veux trouver une pièce qui me parle. Je travaille avec un magasin de costumes de seconde main à Bruxelles. Ils m’ont prêté 45 à 50 kilos de costumes.Je retouche énormément. Je travaille avec des couturiers quand je dessine les pièces. Je copie également des pièces anciennes sur du tissu contemporain et inversement.J’arrive avec des pièces depuis septembre. Je fais des allers-retours entre des dessins, des pièces et on refait des nouvelles coupes
4) Quelles sont vos influences ?
Nos références sont :- La Piscine de Jacques Deray, avec les silhouettes de Delon, de Romy Schneider
.- À bout de souffle de Jean-Luc Godard- Le Mépris de Jean-Luc Godard
- Les films de Maurice Roney
La recherche visuelle est très dessinée !!Le point de départ de tout est Larry Sultan Cela a encore plus influencé les costumes que la scénographie. ( Site du photographe Larry Sultan)
sa série Swimmers
5) Les comédiens incarnent différents personnages, comment les différenciez-vous par le costume ?
On fait glisser des personnages. Un personnage passe d’un autre sans que ce soit très différent.Pour ce spectacle, on a 40 silhouettes. Cela passe par les boucles d’oreille, les costumes, les chaussures...Je suis la costumière des maillots de bain !! C’est le quatrième en lien avec la piscine.Je travaille à partir des corps des comédiens. Les corps féminins ont les mêmes mensurations : 1m70 et les garçons aussi, sauf Arnaud. J’étais désemparée, je n’avais pas de singularité des corps.Je les dessine nus et je les habille après.Matthieu ne voulait pas stigmatiser un type de société et il voulait trouver la finesse.
Zouzou Leyens, décembre 2019.
Interview du compositeur de la musique de Piscine(s): Clément Vercelletto
Interview de Clément Vercelletto : Compositeur
1) Depuis quand travailles-tu avec Matthieu et sur ce projet ?
C’est ma cinquième collaboration avec Matthieu. J’aime écouter les voix, savoir si des comédiens sont chanteurs, musiciens, dès les premières lectures, et entendre le texte.Je compose au fur et à mesure des répétitions. Je fais des tests, on discute, on ajuste avec Matthieu. Puis je retravaille seul. C’est une boucle, des allers-retours entre le studio d’enregistrement et le plateau.Je travaille beaucoup moins en amont qu’un scénographe.
2) De combien d’instruments joues-tu ?
Je fais des percussions, du saxophone soprano, de la clarinette et beaucoup d’électronique. Je compose avec le clavier quand j’en ai besoin. Je peux faire des rythmiques sur un morceau. J’aime détourner les instruments.
3) Travailles-tu à partir de musique existante, des bruitages ?
Oui les deux !!Les bruitages :Matthieu m’a demandé d’apporter des bruitages. C’est un cas d’école au théâtre, car ça peut paraître scolaire dans le sens de recréer une réalité qui n’existe pas. On l’a beaucoup vu. C’est dur de s’en emparer.J’ai fait le choix d’utiliser des bandes de vinyles. J’ai une collection de vinyles et j’achète les vinyles d bruitage. Personne ne les achète. C’était les bandes sons de l’époque. Ce sont des vieux vinyles, pas en bon état, avec des bruits, des craquements qui se rajoutent. C’est une manière de dénoncer qu’il s’agit de bruitage et de l’assumer. Tout le monde sait qu’il n’y a pas d’oiseaux sur scène...Les musiques existantes :Il y a toujours avec Matthieu un jeu avec les musiques existantes. L’un ou l’autre les apportent. Il y a de la réappropriation, des versions remixées.J’ai fait une version de la chanson du film de Lynch In Heaven, everything is fine. J’ai realisé une reprise e tj’ai tout réinventé (la grille d’accords, rajouter une batterie, la comédienne Alicia fait la voix). On a plein de manière de travailler à partir de sons existants.
4) Tu as enregistré les voix des jeunes chanteurs de l’Opéra studio, comment vas-tu les utiliser dans la pièce ?
C’est une intuition de Matthieu de travailler avec l’Opéra studio.J’ai enregistré une partition de Bach : Komm süßer Tod, une partition que j’avais faite en chorale amateure.Chaque pupitre garde sa partition en terme de hauteur de voix mais on est libre rythmiquement. L’enjeu est de détourner des partitions. Ces voix sont utilisées dans le spectacle comme des éléments d’étrangeté,évocatrices de l’ordre du spirituel.Je vais égrainer ce chant lyrique et donner à l’entendre tout au long de la pièce.
5) Les ambiances musicales de la pièce sont importantes : pour les fêtes, as-tu choisi une ambiance particulière ? La musique évolue-t-elle au cours de la pièce ?
On n’a pas un type de musique pour toutes les fêtes, mais des déclinaisons. J’ai travaillé sur des musiques très électroniques, mais on ne les a pas encore testées !! La musique c’est l’idée d’une grammaire et d’une dramaturgie.
6) Qu’écoutent selon toi les quarantenaires branchés en soirée ? T’en es-tu inspiré ?
On s’est posé la question avec Matthieu. Ces gens ont des goûts proches des nôtres mais pas tant que ça.Qu’est-ce qu’ils écoutent et qu’est-ce qu’on donne à entendre ?On a une enceinte sur le plateau : c’est leur musique. La nôtre est plus aventureuse. Je vais jouer de contrastes !!De mon côté, j’écoute des choses très différentes, pop ou même commerciales.Pour le moment, je cherche la musique du spectacle qu’ils pourraient écouter et pour pouvoir dénoncer des choses qui sont écrites dans la pièce.Par exemple : du jazz en bruit de fond. C’est admis comme une musique que l’on n’écoute pas et mo ij’adore ça. Ça me dérange !!
7) Y a-t-il une musique qui soit un leimotiv de la pièce, revient sans cesse, se déstructure ?
Peut-être qu’on aura trouvé une chanson qui revient et qui s’entête. Il y en aura certainement une à suivre....
Clément Vercelletto, décembre 2019.
La chanson qui revient pendant les fêtes: 24OOO Baci: Adriano Celentano
1) Depuis quand travailles-tu avec Matthieu et sur ce projet ?
C’est ma cinquième collaboration avec Matthieu. J’aime écouter les voix, savoir si des comédiens sont chanteurs, musiciens, dès les premières lectures, et entendre le texte.Je compose au fur et à mesure des répétitions. Je fais des tests, on discute, on ajuste avec Matthieu. Puis je retravaille seul. C’est une boucle, des allers-retours entre le studio d’enregistrement et le plateau.Je travaille beaucoup moins en amont qu’un scénographe.
2) De combien d’instruments joues-tu ?
Je fais des percussions, du saxophone soprano, de la clarinette et beaucoup d’électronique. Je compose avec le clavier quand j’en ai besoin. Je peux faire des rythmiques sur un morceau. J’aime détourner les instruments.
3) Travailles-tu à partir de musique existante, des bruitages ?
Oui les deux !!Les bruitages :Matthieu m’a demandé d’apporter des bruitages. C’est un cas d’école au théâtre, car ça peut paraître scolaire dans le sens de recréer une réalité qui n’existe pas. On l’a beaucoup vu. C’est dur de s’en emparer.J’ai fait le choix d’utiliser des bandes de vinyles. J’ai une collection de vinyles et j’achète les vinyles d bruitage. Personne ne les achète. C’était les bandes sons de l’époque. Ce sont des vieux vinyles, pas en bon état, avec des bruits, des craquements qui se rajoutent. C’est une manière de dénoncer qu’il s’agit de bruitage et de l’assumer. Tout le monde sait qu’il n’y a pas d’oiseaux sur scène...Les musiques existantes :Il y a toujours avec Matthieu un jeu avec les musiques existantes. L’un ou l’autre les apportent. Il y a de la réappropriation, des versions remixées.J’ai fait une version de la chanson du film de Lynch In Heaven, everything is fine. J’ai realisé une reprise e tj’ai tout réinventé (la grille d’accords, rajouter une batterie, la comédienne Alicia fait la voix). On a plein de manière de travailler à partir de sons existants.
4) Tu as enregistré les voix des jeunes chanteurs de l’Opéra studio, comment vas-tu les utiliser dans la pièce ?
C’est une intuition de Matthieu de travailler avec l’Opéra studio.J’ai enregistré une partition de Bach : Komm süßer Tod, une partition que j’avais faite en chorale amateure.Chaque pupitre garde sa partition en terme de hauteur de voix mais on est libre rythmiquement. L’enjeu est de détourner des partitions. Ces voix sont utilisées dans le spectacle comme des éléments d’étrangeté,évocatrices de l’ordre du spirituel.Je vais égrainer ce chant lyrique et donner à l’entendre tout au long de la pièce.
5) Les ambiances musicales de la pièce sont importantes : pour les fêtes, as-tu choisi une ambiance particulière ? La musique évolue-t-elle au cours de la pièce ?
On n’a pas un type de musique pour toutes les fêtes, mais des déclinaisons. J’ai travaillé sur des musiques très électroniques, mais on ne les a pas encore testées !! La musique c’est l’idée d’une grammaire et d’une dramaturgie.
6) Qu’écoutent selon toi les quarantenaires branchés en soirée ? T’en es-tu inspiré ?
On s’est posé la question avec Matthieu. Ces gens ont des goûts proches des nôtres mais pas tant que ça.Qu’est-ce qu’ils écoutent et qu’est-ce qu’on donne à entendre ?On a une enceinte sur le plateau : c’est leur musique. La nôtre est plus aventureuse. Je vais jouer de contrastes !!De mon côté, j’écoute des choses très différentes, pop ou même commerciales.Pour le moment, je cherche la musique du spectacle qu’ils pourraient écouter et pour pouvoir dénoncer des choses qui sont écrites dans la pièce.Par exemple : du jazz en bruit de fond. C’est admis comme une musique que l’on n’écoute pas et mo ij’adore ça. Ça me dérange !!
7) Y a-t-il une musique qui soit un leimotiv de la pièce, revient sans cesse, se déstructure ?
Peut-être qu’on aura trouvé une chanson qui revient et qui s’entête. Il y en aura certainement une à suivre....
Clément Vercelletto, décembre 2019.
La chanson qui revient pendant les fêtes: 24OOO Baci: Adriano Celentano
Interview de Cécile Laloy chorégraphe de Piscine(s)
Interview de Cécile Laloy : Chorégraphe
« J’arrive mieux à voir qu’à entendre. »
1) As-tu déjà travaillé sur un spectacle de théâtre avec des comédiens qui ne sont pas danseurs?
Depuis 2012, je travaille régulièrement avec des comédiens sur des spectacles de théâtre et de danse.A l’école de la Comédie de Saint-Etienne, j’ai commencé en tant qu’intervenante régulière pour le corp sau théâtre. Petit à petit, j’ai rencontré des metteurs en scène. Avec Matthieu Cruciani c’est la troisième collaboration. La première fois, c’était avec des chanteurs lyriques puis avec des amateurs et deux comédiens professionnels. C’est donc la troisième fois avec Piscine(s).
2) Depuis combien de temps travailles-tu sur le projet ? En quoi consiste ta collaboration avec Matthieu ?
On a commencé à travailler ensemble depuis neuf mois à partir du texte. L’écriture de François Bégaudeau induit un travail choral.La chorégraphie et la mise en scène ne sont pas si éloignées. Je ne m’arrête pas à travailler sur les corps.Les corps des comédiens racontent des choses. L’idée est de partir du texte assez rapidement et de dessiner comme un sous texte. Quelque chose qui s’échapperait de cette pièce. L’idée de Matthieu est de créer deux langages parallèles : ce qui se dit et ce qui se voit. Ce n’est pas forcément raccord.Par exemple : plusieurs femmes s’expriment sur le féminisme. Toutes les trois se mettent à débarrasser les assiettes, ça ne change pas !!
Je travaille intuitivement. Je pars du texte, je travaille avec les comédiens et je dégage le sous texte.Il y a des moments où on travaille en binôme avec Matthieu. On fait des tentatives pour dessiner la scène physiquement comme s’il y avait une dramaturgie des corps puis on met le texte par-dessus.Par exemple : une tension est générée par la présence de Paul pour que cela se perçoive dans le corps,pas que dans la parole.Les amis de Paul ne sont pas sereins. La parole fuse. Ils sont en déséquilibre dans une société qui leu réchappe. Ce ne sont pas des gens qui agissent, ils parlent. Des fois, nos corps nous trahissent. Le discours n’est pas toujours raccord avec ce qui se dit.Il n’y a pas de la danse à proprement parlé dans le spectacle. Carolyn Carlson dit : « une attention portée à son corps : c’est déjà de la danse », un film de Jacques Tati c’est de la danse !!On travaille scène par scène avec Matthieu sur la dramaturgie. On échange. On se met d’accord sur ce qui se dit, se raconte. Je n’ai pas le même regard sur le texte. C’est ce qui l’intrigue aussi !! La danse admet l’abstraction, la poésie.... Ça alimente nos conversations.
3) Le mouvement intervient-il tout au long de la pièce ?
Oui, avec Matthieu nous travaillons conjointement sur la mise en espace de toute la pièce : sur les déplacements, les regards. L’idée qui nous amuse est de tout écrire jusqu’au regard.Nous demandons aux comédiens de refaire le même mouvement en boucle comme une société en déperdition. Je le traduis dans un langage chorégraphique. Ce n’est pas une succession de mouvements techniques et/ou esthétiques c’est plus une société qui repasse par les mêmes erreurs.Cette société est très centrée sur elle-même et vit loin de la nature. La scénographie renforce ce sentiment.Nous travaillons en contraste sur les répercussions de la nature sur eux. Comme par exemple, un orage.Je propose de cartographier l’espace afin de créer des chemins. La scénographie nous aide pour aller dans ce sens-là. C’est très dessiné : les corps surgissent !!
Je parle souvent de Jacques Tati aux comédiens comme support. C’est nouveau comme travail pour eux.Ils ont une double partition, celle du texte et celle du corps. Parfois, le corps exprime le contraire de ce qu’ils disent.Par exemple, Paul dit : « Tu devrais enlever tes chaussures Célia ». Célia lui répond « oui tu as raison,regarde, je les enlève ». Ce serait dommage qu’elle les enlève à ce moment-là, mais en aparté, cela décale le propos.Par exemple, la présence de Paul provoque un sentiment de malaise chez ses amis. Du coup, quelqu ’un fait tomber une bouteille ou casse quelque chose. Cela devient une petite ritournelle qui agit sur les corps.Le même esprit qu’un leitmotiv en musique. Il y aura une chorégraphie du groupe très cinématographique.
Cécile Laloy, Décembre 2019
« J’arrive mieux à voir qu’à entendre. »
1) As-tu déjà travaillé sur un spectacle de théâtre avec des comédiens qui ne sont pas danseurs?
Depuis 2012, je travaille régulièrement avec des comédiens sur des spectacles de théâtre et de danse.A l’école de la Comédie de Saint-Etienne, j’ai commencé en tant qu’intervenante régulière pour le corp sau théâtre. Petit à petit, j’ai rencontré des metteurs en scène. Avec Matthieu Cruciani c’est la troisième collaboration. La première fois, c’était avec des chanteurs lyriques puis avec des amateurs et deux comédiens professionnels. C’est donc la troisième fois avec Piscine(s).
2) Depuis combien de temps travailles-tu sur le projet ? En quoi consiste ta collaboration avec Matthieu ?
On a commencé à travailler ensemble depuis neuf mois à partir du texte. L’écriture de François Bégaudeau induit un travail choral.La chorégraphie et la mise en scène ne sont pas si éloignées. Je ne m’arrête pas à travailler sur les corps.Les corps des comédiens racontent des choses. L’idée est de partir du texte assez rapidement et de dessiner comme un sous texte. Quelque chose qui s’échapperait de cette pièce. L’idée de Matthieu est de créer deux langages parallèles : ce qui se dit et ce qui se voit. Ce n’est pas forcément raccord.Par exemple : plusieurs femmes s’expriment sur le féminisme. Toutes les trois se mettent à débarrasser les assiettes, ça ne change pas !!
Je travaille intuitivement. Je pars du texte, je travaille avec les comédiens et je dégage le sous texte.Il y a des moments où on travaille en binôme avec Matthieu. On fait des tentatives pour dessiner la scène physiquement comme s’il y avait une dramaturgie des corps puis on met le texte par-dessus.Par exemple : une tension est générée par la présence de Paul pour que cela se perçoive dans le corps,pas que dans la parole.Les amis de Paul ne sont pas sereins. La parole fuse. Ils sont en déséquilibre dans une société qui leu réchappe. Ce ne sont pas des gens qui agissent, ils parlent. Des fois, nos corps nous trahissent. Le discours n’est pas toujours raccord avec ce qui se dit.Il n’y a pas de la danse à proprement parlé dans le spectacle. Carolyn Carlson dit : « une attention portée à son corps : c’est déjà de la danse », un film de Jacques Tati c’est de la danse !!On travaille scène par scène avec Matthieu sur la dramaturgie. On échange. On se met d’accord sur ce qui se dit, se raconte. Je n’ai pas le même regard sur le texte. C’est ce qui l’intrigue aussi !! La danse admet l’abstraction, la poésie.... Ça alimente nos conversations.
3) Le mouvement intervient-il tout au long de la pièce ?
Oui, avec Matthieu nous travaillons conjointement sur la mise en espace de toute la pièce : sur les déplacements, les regards. L’idée qui nous amuse est de tout écrire jusqu’au regard.Nous demandons aux comédiens de refaire le même mouvement en boucle comme une société en déperdition. Je le traduis dans un langage chorégraphique. Ce n’est pas une succession de mouvements techniques et/ou esthétiques c’est plus une société qui repasse par les mêmes erreurs.Cette société est très centrée sur elle-même et vit loin de la nature. La scénographie renforce ce sentiment.Nous travaillons en contraste sur les répercussions de la nature sur eux. Comme par exemple, un orage.Je propose de cartographier l’espace afin de créer des chemins. La scénographie nous aide pour aller dans ce sens-là. C’est très dessiné : les corps surgissent !!
Je parle souvent de Jacques Tati aux comédiens comme support. C’est nouveau comme travail pour eux.Ils ont une double partition, celle du texte et celle du corps. Parfois, le corps exprime le contraire de ce qu’ils disent.Par exemple, Paul dit : « Tu devrais enlever tes chaussures Célia ». Célia lui répond « oui tu as raison,regarde, je les enlève ». Ce serait dommage qu’elle les enlève à ce moment-là, mais en aparté, cela décale le propos.Par exemple, la présence de Paul provoque un sentiment de malaise chez ses amis. Du coup, quelqu ’un fait tomber une bouteille ou casse quelque chose. Cela devient une petite ritournelle qui agit sur les corps.Le même esprit qu’un leitmotiv en musique. Il y aura une chorégraphie du groupe très cinématographique.
Cécile Laloy, Décembre 2019
Interview du scénographe de Piscines Nicolas Marie
Interview de Nicolas Marie : scénographe et créateur lumières
La scénographie
On a travaillé ensemble avec Matthieu Cruciani sur une première collaboration en 2017 avec Andromaque puis pour l’ouverture de la Comédie de Saint Etienne avec le projet amateurs Nous sommes plus grand que notre temps écrit par François Bégaudeau et en collaboration avec Cécile Laloy.On a commencé à parler de Piscine(s) durant la tournée d’Andromaque donc depuis deux ans.2017, premières ébauche J’ai fait des croquis à partir de discussions avec Matthieu. Il n’y a pas de texte à l’époque.C’est un projet de grand plateau. Il a l’idée du plongeur. Paul plonge dans l’eau entre les différentes séquences.Comment mettre un bassin sur le plateau ? On a l’idée d’un grand mur et de tulles pour faire de la projection vidéo.C’était des pistes pour donner des idées à Matthieu.
Matthieu évoque l’idée d’une installation du public en bi-frontal, d’une vraie piscine dans laquelle plonger et d’une grosse structure afin de recouvrir la piscine. Cette structure est un double de la piscine qui sert de boîte à lumières et pour les projections. On a développé ce projet.Dans la faisabilité, la piscine devait faire 1 mètre de profondeur pour plonger. Ça allait être compliqué à cause du poids qui représentait 1 tonne par mètre carré. On ne peut avoir que 500 kilos au mètre carré maximum sur un plateau de théâtre.L’idée phare de Matthieu c’était que Paul plonge et ressorte de la piscine comme des bains révélateurs.J’ai deux sources principales pour mes propositions : James Turrel et David Hockney.On abandonne cette idée de piscine profonde.
Nous partons sur l’idée d’un bassin avec peu de profondeur, mais qui s’étale sur tout le plateau sur lequel bouge une structure architecturée : un bout de villa.Je me suis inspiré d’un livre du photographe Larry Sultan « Pictures from home ». Ce photographe a renversé beaucoup de choses pour moi dans le projet : la pelouse vient de lui. Il a fait une série sur ses parents qui sont mis en situation dans leur maison. Il y a une forêt verte dans leur maison !!Au départ, j’avais l’idée d’une structure toute blanche style villa californienne et un jeu de rideaux domestiques et la pelouse verte.Pendant le spectacle, la structure (la villa) recule et le bassin est devant.On fait chiffrer ce projet qui était trop cher, l’abandon est sans appel !!Je n’étais pas forcément tout à fait satisfait de ce projet.J’avais sous le coude l’étape d’après !
La scénographie actuelle n’a pas changé sauf dans les proportions.On garde les rideaux, je les transpose en grand mur. On joue l’illusion de la piscine sans avoir de profondeur.La pelouse symbolise le jardin et un ailleurs.Cet espace est contraignant au niveau de la circulation si les comédiens ne sont pas dans le bassin au centre.Le lointain pourrait être une coulisse à vue. On y réfléchit encore.Je joue sur les codes de la piscine avec un bleu standard. Je voulais l’assumer comme une vraie piscine !!
Autour de la piscine, il y a un liner blanc et une pelouse artificielle.Cette scénographie est tout en plastique, pas très écologique certes, qui raconte quelque chose de notre société comme dans le texte de François Bégaudeau.Les objets s’accumulent dans ce lieu : des bouées (objets de décoration et de consommation.) C’est un attirail dont chacun se remplit, des objets qui ne coûtent pas très cher mais qui ne servent pas à grand-chose non plus.Les rideaux apportent un côté tragique, entre la tragédie et le sanatorium. J’ai fait un parallèle sur l’esthétique et la thématique de la déchéance avec le film Youth de Sorrentino. J’avais cette référence en arrière-plan.Les rideaux permettent d’apporter un ailleurs. On serait autrement dans une vraie piscine.Pendant le spectacle, la scénographie évolue très peu, juste avec des accessoires : avec ou sans l’échelle,des bouées, des feuilles d’automne..
La lumière :Les rideaux permettent de récupérer les reflets de l’eau.Elle s’articule avec les matériaux qu’il y a sur le plateau.Des espaces différents vont être teintés par la lumière permettant de passer de piscine en piscine.Je travaille actuellement sur la création de la lumière. Le décor est installé depuis peu et nous sommes encore en recherche.
Nicolas Marie, décembre 2019.
La scénographie
On a travaillé ensemble avec Matthieu Cruciani sur une première collaboration en 2017 avec Andromaque puis pour l’ouverture de la Comédie de Saint Etienne avec le projet amateurs Nous sommes plus grand que notre temps écrit par François Bégaudeau et en collaboration avec Cécile Laloy.On a commencé à parler de Piscine(s) durant la tournée d’Andromaque donc depuis deux ans.2017, premières ébauche J’ai fait des croquis à partir de discussions avec Matthieu. Il n’y a pas de texte à l’époque.C’est un projet de grand plateau. Il a l’idée du plongeur. Paul plonge dans l’eau entre les différentes séquences.Comment mettre un bassin sur le plateau ? On a l’idée d’un grand mur et de tulles pour faire de la projection vidéo.C’était des pistes pour donner des idées à Matthieu.
Matthieu évoque l’idée d’une installation du public en bi-frontal, d’une vraie piscine dans laquelle plonger et d’une grosse structure afin de recouvrir la piscine. Cette structure est un double de la piscine qui sert de boîte à lumières et pour les projections. On a développé ce projet.Dans la faisabilité, la piscine devait faire 1 mètre de profondeur pour plonger. Ça allait être compliqué à cause du poids qui représentait 1 tonne par mètre carré. On ne peut avoir que 500 kilos au mètre carré maximum sur un plateau de théâtre.L’idée phare de Matthieu c’était que Paul plonge et ressorte de la piscine comme des bains révélateurs.J’ai deux sources principales pour mes propositions : James Turrel et David Hockney.On abandonne cette idée de piscine profonde.
Nous partons sur l’idée d’un bassin avec peu de profondeur, mais qui s’étale sur tout le plateau sur lequel bouge une structure architecturée : un bout de villa.Je me suis inspiré d’un livre du photographe Larry Sultan « Pictures from home ». Ce photographe a renversé beaucoup de choses pour moi dans le projet : la pelouse vient de lui. Il a fait une série sur ses parents qui sont mis en situation dans leur maison. Il y a une forêt verte dans leur maison !!Au départ, j’avais l’idée d’une structure toute blanche style villa californienne et un jeu de rideaux domestiques et la pelouse verte.Pendant le spectacle, la structure (la villa) recule et le bassin est devant.On fait chiffrer ce projet qui était trop cher, l’abandon est sans appel !!Je n’étais pas forcément tout à fait satisfait de ce projet.J’avais sous le coude l’étape d’après !
La scénographie actuelle n’a pas changé sauf dans les proportions.On garde les rideaux, je les transpose en grand mur. On joue l’illusion de la piscine sans avoir de profondeur.La pelouse symbolise le jardin et un ailleurs.Cet espace est contraignant au niveau de la circulation si les comédiens ne sont pas dans le bassin au centre.Le lointain pourrait être une coulisse à vue. On y réfléchit encore.Je joue sur les codes de la piscine avec un bleu standard. Je voulais l’assumer comme une vraie piscine !!
Autour de la piscine, il y a un liner blanc et une pelouse artificielle.Cette scénographie est tout en plastique, pas très écologique certes, qui raconte quelque chose de notre société comme dans le texte de François Bégaudeau.Les objets s’accumulent dans ce lieu : des bouées (objets de décoration et de consommation.) C’est un attirail dont chacun se remplit, des objets qui ne coûtent pas très cher mais qui ne servent pas à grand-chose non plus.Les rideaux apportent un côté tragique, entre la tragédie et le sanatorium. J’ai fait un parallèle sur l’esthétique et la thématique de la déchéance avec le film Youth de Sorrentino. J’avais cette référence en arrière-plan.Les rideaux permettent d’apporter un ailleurs. On serait autrement dans une vraie piscine.Pendant le spectacle, la scénographie évolue très peu, juste avec des accessoires : avec ou sans l’échelle,des bouées, des feuilles d’automne..
La lumière :Les rideaux permettent de récupérer les reflets de l’eau.Elle s’articule avec les matériaux qu’il y a sur le plateau.Des espaces différents vont être teintés par la lumière permettant de passer de piscine en piscine.Je travaille actuellement sur la création de la lumière. Le décor est installé depuis peu et nous sommes encore en recherche.
Nicolas Marie, décembre 2019.
Piscine(s): notes d'intention Matthieu Cruciani (Suite)
Une pièce visuelle, chorale, festive, incisive
Cette pièce est comme une cavalcade qui roule, accumule de la vitesse, de la fureur, de la musique et des mots, de la danse, rend compte de la mémoire récente des hommes et femmes (blancs) qui persistent à danser sur le cadavre tiède du monde, à nager dans ses mers salies.Piscine(s), pour nous, théâtralement, doit être une forme de manège fou, ludique, estival, et ouvrir, derrièreles couleurs des fêtes, le crépuscule d’un héros délavé, dans les ruines debout d’une société rendue à l’état de cinéma. Qui ne souhaite plus distinguer l’or du toc, pensant la guerre perdue, s’enivrant de faux -semblants. Cet instant où, inconsciemment, on lâche, on se laisse couler au fond des illusions parce que le réel n’est plus soutenable.La piscine, symbole de la vacuité remplie de cette société, est au coeur de la scénographie.Le procédé narratif de notre pièce est simple. Il y a une piscine sur scène (conçue par Nicolas Marie), peu profonde mais vaste, elle agit comme un trompe-l’œil, comme un miroir aux alouettes. À chaque changement de scène, on la retrouve au centre, parfois dans un jardin différent, dans une époque différente,au cœur de nouvelles fêtes. Les personnages changent eux aussi, la société évolue, mais toujours autour de cette entité immuable.Ainsi, à mesure que le plateau s’altère, la musique s’aggrave, les noces s’assombrissent, se creusent, le héros mène l’enquête sur sa propre vie, comme on se souvient d’un rêve.À chaque îlot correspond souvent une fête, avec une texture, une ambiance, une musique. C'est toujours le même endroit qu’on parcourt, la même planète, le même fleuve qui nous trempe, et jamais tout à fait le même. Nous basculerons sensiblement d’une théâtralité pop, cinématographique, à quelque chose deplus physique, de plus présent, de plus acéré.Quant au héros, il lui faudra être attentif aux détails, attentif aux signes furtifs d'un passé en cours d’effacement à recomposer, les bouts de choix et de hasards qui lui ont composé une culture, et donc une vie.
Le travail en cours
François Bégaudeau a écrit le texte de Piscine(s) au fil de nos répétitions.Nous travaillons dans un incessant aller-retour entre texte et plateau, seulement rendu possible par dix ans de travaux communs.Au moment de mettre en critique certains aspects de notre société, un seul axiome a présidé à notre travail.Celui de se mettre en cause. Et quand il s’est agi de typer les membres de cette communauté à la dérive dont nous souhaitions faire le portrait, nous nous sommes répondus clairement par un : disons que ce serait nous. Travaillant à un théâtre visant à se mettre en cause, plutôt qu ’hors de cause. Les méchants,les perdus, les impuissants, et si c’était nous pour une fois.Une question particulière nous agit : à l’heure de l’hyper vélocité et quantité des circulations d’informations,du tourbillon des modes et des opinions, que reste-t-il de « personnel » dans nos discours ? Et quelle part,donc, d’impersonnel dans ce qui nous construit ?La pièce est bâtie sur l’alternance de dialogues et de chœur écrits, rendant le chant et la rumeur de nos pensées mises en boucle, de nos butées, l’enivrement de données et d’opinions qui, privées de passage à l’acte, racontent si bien notre sentiment contemporain d’impuissance, la sensation de savoir et de ne pouvoir rien faire.Nous avons ainsi fait deux longues résidences de travail en juin et septembre 2019, pour affiner, ajuster,approfondir notre propos, et sa manière en quelque sorte, ses codes. Faire que le texte soit celui de l’auteur,mais pas que, plus encore celui du projet singulier que nous inventons. La langue d’un univers à représenter, et des actrices et acteurs qui l’inventent au fil du travail.C’est un souhait fort que j’ai, de centrer mon travail de plateau autour de magies simples,élémentaires : les acteurs, leur texte, leurs corps dans un même mouvement. D’en faire une proposition organique. Où toutes les matières sont pétries dans le même moment commun de répétition.Pour la troisième fois consécutive, je travaille avec la chorégraphe Cécile Laloy à mes côtés, pour l’écriture physique de ce grand bal. Nous cherchons ensemble à restituer l’infra chorégraphie de nos journées, nos chorégraphies sociales, ce que disent nos corps dans l’intervalle des mots.Ce qu’ils disent de vrai quand les mots manquent ou mentent. Les récurrences de nos pas. Avec le sentiment vif qu’une société est toujours structurée comme une chorégraphie.Nous avons noué avec Clément Vercelleto, compositeur, un partenariat avec l’Opéra national du Rhin, et organisons des séances d’enregistrements des artistes lyriques de l’Opéra Studio. À partir de ceux-ci,Clément compose des « orgues à voix », dont il joue ensuite pour composer la musique et les ambiances des différentes garden party. Pour rendre aussi avec un petit clin d’œil l’atmosphère d’étrangeté et de fantastique qui parcours la pièce.Pièce où il est aussi question de disparition, de hantise et de trompe-l’œi
Cette pièce est comme une cavalcade qui roule, accumule de la vitesse, de la fureur, de la musique et des mots, de la danse, rend compte de la mémoire récente des hommes et femmes (blancs) qui persistent à danser sur le cadavre tiède du monde, à nager dans ses mers salies.Piscine(s), pour nous, théâtralement, doit être une forme de manège fou, ludique, estival, et ouvrir, derrièreles couleurs des fêtes, le crépuscule d’un héros délavé, dans les ruines debout d’une société rendue à l’état de cinéma. Qui ne souhaite plus distinguer l’or du toc, pensant la guerre perdue, s’enivrant de faux -semblants. Cet instant où, inconsciemment, on lâche, on se laisse couler au fond des illusions parce que le réel n’est plus soutenable.La piscine, symbole de la vacuité remplie de cette société, est au coeur de la scénographie.Le procédé narratif de notre pièce est simple. Il y a une piscine sur scène (conçue par Nicolas Marie), peu profonde mais vaste, elle agit comme un trompe-l’œil, comme un miroir aux alouettes. À chaque changement de scène, on la retrouve au centre, parfois dans un jardin différent, dans une époque différente,au cœur de nouvelles fêtes. Les personnages changent eux aussi, la société évolue, mais toujours autour de cette entité immuable.Ainsi, à mesure que le plateau s’altère, la musique s’aggrave, les noces s’assombrissent, se creusent, le héros mène l’enquête sur sa propre vie, comme on se souvient d’un rêve.À chaque îlot correspond souvent une fête, avec une texture, une ambiance, une musique. C'est toujours le même endroit qu’on parcourt, la même planète, le même fleuve qui nous trempe, et jamais tout à fait le même. Nous basculerons sensiblement d’une théâtralité pop, cinématographique, à quelque chose deplus physique, de plus présent, de plus acéré.Quant au héros, il lui faudra être attentif aux détails, attentif aux signes furtifs d'un passé en cours d’effacement à recomposer, les bouts de choix et de hasards qui lui ont composé une culture, et donc une vie.
Le travail en cours
François Bégaudeau a écrit le texte de Piscine(s) au fil de nos répétitions.Nous travaillons dans un incessant aller-retour entre texte et plateau, seulement rendu possible par dix ans de travaux communs.Au moment de mettre en critique certains aspects de notre société, un seul axiome a présidé à notre travail.Celui de se mettre en cause. Et quand il s’est agi de typer les membres de cette communauté à la dérive dont nous souhaitions faire le portrait, nous nous sommes répondus clairement par un : disons que ce serait nous. Travaillant à un théâtre visant à se mettre en cause, plutôt qu ’hors de cause. Les méchants,les perdus, les impuissants, et si c’était nous pour une fois.Une question particulière nous agit : à l’heure de l’hyper vélocité et quantité des circulations d’informations,du tourbillon des modes et des opinions, que reste-t-il de « personnel » dans nos discours ? Et quelle part,donc, d’impersonnel dans ce qui nous construit ?La pièce est bâtie sur l’alternance de dialogues et de chœur écrits, rendant le chant et la rumeur de nos pensées mises en boucle, de nos butées, l’enivrement de données et d’opinions qui, privées de passage à l’acte, racontent si bien notre sentiment contemporain d’impuissance, la sensation de savoir et de ne pouvoir rien faire.Nous avons ainsi fait deux longues résidences de travail en juin et septembre 2019, pour affiner, ajuster,approfondir notre propos, et sa manière en quelque sorte, ses codes. Faire que le texte soit celui de l’auteur,mais pas que, plus encore celui du projet singulier que nous inventons. La langue d’un univers à représenter, et des actrices et acteurs qui l’inventent au fil du travail.C’est un souhait fort que j’ai, de centrer mon travail de plateau autour de magies simples,élémentaires : les acteurs, leur texte, leurs corps dans un même mouvement. D’en faire une proposition organique. Où toutes les matières sont pétries dans le même moment commun de répétition.Pour la troisième fois consécutive, je travaille avec la chorégraphe Cécile Laloy à mes côtés, pour l’écriture physique de ce grand bal. Nous cherchons ensemble à restituer l’infra chorégraphie de nos journées, nos chorégraphies sociales, ce que disent nos corps dans l’intervalle des mots.Ce qu’ils disent de vrai quand les mots manquent ou mentent. Les récurrences de nos pas. Avec le sentiment vif qu’une société est toujours structurée comme une chorégraphie.Nous avons noué avec Clément Vercelleto, compositeur, un partenariat avec l’Opéra national du Rhin, et organisons des séances d’enregistrements des artistes lyriques de l’Opéra Studio. À partir de ceux-ci,Clément compose des « orgues à voix », dont il joue ensuite pour composer la musique et les ambiances des différentes garden party. Pour rendre aussi avec un petit clin d’œil l’atmosphère d’étrangeté et de fantastique qui parcours la pièce.Pièce où il est aussi question de disparition, de hantise et de trompe-l’œi
1ère Projet La Cerisaie avec Bruno Journée; séance du 20 et du 27 janvier
Présentation de Bruno Journée et de l'organisation des prochaines séances perturbées par les E3C.
Rapide retour sur "Piscine(s)
Retour sur ce que nous avons fait jusqu'ici à propos de La Cerisaie.
Echauffement: Marche neutre: au sifflrmement: arrêt, frappe dans les mains = saut, Houhou= faire demi -tour. Bien veiller à l'occupation du plateau, à l'écoute du groupe: arrêt ensemble, idem pour les sauts.
Claquement de doigts= ralenti, même les bras, tout le corps.
Lalala= on s'accroupit
Evocation de la technique de "clown de théâtre" dont Bruno est un spécialiste: se servir des accidents de jeu, des éléments extérieurs ex capter Bruno par le regard au ralenti.
Ne pas tourner en rond comme dans une prison pendant ce type d'échauffement: rester vif, dynamique, en jeu.
Eviter tout commentaire: pratiquer les exercices en silence, à l'écoute du groupe, concentrés. ( Il y a beaucoup de silences dans Tchekhov, des "pauses", des "anges qui passent")
Exercice qui favorise aussi la mémoire, association d'un son et d'un mouvement;
Exercice du ping-pong: cohésion du groupe, précision de l'adresse: bien regarder dans les yeux avant d'envoyer le geste. Faire un geste soigné et précis; pas fermer le geste, rester ouvert au public, au partenaire de jeu. dynamiser le mouvement. Le jeu est ludique mais il faut rester précis et ne pas empêcher de jouer une partie du groupe en bloquant le jeu.
Jeu du ballon imaginaire de différente couleur: toujours prendre le regard de l'autre avant de lancer, jeu harmonie et pas agon ( Malden Materic) Avoir très envie de donner et de recevoir, pas se débarasser.
Etre dans l'action/ réaction: pas trop réfléchir. réactivité.
Exercice des trois gestes à faire passer: le groupe conserve un rythme tranquille , c'est plutôt bien. Pas de commentaires car on perd le fil et se déconcentre.
Poursuite de la lecture de La Cerisaie: exercice de diction des noms. demande à Alexandre de les prononcer.
Rappel de qui sont les personnages. bien les identifier.
Réfléchir à quels rôles vous plairaient.
Finir de lire pour la séance prochaine.
Séance du 27 janvier : deux heures au lycée salle 107
Travail autour de la table en présence de Bruno.
Projet de jouer la totalité de l'acte III: l'attente de la vente de La Cerisaie dans la maison où est organisé un bal.
Lecture théâtralisée: c'est-à dire avec énergie, donner le texte au groupe.
Difficile pour certains: Bruno et moi considérons que c'est une aberration pour des "apprentis comédiens "de ne pas être concentrés pour la première lecture du texte à jouer. c'est la base du travail: entrer dans la matière textuelle qu'il faudra incarner, s'approprier la fable, découvrir les personnages, leurs relations, s'interroger sur le sous-texte: ce qu'ils disent n'est pas ce qu'ils ressentent toujours.
Exercice de rythme pour comprendre la ponctuation des phrases et donc les pauses nécessaires: wiz pour la virgule, frappe sur la table pour le point etc: permet de pauser la lecture à condition que les bruits ne supplantent pas l'écoute du texte.
Dire pour la séance prochaine les parties que vous voulez jouer dans l'acte III et éventuellement IV.
Le découpage définitif sera donné lundi prochain.
Rapide retour sur "Piscine(s)
Retour sur ce que nous avons fait jusqu'ici à propos de La Cerisaie.
Echauffement: Marche neutre: au sifflrmement: arrêt, frappe dans les mains = saut, Houhou= faire demi -tour. Bien veiller à l'occupation du plateau, à l'écoute du groupe: arrêt ensemble, idem pour les sauts.
Claquement de doigts= ralenti, même les bras, tout le corps.
Lalala= on s'accroupit
Evocation de la technique de "clown de théâtre" dont Bruno est un spécialiste: se servir des accidents de jeu, des éléments extérieurs ex capter Bruno par le regard au ralenti.
Ne pas tourner en rond comme dans une prison pendant ce type d'échauffement: rester vif, dynamique, en jeu.
Eviter tout commentaire: pratiquer les exercices en silence, à l'écoute du groupe, concentrés. ( Il y a beaucoup de silences dans Tchekhov, des "pauses", des "anges qui passent")
Exercice qui favorise aussi la mémoire, association d'un son et d'un mouvement;
Exercice du ping-pong: cohésion du groupe, précision de l'adresse: bien regarder dans les yeux avant d'envoyer le geste. Faire un geste soigné et précis; pas fermer le geste, rester ouvert au public, au partenaire de jeu. dynamiser le mouvement. Le jeu est ludique mais il faut rester précis et ne pas empêcher de jouer une partie du groupe en bloquant le jeu.
Jeu du ballon imaginaire de différente couleur: toujours prendre le regard de l'autre avant de lancer, jeu harmonie et pas agon ( Malden Materic) Avoir très envie de donner et de recevoir, pas se débarasser.
Etre dans l'action/ réaction: pas trop réfléchir. réactivité.
Exercice des trois gestes à faire passer: le groupe conserve un rythme tranquille , c'est plutôt bien. Pas de commentaires car on perd le fil et se déconcentre.
Poursuite de la lecture de La Cerisaie: exercice de diction des noms. demande à Alexandre de les prononcer.
Rappel de qui sont les personnages. bien les identifier.
Réfléchir à quels rôles vous plairaient.
Finir de lire pour la séance prochaine.
Séance du 27 janvier : deux heures au lycée salle 107
Travail autour de la table en présence de Bruno.
Projet de jouer la totalité de l'acte III: l'attente de la vente de La Cerisaie dans la maison où est organisé un bal.
Lecture théâtralisée: c'est-à dire avec énergie, donner le texte au groupe.
Difficile pour certains: Bruno et moi considérons que c'est une aberration pour des "apprentis comédiens "de ne pas être concentrés pour la première lecture du texte à jouer. c'est la base du travail: entrer dans la matière textuelle qu'il faudra incarner, s'approprier la fable, découvrir les personnages, leurs relations, s'interroger sur le sous-texte: ce qu'ils disent n'est pas ce qu'ils ressentent toujours.
Exercice de rythme pour comprendre la ponctuation des phrases et donc les pauses nécessaires: wiz pour la virgule, frappe sur la table pour le point etc: permet de pauser la lecture à condition que les bruits ne supplantent pas l'écoute du texte.
Dire pour la séance prochaine les parties que vous voulez jouer dans l'acte III et éventuellement IV.
Le découpage définitif sera donné lundi prochain.
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